Quand la spéculation étouffe les lois

Planification urbaine à Casablanca

La ville de Casablanca s’est dotée, en raison de la crise urbaine qu’elle a vécue en 1981, d’une nouvelle organisation administrative et d’un support de planification urbaine, en l’occurrence le Schéma Directeur d’Aménageant Urbain (SDAU), ainsi que la création d’une instance de coordination et de planification urbaine, à savoir «l’Agence urbaine de Casablanca», en vertu des dispositions du Dahir portant loi n°1-84-188 du 9 octobre 1984 (13 moharrem 1405) relatif à l’Agence urbaine de Casablanca. B.O. n° 3762 du 5 Décembre 1984. D’une durée de validité de 20 ans, le SDAU est imposable à l’Etat, aux collectivités locales, les établissements publics et les personnes morales de droit privé dont le capital est souscrit entièrement par les personnes publiques précitées.

SDAU 1985-2009 : 89% des projets non réalisés

Le SDAU de 1985 devait assurer les conditions d’une meilleure maîtrise de la ville à travers un maillage du tissu urbain par des centres administratifs et des équipements et par une première ligne de transport urbain de masse, et affirmer le pouvoir de l’Etat par des projets phares.  Ce CDAU est arrivé à échéance en 2004, mais environ 89% des projets prévus par cette planification n’ont pas été réalisés. En plus de constat, il fallait attendre environ cinq ans pour voir la ville se doter d’un nouveau schéma. Durant toute cette période, la métropole, sous la pression de la spéculation foncière et immobilière, a été régie par les formules des dérogations auxquelles le retard du nouveau SDAU et l’expiration de l’ancien ont grandement ouvert la porte.

SDAU 2010

Le nouveau SDAU, approuvé par décret n° 2.09.669 du 14 Moharrem 1411 (31 Décembre 2009) et publié dans le bulletin officiel sous le n°5806 du 21 janvier 2010, qui est un document de planification urbaine de nouvelle génération, doit assurer le hissage du Grand Casablanca au rang d’une grande métropole mondiale, harmonieuse et «durable ». Ce projet du Schéma Directeur d’Aménagement Urbain a été validé par la Comité Stratégique de Pilotage, après la consultation des conseils compétents et la prise en compte de leurs remarques et suggestions. C’est dire que le document n’a été validé qu’après tout un processus de débats, de consultations, de concertation et de réglementation. C’est un challenge très différent de ceux des schémas passés. Mais, au bout de quatre ans, les documents ont été revus et plusieurs interrogations ont été soulevées quant à la pertinence de la vision mise en place.

Révision de 2014

En raison de l’expansion de la ville et de la pression démographique, il a été procédé à la révision partielle du SDAU de 2010. Ce projet a été approuvé par Décret n° 2-14-657 du 05 Novembre 2014 publié au Bulletin Officiel n° 6307 du 10 Novembre 2014. Le document d’urbanisme et de planification urbanistique subira d’autres modifications «informelles» et «spéculatives». La ville continuera à se développer d’une façon anarchique uniquement régie par des opportunités foncières.

Spéculation et opportunités foncières

De ce fait, on obtient un développement urbain qui est une juxtaposition de lotissements sans aucune âme. Dans la province de Nouaceur, le secteur est complètement régi par les opportunités foncières. Des villas se construisent anarchiquement sur de grandes superficies et des immeubles poussent dans leur proximité formant un spectacle désolant. Dans la préfecture de Ain Sbaâ Hay Mohammedi, le constat est le même surtout dans l’ancienne zone industrielle qui s’est transformée en zone d’habitat régie par des lois de l’opportunité.

C’est un fait. Des spéculateurs immobiliers ont réussi à faire main basse sur la ville de Casablanca, depuis belle lurette. Et ils ont toujours été à la taille de cette grande métropole mouvementée.   Depuis l’ère de l’urbaniste Ecochard, (1945-1953), jusqu’au début du vingt-et-unième siècle, aucun schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme (SDAU) n’a été respecté. Ecochard avait proposé un plan d’aménagement qui tenait compte de la croissance désordonnée de la ville. Ce plan prévoyait l’extension de la ville sur l’axe Casablanca-Mohammedia pour former un ensemble urbain, relié par un tissu industriel. Cette vision avait aussi pour but de préserver les terres agricoles à l’est de la ville. Mais, finalement, c’est pratiquement le contraire qui s’est produit. La brique a bouffé les terres agricoles, asphyxiant les poumons verts de la ville.

Aujourd’hui, les autorités compétentes sont appelées à mettre le doit où ça fait mal pour baliser la voie au développement urbanistique de la métropole.

B.A

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