Où va notre pays ?

Rétrospective de la vie politique nationale

Saoudi El Amalki

Durant les années 90, notre pays allait vivre une période décisive, au cours de laquelle la Monarchie et le Mouvement national se sont substantiellement rapprochés. La volonté de l’Une et de l’Autre aura donné naissance à une nouvelle ère, ponctuée par l’instauration de l’Alternance consensuelle dont la Gauche marocaine trônait pour la première fois, au cœur de l’Exécutif. Incontestablement, c’était un tournant nodal du parcours de la Nation, avec le déferlement d’une génération de réformes beaucoup plus à caractère Politique et Constitutionnel. Cependant, au terme de cette mandature exceptionnelle, cet entrain était avorté par ce que l’on avaitappelé à l’époque, le « putsch sur la méthodologie démocratique », afin de freiner cet élan réformiste qui émaillait en particulier et de manière avant-gardiste, la vie politique nationale. Un technocrate émanant du monde des affaires, allait donc succéder à cette marche pour insuffler aux structures du pays, des impulsions plutôt d’ordre Financier et Commercial, sans toutefois se soucier des valeurs qui en assurent la pérennité et surtout la justesse. Le retour à la « normale » par la réapparition de l’ossature politique nationale, était sanctionné par l’émergence de deux faits marquants qui allaient tarauder la scène partisane du pays. Tout d’abord, l’entrée en lice d’un « nouveau venu » en 2008, qui submergeait l’hémicycle, quoiqu’il n’ait jamais pris part aux élections, fraîchement déroulées et engloutissait tout le paysage public par le Pouvoir pécuniaire et la Terreur influente. Ensuite, le « spectre islamiste » se profilait à grands pas à l’horizon, non pas exclusivement chez nous, mais aussi dans nombre de pays dont les régimes furent descendus à coup de Révolutions fulgurantes. Notre pays en est sorti fort heureusement, sans trop de dégâts, grâce à la dynamique réformiste qu’il s’était déjà assignée, fondée sur la mise en avant des grands chantiers et surtout par le discours Royal du 9 mars 2011 et la proclamation de la nouvelle Constitution renfermant, faut-il bien le rappeler, une constellation de hauts faits. Ce « printemps démocratique », caractérisé par une réelle razzia sur quasiment l’ensemble du « monde arabe » allait également contaminer notre pays, à travers la prolifération inéluctable du parti à référence« religieuse » pour deux mandats de suite, pour la première fois dans les annales du règne national. Il convient d’avouer que cette entité prééminente face à laquelle l’Etat aura à coup sûr, anticipé la « préfabrication du nouveau venu », vers la fin des années 2000, s’est montrée trop inexpérimentée, soumise voire démagogique pour vaquer aux affaires publiques du pays, en dépit de la pléthorique audience dont elle jouit, fortement acquise par le discours théologique. Après l’échec des échéances électorales en 2015, la profusion colossale de l’argent sale aura fini par faire mouche pour hériter du haut de la pyramide aux dépens des prédécesseurs, farouchement abattus par l’autorité du fric, mais aussi, il faut bien le reconnaître, par leur prise aux tenailles de toutes parts en plus de leur propre déficience. « L’omnipotence libérale » s’installe en force dans les rouages du pouvoir, sans légitimité historique ni essence populaire, puisqu’elle s’impose aux urnes par le Tsunami mercantile, profitant de l’ignorance et de la misère de l’électorat, mais aussi du laxisme patent et de l’appui criard de l’Autorité. Exactement comme l’auraient fait les hôtes sortants, par l’émission du message religieux sur l’esprit profane des populations, noyé dans la platitude criante. En fait, tous les moyens sont bons pour mettre fin à la suprématie du parti islamique, semble prôner le Régime étatique ! Aujourd’hui, le Pouvoir dévastateur du pognon dénature le champ politique national, en rapport avec les masses sociétales dont le concept politique serait désormais synonyme d’achats de voix et non de débats autour des questions de la vie des citoyens. D’autant plus que les nouveaux résidents aux multiples centres de décisions aussi bien au niveau des instances représentatives ( conseils des régions, des préfectures, des provinces, des communes …) qu’à celui de l’engrenage de l’Administration, continuent à renforcer toutes ces institutions par les fonds des deniers publics dans le but de pérenniser leur existence. Dans le même ordre d’idées, le gouvernement s’empêtre dans la « vivification » désuète de l’économie, par des rafistolages éphémères, sans s’atteler à la mise en œuvre de stratégies profondes de développement à long terme, dans une démarche volontariste. Au rythme où les choses s’opèrent, on risque de s’enliser dans des gouffres périlleux, surtout que l’avenir demeure à coursde vision et de visibilité en perspective, sans que l’Exécutif, amorphe et démissionnaire, ne pipe mot quant à son attention de remédier aux déficits néfastes qui rongent la société aux différents plans de la prospérité, de la stabilité et de la sécurité. A cet égard, on constate non sans désolations, la démission de la quasi-totalité des forces de médiation (syndicats, médias, société civile…) face à ce fait alarmant, puisqu’apparemment les voix révoltées sont « soudoyées » pour se taire, alors que la Nation traverse une phase cruciale de son chemin vers le parachèvement de son intégrité territoriale, le relèvement du défi de la croissance plurielle et la fortification du front intérieur, tel qu’évoqué par les divers discours du Souverain. Le comble dans cetteaffaire, c’est que le mythe islamique qu’on croyait avoir anéanti par l’argent, pourrait toujours réapparaître encore plus fort, tant le conservatisme s’imprègne dans la société. Ce n’est guère avec de l’argent que les « libéraux hybrides » auront vaincu les islamistes, mais bel et bien, avec une approche durable de la mise sur pieds d’une politique qui puisse combler les attentes et les doléances du peuple.

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