Et après ?

Le Chef du gouvernement aurait pu contribuer à la réalisation d’un aspect du programme gouvernemental en usant des prérogatives que lui confère la constitution pour « entretenir des rapports de coopération constructive et de communication permanente avec le Parlement, dans le cadre du respect total de la séparation des pouvoirs et de leur coopération étroite et fructueuse ».

Le chef du gouvernement a fait son choix : Il n’usera pas de l’application de l’article 101 de la constitution pour faire son bilan d’étape devant le parlement.

Il a exposé hier, mercredi au soir, sur les deux chaînes de télévision financées par l’argent du contribuable, le bilan des 100 premiers jours de son gouvernement.Les mauvaises langues diront qu’un show télévisé permet de soigner « une image professionnelle » éraflée par des silences relevés par l’ensemble médiatique ; alors qu’un discours devant les parlementaires serait plus ardu à tenir avec le risque de perdre sa vocalisation et plus.

Dans l’interview, tout est dans l’apparence, la posture et la gestuelle avec cette possibilité de retrouver sa respiration pour ne pas perdre le fil de ses idées ; alors que derrière le pupitre, à lire un écrit dont la syntaxe n’est pas mienne et à laquelle on n’est pas habitué, on peut provoquer la somnolence, voire être soi-même sujet à l’assoupissement (cela est arrivé !)et perdre de la confiance, celle de soi et celle tant convoitée, objet de la communication.

En fin de compte, c’est la facilité et la recherche du confort qui ont prévalues sur la consolidation de l’institution parlementaire.

Mais au fait, pourquoi les cent jours ? Pourquoi pas « deux mois qui se suivent » ?Les « cent jours » est une pratique qui vient d’une histoire qui n’est pas la nôtre. C’est pareil pour les bûches de Noël et du Nouvel an, la galette des rois et autres amuse-gueules qui font croire à leurs acquéreurs qu’ils ont un pas dans la modernité ! De même que ce n’est pas en communiquant sur trois mois et quelques jours d’activité routinière que l’on répond aux attentes et aux besoins de la population pour le lendemain et les jours qui suivront.

Pourrait-on avancer que cette période permet d’augurer le changement en vue de réaliser avec certitude une société juste et prospère ?

On ne peut demander au plus compétent des gouvernements de donner plus qu’il n’en a. Car, les diplômes c’est bon pour soi ; encore faut-il se faire embaucher et s’assurer de la stabilité de son emploi. Vont-ils servir pour que le chômage des diplômés dans notre beau pays ne reste plus dans l’état où il est ?Vont-ils permettre de rehausser notre enseignement supérieur, notre recherche scientifique, notre système éducatif et en faire un véritable levier du développement ?

Et les autres questions, celles qui fâchent et celles qui s’imposent ?

Quelles réponses apporter aux envolées des prix des hydrocarbures ? Quelle concurrence honnête pourrait-elle s’exercer dans ce domaine alors que le passé antérieur a connu des ententes ayant entrainé des abus de la confiance du consommateur ? Quelle diligence sera-telle apportée au projet de loi déposée par le Groupe parlementaire du Parti du Progrès et du Socialisme à la Chambre des représentants pour parvenir à une régulation de ces prix et à la protection du pouvoir d’achat des consommateurs ?

Quelle politique énergétique pour le Maroc, particulièrement après les défaillances de la stratégie solaire décrites par l’avis du Conseil économique, social et environnemental sur la transition énergétique au Maroc ?

En ces temps où la rareté des précipitations accentue le stress hydrique que connaît le royaume, et dans le cadre des changements climatiques qui s’exercent, quelles pratiques agricoles pour le Maroc ?Celles de la sécurité alimentaire et de l’autosuffisance pour une bonne et saine alimentation ou celles de la rivalité entre les cultures d’exportation et les cultures vivrières ; sans arriver pour autant à circonscrire le déficit de la balance commerciale ?

Quelle industrialisation pour le Maroc ? Entre le dépérissement et la renaissance, entre le désengagement de l’Etat et l’encouragement de l’investissement, particulièrement celui venant de l’étranger, entre le renforcement et la protection du système industriel et l’ouverture impérative ; entre les avantages comparatifs du siècle dernier et ceux imposés par la mondialisation et son évolution ; entre la réticence d’assumer le risque et le gouffre de l’informel …

Quelle fiscalité, juste et équitable, pour traduire la solidarité, renforcer la cohésion sociale et assurer le développement inclusif souhaité ?

Quels apaisements apporte le gouvernement à la société marocaine dans sa recherche de l’émancipation et de la jouissance des droits de la personne humaine ; dans sa recherche à effacer les disparités spatiales et à éliminer les inégalités sociales ?

Quelles actions sont menées pour la protection de l’environnement du royaume, au moment où le littoral convoitéest dégradé, les estuaires qui se colmatent la pollution menace et que la déforestation semble devenir un jeu où la mise se fait en pieds de cèdre ?

Que fait le gouvernement pour que la loi soit respectée, que la gouvernance soit la meilleure et que l’effort soit méritoire ?

Sûrement que le Chef du gouvernement a apporté sa contribution personnelle pour éclairer le peuple, rétif à accorder sa confiance quand la conviction fait défaut. Nous sommes au lendemain de son intervention télévisée et la lecture de ce qui précède (abrégé de ce fait) est dépassée ; car chacun se demande… Et après ?

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