Taïwan-Chine
Les tensions militaires entre la Chine et Taïwan sont à leur plus haut niveau depuis quatre décennies, a averti mercredi le ministre de la défense de l’île, affirmant que Pékin serait en mesure de lancer une invasion à grande échelle en 2025.
Le ministre taïwanais de la Défense, Chiu Kuo-cheng, réagissait après l’incursion record de 150 avions de guerre chinois depuis vendredi, dont des bombardiers H-6 à capacité nucléaire, dans la zone de défense aérienne de Taipei.
« Pour l’armée, la situation actuelle est la plus sombre depuis plus de 40 ans (..) », a déclaré Chiu Kuo-cheng au Parlement.
Il a prévenu que même une « légère imprudence » ou une « erreur de calcul » pourrait déclencher « une crise » dans le détroit de Taïwan, ajoutant que Pékin serait en mesure de lancer une attaque de grande envergure en 2025.
La Chine « en est capable maintenant, mais elle doit calculer le coût qu’elle devra payer et le type de résultat qu’elle souhaite obtenir. Après 2025, le coût et les pertes seront réduits au minimum », a déclaré M. Chiu, sans donner plus de détails.
Les incursions chinoises ont également suscité des critiques de la part de Washington.
Interrogé sur la situation, le président Joe Biden a déclaré mardi à la presse avoir discuté de Taïwan avec son homologue chinois Xi Jinping le mois dernier.
« Nous respecterons l’accord sur Taïwan. C’est là où nous en sommes et nous avons dit clairement que je ne pense pas qu’il devrait faire autre chose que de respecter l’accord », a-t-il déclaré, faisant visiblement référence à la politique américaine en vigueur depuis le transfert américain de la reconnaissance diplomatique de Taipei à Pékin en 1979.
En vertu de cet arrangement, les États-Unis fournissent à Taïwan du matériel militaire pour se défendre, dans le cadre d’une relation non officielle et non diplomatique.
Un porte-parole de la présidente Tsai Ing-wen a déclaré que Taïwan avait contacté Washington suite aux remarques de M. Biden et avait reçu l’assurance que la politique américaine à l’égard de l’île « restait inchangée ».
Le président chinois Xi Jinping, qui a qualifié la prise de contrôle de Taïwan d' »inévitable », a également jugé « sombres » les relations entre la Chine et Taïwan dans une lettre adressée au principal chef de l’opposition nouvellement élu à Taïwan la semaine dernière.
Pékin a accentué sa pression militaire, diplomatique et économique sur Taïwan depuis l’élection en 2016 de Mme Tsai, qui rejette le « principe d’une seule Chine ».
« Les actions menées par (la Chine) ont sérieusement endommagé la paix et la stabilité dans la région », a déclaré Tsai Ing-wen mercredi.
« Je veux dire à l’autorité de Pékin qu’elle doit faire preuve de retenue pour éviter les conflits potentiels dus à des erreurs de calcul ou à des accidents », a-t-elle ajouté.
La présidente avait mis en garde mardi dans une tribune contre des « conséquences catastrophiques » si l’île tombait aux mains de la Chine.
L’île souhaite une coexistence pacifique avec la Chine, a-t-elle souligné, mais « si sa démocratie et son mode de vie sont menacés, Taïwan fera tout ce qu’il faut pour se défendre ».
Son gouvernement a exhorté Pékin à cesser « immédiatement (ses) actions provocatrices non-pacifiques et irresponsables », après l’incursion record lundi de 56 avions de l’armée chinoise dans la zone d’identification de défense aérienne (ADIZ) de Taïwan.
Une zone d’identification de défense aérienne est un espace aérien dans lequel un Etat souhaite identifier et localiser les aéronefs pour des raisons de sécurité nationale.
L’ADIZ de Taïwan ne correspond pas à son espace aérien territorial, mais englobe une zone beaucoup plus vaste qui recoupe une partie de la zone d’identification de la défense aérienne de la Chine et inclut même une partie du continent.
En 2020, 380 avions des forces aériennes chinoises ont été détectés dans la zone d’identification de défense aérienne de Taïwan et, depuis le début de cette année, ils sont passés à plus de 600.