Faut-il en rire ou en pleurer ?

Autrement dit

par Mustapha Labraimi

L’approche des échéances électorales fait que les débats au sein de la Chambre des Représentants soient relevés en populisme et en surenchère. Les conséquences socioéconomiques du couvre-feu pendant le mois de Ramadan sur une grande partie de la population ont fourni, lors de l’interpellation d’un membre du gouvernement, l’occasion à des interventions vengeresses. La chaleur communicative des envolées discursives a poussé les membres de l’élégerocratie à des expressions déplacées et à des jugements de valeur excessifs ; ce qui a permis au ministre interpellé de la jouer responsable, en étant presque moralisateur.

Ainsi ; le responsable gouvernemental a emporté la manche sur la forme. Quant au fond, ni les honorables représentants de la nation, ni le respectable représentant gouvernemental ne l’ont abordé ; et en conséquence, lui apporter les solutions nécessaires au dépassement de ses dysfonctionnements. Déjà ; que les uns et les autres acceptent de citer des petits boulots entrepris à la sauvette est un signe !

Car notre société est fondamentalement inégalitaire. Les disparités entre les personnes et les classes sociales s’accroissent de plus en plus, et deviennent de plus en plus visibles, criantes et agressives. L’épidémie de la covid-19 n’a fait que mettre en exergue les écarts et les difficultés qu’affrontent une grande partie de la population pour subvenir à ses besoins fondamentaux. Les choix des politiques publiques, marqués par le néolibéralisme, ont affaibli la capacité des forces productives nationales dans leur ensemble à s’intégrer dans le processus de développement. Ni la force de travail, ni l’entreprise artisanale, ni même le capital national quand il s’aventure dans des investissements productifs n’ont pu être utilisés et encouragés comme des leviers du développement socioéconomique national, visant l’amélioration du niveau de vie de la population et le renforcement de la cohésion sociale.

Les petits boulots entrepris à la sauvette n’existent que par défaut. C’est vivre de cela ou se laisser ronger par le chômage structurel que l’on n’arrive pas à éliminer. Nos honorables représentants doivent prescrire de leur langage toute occupation indigne de la personne humaine et qui la maintient dans le besoin et l’aliénation. A moins qu’ils estiment qu’il s’agit de leurs troupes et fans lors des opérations électorales… 

La rente reste favorisée aux dépens de l’équité sociale. La fiscalité est loin d’assurer « les transferts nécessaires » aux démunis et aux nécessiteux. Sa réforme, de fond en comble, reste toujours un souhait dont la réalisation s’éloigne parallèlement à l’accentuation des méandres du processus démocratique.

Les services sociaux, particulièrement l’éducation et la santé, sont laissés aux forces du marché sans que les capacités individuelles ou familiales ne puissent être en mesure de répondre à leurs exigences. Le bienêtre des ménages est souvent le résultat d’une alchimie qui ne favorise ni la modernité, ni un développement participatif et inclusif. L’ascension sociale relève beaucoup plus de parcours aléatoires que de la méritocratie dans une société ouverte où sont garantis « aux citoyens le plein et égal exercice de leurs droits fondamentaux économiques, sociaux, culturels et environnementaux au même titre que leurs droits civils et politiques ».

Le discours politique est différent de tout autre discours car il s’inscrit dans la recherche de la résolution ou, pour le moins, la réduction des conflits de la société. Dans le cadre de la pratique démocratique, il permet d’exprimer des opinions contradictoires tout en restant fidèle au projet sociétal dont il est l’émanation. Sa diffusion dans l’espace public, lors des séances télévisées ou à travers les réseaux sociaux, doit contribuer à l’émergence d’une conscience pour dépasser les avatars de la pratique politique actuelle du jeu stérile qu’elle peut être à une contribution à la mise en œuvre du changement souhaité. Ce n’est pas l’objet d’un divertissement quelconque ou celui d’une manipulation où l’émotion l’emporte sur la raison.

La transformation de notre société qui s’effectue, malgré ses aspects contradictoires, doit obliger l’ensemble des acteurs du champ politique et des partenaires socioéconomiques à envisager le temps où cette transformation s’effectue. Le 21unième siècle s’annonce déjà avec ses révolutions dans l’acquisition du bienêtre. Il est possible pour notre société de connaitre une évolution distinguée aussi bien au niveau des ensembles territoriaux en donnant à la régionalisation avancée une assise réelle et efficace qu’au niveau de la population par un modèle de développement inclusif, national et démocratique.

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