Si, depuis 1987, il n’y a pas eu d’élections municipales au Togo; un pays présidé par les Gnassingbé père et fils, depuis 1967, ce dimanche 30 juin 2019 est à marquer d’une pierre blanche puisque ce sont 3,4 millions d’électeurs qui ont été appelés à élire ceux qui, en représentant les 24 partis politiques en lice, occuperont les 1527 sièges de conseillers municipaux à pourvoir et auront la charge de désigner les maires qui dirigeront les 117 communes que compte le pays.
N’étant donc pas habitué à l’alternance politique, le Togo, que le général Eyadéma Gnassingbé a dirigé, d’une main de fer et avec la bénédiction de Paris, de 1967 à 2005, n’a jamais été préoccupé par le respect de la règle constitutionnelle. Aussi, Faure Gnassingbé, en digne successeur de son père, bien qu’étant «moins brutal», ne semble pas prêt à se dessaisir du pouvoir même si, pour attirer entrepreneurs et investisseurs étrangers, il se doit d’«améliorer» la piètre réputation de son pays à l’étranger. Et le scrutin de ce dimanche est, justement pour ce dernier, l’occasion de démontrer, à la communauté internationale, sa bonne foi en donnant du Togo «l’image d’un pays apaisé après deux ans de troubles et de marches virulentes de l’opposition contre la gouvernance du clan Gnassingbé».
Mais, bien que le scrutin de ce dimanche soit d’une importance capitale car pouvant mettre un terme à cette période de 32 années durant laquelle les communes avaient toujours été dirigées par des «présidents de délégation spéciale» nommés par le Président de la République, les togolais ne se sont pas empressés vers les bureaux de vote. Aussi, à 16 heures, le taux d’abstention avoisinait 75% même si, dans la matinée, le président Faure Gnassingbé qui avait voté dans un bureau de Pya, sa région d’origine située à plus de 400 km de la capitale, avait «exhorté» ses compatriotes à «participer massivement pour un choix libre» à ces élections qui constituent «une avancée majeure dans l’enracinement de la démocratie».
Et si les élections municipales de ce dimanche au Togo se sont déroulées dans le calme et sans incident majeur, la raison en est principalement cette absence totale d’engouement de la part de la population et surtout des jeunes qui ont préféré s’abstenir tant les dissensions sont énormes au sein d’une opposition qui, après avoir boycotté les élections législatives de Décembre dernier, s’est présentée en ordre dispersé aux élections municipales de ce dimanche.
Cette opposition, qui n’est donc pas représentée au Parlement et qui compte sur ce scrutin pour peser dans la balance va-t-elle pouvoir arriver à ses fins et remporter le maximum de communes maintenant que, dans le pays, les données ont changé et que les citoyens sont, désormais, en passe d’être impliqués dans la gestion de leurs localités ? Attendons pour voir…
Nabil El Bousaadi
