La FMEJ brosse le panorama de la presse écrite et du lectorat

Soucieuse de compléter les informations fournies par l’Organisme Marocain de Justification et de Diffusion (OJD) sur la diffusion des titres de presse au Maroc,  la Fédération Marocaine des Editeurs de Journaux (FMEJ), avec l’appui du ministère de la Communication, a confié à LMS-CSA, société d’études de marché au Maroc, la tâche de brosser le panorama de la presse marocaine et le profil du lectorat. Cette étude qui s’est étalée du 02 novembre au 15 décembre 2015, a pris comme socle les deux plans qualitatif et quantitatif.

Sur le plan qualitatif, l’organisme responsable de l’étude a ciblé une population urbaine et périurbaine alphabétisée en constituant selon un système de quotas, un échantillonnage sur 2098 lecteurs des deux sexes confondus, répartis en 12 groupes de différentes tranches d’âge allant de 15 à 60 ans. Sur le plan quantitatif, l’expert s’est outillé de la méthode de recueil d’information CAPI qui privilégie le face à face et l’usage des NTIC lors des interviews qui atteignait les 30 minutes.

A première vue, les études ont démontré la place prépondérante de l’Internet, qui fait l’objet de média de prédilection chez la majorité des tranches d’âge (15-60 ans), hormis celle des (61-65 ans) qui privilégient la presse écrite pour s’informer. Ceci est sûrement dû, et toujours selon l’étude, à la forte volonté des 61-65 ans à approfondir l’information qu’offrent la télévision et Internet, à l’accessibilité sur le plan spatio-temporel, à la diversification des sujets et surtout à enrichir sa culture générale par une langue soutenue.

Toutefois, quant à la crédibilité, une divergence s’opère. Alors que certains croient en la fiabilité de l’information parce que connaissant des supports à qui ils ont toujours porté fidélité parce que les articles y sont nominatifs, d’autres contestent la non-fiabilité de la presse sur papier pour le conformisme qui peut en ressortir, pour les statistiques erronées sur un même fait, le côté esthétique qui laisse à désirer (noir et blanc) et le format ni peu ni prou pratique. Ajoutant à cela le retard de l’information ou encore, les querelles qui opposent certaines plumes, ce qui confère au support une étiquette d’arène.

Internet demeure l’espace préféré pour s’informer d’une majeure partie de la population sujette à l’étude de LMS-CSA. Femmes et hommes, de tous âges, trouvent en le Web le média par excellence, chez les 18-25 ans, pour être à l’affût d’une information – souvent gratuite – et appuyée par des illustrations voire des vidéos pour briser l’ombre du doute quant à sa fiabilité. S’ajoute à cela la capacité de faire part de ses opinions, notamment pour les 26-40 ans, et ce par la possibilité de commenter à travers les réseaux sociaux et les forums, acte qui laisse éclore le lien social et le sentiment d’appartenance à une communauté qui partage les mêmes centres d’intérêt. D’autres évoquent dans ce sens, le rôle pédagogique du Web pour les 15-17ans qui y trouvent un espace propice à la culture générale et aussi à la recherche avec, de surcroît, une lecture très aisée grâce au zoom et les différentes souplesses qu’offre la technologie. Cependant, il n’en demeure pas moins qu’Internet n’est pas exempt de remarques négatives, et qui varient entre une information brève et sans ampleur analytique et un style rédactionnel pas très louable et dû à la contrainte des lois de la rédaction-web, qui privilégie les flashs-infos qui peuvent amoindrir l’intérêt à l’envie de lecture et inhiber leur concentration aux jeunes. D’autant plus que ce média représente des dangers sur la santé des internautes et des mobinautes, principalement pour les yeux.

De son côté à elle, la télévision, média mariant l’audio au visuel, parait octroyer jusqu’à présent et comme à l’accoutumée, une vision générale sur l’information mais également du divertissement. Le petit écran en joignant l’utile à l’agréable semble garder une place des plus importantes dans le quotidien des ménages car offrant une palette de programmes qui touchent toutes les classes et tous les âges. Les chaînes pullulant, le téléspectateur se voit comme choyé par une programmation diversifiée qui laisse une grande marge de choix. Les marocains tissent, globalement, un bon rapport avec leur petit écran qui leur sert des émissions qui leur parlent, chacun selon son niveau et ses penchants. En quête d’une information fiable, Medi1 TV est des plus sollicitées, ou encore 2M. D’autres recourent à des stations étrangères telles TV5 ou Euronews et de moins en moins Al Jazeera, qui a perdu une audience considérable après avoir marqué un point noir lors des divers faits que le monde a connus ces dernières années.  Pour ce qui est de la culture et du divertissement, il existe néanmoins quelques émissions qui ont gagné les louanges par l’implication de leurs animateurs et le contenu qu’elles proposent. Sur la chaîne télévisée Médi1 TV, l’intérêt est porté à l’émission Bidoun Haraj – diffusée en direct – et Mouatén Al Yaoum. 2M, quant à elle, joint l’utile à l’agréable, à travers l’émission-débat hebdomadaire Moubachara Maakoum et Sabahiyat 2M, émission quotidienne dédiée à la femme et animée par Elle. D’autres émissions de la même chaîne (2M) ne bénéficient naturellement pas, avec certains films sans fin et sources intarissables de pleurs (Turques, Hindou etc.), des acclamations du citoyen marocain plus sensible quant à la chose médiatique. De plus, le manque de programmes destinés aux jeunes et d’autres dédiés à la religion constitue un souci chez une bonne partie de la population marocaine et auquel il faudra remédier.

La radio par contre, en dépit de son image de «la vieille des médias», tient toujours sa place dans le paysage médiatique en touchant les jeunes entre 18 et 25 ans dans les villes de Casablanca et Rabat, et exceptionnellement à Tanger, les adultes de 41 jusqu’à 50 ans à Tanger, selon l’enquête. Proposant un large choix musicale pour servir l’ouïe mélodieuse des premiers, et proposant des émissions intéressantes et à caractère constructive pour les seconds, la radio, grâce au professionnalisme de ses journalistes/animateurs, tient toujours sa place sur les rails. Il faut dire que face à la démocratisation de la vidéosphère, le manque de l’image et de la vidéo émousse l’intérêt que les gens peuvent y porter. Réalité qui ne lui ôte pas son sa capacité à livrer une information toujours utile si l’on se trouve loin des supports médiatiques suscités.

Le magazine est considéré comme un média de divertissement qui ne suscite pas un grand intérêt chez les marocains. Offrant majoritairement des sujets tendant vers des questions profitant plus aux femmes qu’aux hommes, ce dernier se voit taxé d’un contenu très chargé, d’un abus publicitaire, d’une écriture à peine lisible, d’une information dépassée par rapport aux autres support, en plus de la cherté au niveau du prix. De plus, il n’est pas ancré dans les habitudes des marocains comme l’avancent certains interviewés (es) : «Nous avons grandi avec la télévision et pas avec les magazines» ou encore : «Je n’ai jamais vu mes parents lire un magazine».

L’étude s’est également penchée sur le type de presse habituellement lue. Sur la base de 2098 répondants, la presse arabophone détient la part du lion, s’accaparant de 94% du lectorat, la presse indépendante gagnant 88% face une presse partisane loin de l’égaler avec un taux de 1% loin derrière la presse régionale et étrangère qui atteignent respectivement les 34 et les 38%. Le lectorat francophone doit, quant à lui, 55% à sa presse.

Ainsi, il a été remarqué que la presse électronique (57%) obstrue la liquidation du papier qui se contente de 17%. Les deux types de presse, formant le taux modeste de 29% : très loin des espérances !

Les actualités politique (65%), sportive (53%) et généraliste (42%) paraissent plus alléchantes au public, selon l’étude, que celles traitant de la santé (38%), de l’économie et finance (35%) ou des  sciences et technologies (32%). Des chiffres que nous pouvons comprendre en parcourant la fréquence de lecture des marocains qui, pour des raisons diverses dont les plus prégnantes au regard des interviewés (es) sont l’accessibilité à la lecture (dans les cafés…), ce qui ne stimule pas l’acte d’achat, la gratuité de l’information sur Internet (en payant son café, sa lecture est garantie), la banalité des sujets abordés ou encore pour les –soit disant- intéressés, le retard enregistré quant à la circulation de l’information via la presse papier. Ceci étant, 18% des 15-24 ans disent lire tous les jours  la presse quotidienne contre 49% qui avouent ne jamais la parcourir des yeux. Avec une légère différence opérée chez les 25 et plus qui atteignent les 26% de lecteurs quotidiennement contre 41% qui préfèrent s’en abstenir !

Ayant naturellement un but lucratif, ce qui fait leur gagne-pain aux acteurs de la presse écrite et la vie d’un support écrit, l’aspect économique demeure toujours aux antipodes des aspirations des professionnels du secteur. Généralement, 27% achètent la presse quotidienne quotidiennement ou presque. A l’opposé, 45% l’achètent au plus, une à 2 fois par semaine. La même tendance est observé quand on considère les 25ans et  plus, uniquement avec un taux de 32%.

Malgré cela, 16% des lecteurs de la presse hebdomadaire déclarent être abonnés à un hebdomadaire ou à un mensuel et ce, malgré le manque d’intérêt (26%) et de temps (17%), la gratuité de ce type de presse sur Internet (15%) ou encore, le coût élevé de l’abonnement (10%).

La presse électronique, quant à elle, jouit d’un afflux sur la toile via les Smartphones et les applications s’y trouvant qui lui permettent d’être consultée et lue quotidiennement avec un taux de 66% chez les jeunes et 62% chez les adultes. Pour ceux qui y trouvent difficultés, les obstacles les plus déclarées sont de l’ordre d’une méconnaissance de sites ou de la presse électronique ou encore d’une préférence pour d’autres moyens en vue de s’informer. Deux obstacles majeurs (entres autres moins majeurs), qui se départagent l’un comme l’autre des taux, pas si alarmant que ceux entravant la presse papier !  Si l’on s’en tient à cette enquête où, selon les enquêteurs, « tous les résultats par profil de répondant (âge, sexe, CSP, segment, instruction…) ont été soumis a des tests de significativité avec une marge d’erreur de 5%. », il est serait insensé et aberrant même de nier la nécessité des efforts à déployer pour remédier à ce fossé que creuse la presse écrite marocaine.

Parler d’un lectorat sans lecteurs ni même l’envie de lire la presse écrite est la conséquence d’une socialisation défaillante, qui a sonné le glas du plaisir de lire la tribune, et encore plus, celui de la rédiger !

Ahmed Mesk

Miftah : l’entreprise de presse est en danger

NOUREDDINE MIFTAHPour le président de la Fédération marocaine des éditeurs de journaux (FMEJ), Noureddine Miftah,  l’étude a montré que l’entreprise de presse est en danger au Maroc. Et ce, a-t-il expliqué, à cause du phénomène de la gratuité. Plus d’un million de personnes accèdent gratuitement à l’information. En multipliant ce nombre par le prix de vente des quotidiens qui est de quatre dirhams, la perte dépasse les quatre millions de dirhams. C’est dire que les dégâts sont énormes à cause notamment du phénomène de gratuité. 

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