Écrire : Plaisir, besoin, soif ? Que sais-je ? Écrire : Accouchement, vomissement, hémorragie ? Que sais-je ? Écrire : Défoulement, exorcisme, catharsis ? Que sais-je ? Écrire : Alchimie, prophétie, divination ? Que sais-je ? Écrire : Masturbation linguistique, snobisme littéraire, frime intellectuelle ? Que sais-je ? Écrire : Est-ce tout cela et d’autres choses encore ? Est-ce tout cela ou autre chose ? Qu’importe !
Je dois t’avouer, cher lecteur, que je ne me suis jamais posé la question…Je m’excuse de te tutoyer sans ton consentement. Je l’ai fait spontanément comme Prévert tutoyant Barbara, lui disant :
«Et ne m’en veux pas si je te tutoie. Je dis tu à tous ceux que j’aime même si je ne les connais pas».
Certes, je ne te connais pas, cher lecteur. Je t’aime tout de même. Tu es ma raison d’être, mon oxygène. Sans toi, je meurs ! Un auteur sans lecteur est condamné à l’extinction, à l’oubli et au mutisme éternel.
Comment ne pas t’aimer, cher lecteur ? Qui que tu sois, où que tu sois, quels que soient ton âge, ton sexe, ton identité, ta religion, tes convictions politiques, ta philosophie, tes principes, la couleur de ta peau, tes rêves, ton compte en banque, tes attentes, tes cauchemars, tes déceptions…, en me lisant, tu me fais ivre ! Je vis à tes dépens. Je suis un parasite. Sans toi, je meurs, cher lecteur ! Baudelaire, ce poète admirable t’appelle «- Hypocrite lecteur, – mon semblable, – mon frère !»
Alors, puisque nous sommes frères et complices, laisse-moi me confesser, cher lecteur ! J’ai tant de choses à te dire, tant de secrets à te dévoiler. Laisse-moi me mettre à nu et écoute-moi sagement comme un enfant qui écoute un conte merveilleux…Et si mon récit ne suscite chez toi aucun intérêt, tu peux froisser ce papier et le jeter dans la rue, sur le trottoir. Personne n’y prêtera attention, personne ne te fera de remontrance. Ce ne sont pas nos oignons, c’est l’affaire de la municipalité. Si nous ne jetions plus de saletés dans la rue, elle deviendrait propre. Quelle horreur ! Que feraient alors les employés municipaux ? Ils chômeraient et seraient licenciés ! Comment donc nourriraient-ils leur progéniture ? Ce n’est nullement par indifférence ou incivisme que l’on jette des ordures sur le trottoir, c’est par solidarité avec les employés de la municipalité !
Oui, je m’égare, je radote, je passe du coq à l’âne. Je l’avoue : Je suis très prolixe… Sois clément, cher lecteur, et accepte-moi comme je suis ou jette-moi tout entier ! Je suis à prendre ou à laisser et n’y peux rien…Au fait, je sais à présent pourquoi j’écris. La raison est aussi évidente qu’insignifiante : J’aime raconter des histoires, c’est tout ! Ce n’est pas sorcier. Des histoires imaginaires ou véridiques, drôles ou moroses ; Cela dépend de mon état d’âme, de mon état de santé, de mon état d’esprit…En tout état de cause, Je dois écrire puisque je suis écrivain de mon état. Et lorsque j’écris, je suis dans tous mes états…De grâce, accepte mes caprices d’auteur et lis-moi ! J’ai tellement besoin que tu me lises, cela me permet de rester en vie. Tu as le pouvoir de me rendre éternel. Même si je te raconte des histoires à dormir debout, même si mon sujet ne te dit absolument rien, même si mon style ne te branche pas, même si mes idées ne t’intéressent pas (d’ailleurs, je n’en ai pas), fais semblant, sois hypocrite, fais un effort, ne sois pas sévère, un peu de complaisance quoi !
(A SUIVRE …)
Mostafa Houmir