Les tambourinaires est pluriel de : une ou un tambourinaire, dans le contexte du chant instrumentalisé et non pas dans le contexte de l’ ahidous. Ce métier ou passion, dans le sens propre du mot se traduit en tamazight par : Boualloune et en arabe par Bnadri.
A travers l’histoire de notre art, ce champ était jadis monopolisé par les femmes qui accompagnaient l’artiste principal jouant de: luth, violon, outar ou de flûte. Ces femmes auxquelles le surnom de : Chikhates (singulier de chikha) leur a été attribuées péjorativement pour mettre l’accent sur leurs mœurs licencieuses.
Ce jugement est erroné dans la mesure où leurs admirateurs n’arrivaient pas à dresser une ligne droite entre la vie personnelle de la chikha – pour laquelle elle est entièrement libre comme tout autre être humain- et sa vie d’artiste qui attire de nombreux admirateurs. Nuance alors. La chikha, est le féminin de chikh qui signifie le maître ou le connaisseur. Un qualificatif honorifique qui appelle au respect de celui qui en est affublé.
Nous acceptons -sans aucune réserve- ce terme quand il s’agit de la visite au Maroc d’une dame de la haute société, issue des pays du golf. La chikha est acceptée telle quelle, a fortiori lorsqu’elle intervient sur les différents médias marocains. Le vétéran de la chanson amazigh et celui qui en a posé les premiers jalons, feu Hamou Lyazid, était le premier à encourager les artistes males- à la fin des années cinquante- à embrasser le métier de tambourinaire et à l’arracher des mains des femmes qui l’ont exercé bien longtemps avant les hommes.
Dans le passé, les jeunes femmes qui voulaient intégrer le domaine artistique devaient être en possession d’un «Alloune» et savoir l’utiliser. Actuellement les hommes sont devenus les maîtres de ce métier dans toutes les troupes artistiques amazigh du chant instrumentalisé. Leur nombre ne cesse de croître ; ce qui explique ce phénomène c’est la quasi disparition de «l’Alloune» classique, autrement dit : «Alloune Abeldi» confectionné à base de peau de chèvre et communément appelé– aslikh/ahitour n lâanzi ou taghat –que nos ancêtres on manipulé pendant des siècles pour se distraire, lors d’une fête ou une cérémonie quelconque, avant l’apparition des nouveaux «Alloune» synthétiques réglables qui n’ont pas besoin d’être chauffés à chaque instant comme c’était le cas pour «Alloune Amazigh » qui cassait le rythme et perturbait la soirée quand «Aghjdime ou taghjdimte» était à son apogée. Temps mort alors. La création et l’introduction du nouveau Bendir, dans notre art et patrimoine amazigh, était une nécessité dictée par :
1- L’évolution des battements sur cet instrument évolué a donné naissance à une nouvelle caractérisation des nouveaux battements : wahda/ dggan / basse et tsrbia, alors que jadis il n y avait que le battement classique que les vrais «Mouaznia» (terme arabe pour désigner «Bouwalloune» au pluriel; Bnadri, chevronné qui pouvait garder le même rythme «Mizane» durant le temps consacré à la prestation.).
2- L’introduction de notre art à la télévision, dans les studios d’enregistrement, dans les maisons et sociétés de productions artistiques et dans les théâtres, lieux ou le feu est interdit pour chauffer les vieux bendir qui avaient une autonomie de chauffage minime.
3- L’utilisation du nouveau matériel de sonorisation qui permet à l’artiste principal de contrôler tous les son émis par les différents instruments musicaux employés par la troupe ainsi que les voix d’accompagnement du ou des chanteurs…
L’histoire du patrimoine amazigh n’oubliera jamais nos tambourinaires qu’ils soient:
– Femmes comme, par exemple, Rkia Aâbou- Tafloust – Tawr’hout- lâazafa- Zahra Âaddi – Hnia Bounou. (Photo ci-dessous de droite à gauche les deux tambourinaires: Yamna Kourou et Fatima Titich)…cette liste peut être exhaustive. Quant aux hommes tambourinaires, on peut citer entre autres Ali Oudda- Mouloud Hmouchi et Zayd Ou Hdidou. D’autres noms ne doivent pas être oubliés à l’instar de : Hmad n’Mina – Jâab – Lkhsim- Kdour Bouyaoui- Bennaceur Ou Khouya- Lahcen Azayi- Mohamed 40- Bouzkri Amzil- Bouykifi et bien d’autres.
Hamzaoui Abdelmalek
(chercheur)