Entretien avec le réalisateur, Al Hadi Ulad Mohand
Propos recueillis par Mohamed Nait Youssef
Al Hadi Ulad Mohand signe un beau film tourné à la ville d’Assilah. «La vie me va bien», présenté dans le cadre de la compétition officielle du long-métrage de la 22ème édition du FNF de Tanger, relate l’histoire d’une famille pauvre et simple qui mène une vie ordinaire, mais ouverte d’esprit. Les images sont belles, poétiques et les personnages ont incarné leurs rôles correctement, tout en montrant un visage lumineux de la ville et ses potentiels à la fois naturels, architecturaux et civilisationnels. Nous sommes au milieu des années 90. Fouad (Samir Guesmi), père d’une famille et salarié du bureau de la Poste. Après 20 ans de service, une maladie neurologique l’oblige à quitter son poste. Sa famille est confrontée à nouvelle réalité dure, mais animée par l’amour, l’entraide et le partage. «Ce n’était pas facile d’écrire ce film, mais il faillait le faire parce que j’avais envie de partager cette histoire d’amour, ce côté d’humanité, cette famille extraordinaire et pauvre qui ne dégage pas la pauvreté.», nous confie le réalisateur. Rencontre.
Al Bayane : Dans votre film on découvert/ redécouvert la ville d’Assilah filmée d’une manière poétique et joliment mise en valeur. Est-il un hommage à cette ville côtière où une manière pour rafraîchir la mémoire en revisitant vos souvenirs ?
Al Hadi Ulad Mohand : Je suis né à Assilah. Et comme, c’est un peu l’histoire personnelle c’était presque pour moi une décision automatique parce que la ville est super belle. Par rapport à l’histoire, les couleurs d’Assilah vont équilibrer et aider le film à savoir ; ses couleurs bleues, ses magnifiques lumières…
Il y a certes la beauté de l’image et surtout sa poésie, mais la musique était aussi présente dans le film. Elle était, à vrai dire, une composante importante dans l’histoire. Parler nous un peu de ce choix ?
On a fait la musique avec le compositeur suisse Niki Reiser qui a fait beaucoup de films. Malheureusement, j’ai pas pu le rencontrer parce qu’il y avait la Covid-19. On a tout fait en ligne. Il a adoré le film ! Puis, je lui ai dit que je voulais une musique marocaine, mais en même temps un mélange. On est parti sur Robert Plant, ses derniers albums de Raise the Roof. Il a travaillé de chez lui, puis il m’a envoyé la musique. Il a fait un travail magnifique !
Le film raconte l’histoire d’une famille qui mène une vie et simple et ordinaire, mais les images, les décors et le rythme du film laissent filer le temps.
Cette famille est ordinaire, mais, pour moi, elle est extraordinaire parce que c’est une famille pauvre, mais riche en même temps. Le papa est ouvert d’esprit, la maman aussi. C’est un père qui s’est marié avec une femme qui a déjà un enfant de quelqu’un d’autre. C’est dans les années 90… c’est quelque chose d’extraordinaire parce que cet homme a sauvé cette femme. Puis, ils ont construit une famille. Elle est pauvre, mais c’est ça leur richesse.
C’est une famille qui est dans un milieu conservateur, mais elle est ouverte d’esprit : elle aimait la musique, la danse, l’art. Bref, une famille qui sort un peu du lot, si n’osons dire. Qu’il en était le message ? Est-il une quête peut être d’un universalisme ?
C’est l’histoire de mon père qui a eu cette maladie. J’ai eu la chance d’avoir un père avec un tel esprit ouvert. Ce n’est pas vraiment pour faire de ça quelque d’universel, mais mon père était ainsi. J’avais des posters chez moi. À chaque fois que j’ai un peu d’argent, je faisais des l allers-retours à Tanger pour acheter des casettes parce que j’habitais à Assilah. Il fallait prendre le taxi. Franchement, je raconte un peu ce que j’ai vécu.
Les décors ont été aussi des éléments importants dans votre. Sont-ils naturels ? Parler nous un peu de ce travail sur la lumière ?
Les décors sont des décors naturels. C’est Assilah! Après, on a eu de la chance parce qu’il y avait une bonne lumière comme partout au Maroc. On a choisi de découper le film comme ça, surtout de donner de la poésie à ces images-là. Par ailleurs, le chef opérateur, je l’ai connu sur un autre tournage où je travaillais sur un film documentaire. Alors, lui, il a fait les images de ce documentaire à Assilah. Il connaissait bien la lumière, il connaissait bien où on allait tourner. Du coup, on était prêt pour faire les images aussi. Je l’ai pris parce qu’il savait jouer avec la lumière là-bas.
Le film a rendu un grand hommage à la femme. En fait, l’actrice Lubna Azabal a bien incarné le rôle de la mère. Parler nous un peu de la direction des artistes et surtout du casting ?
Tous les acteurs qui ont joué dans ce film étaient supers. J’ai adoré le jeu de Loubna, Samir Guesmi et les autres acteurs. La preuve : Loubna Azabal a gagné le prix de la meilleure actrice du festival de Rotterdam. En effet, je ne voyais pas quelqu’un d’autre à sa place pour ce rôle même si j’ai vu d’autres comédiennes.
Il y avait une grande partie de vous dans ce film que vous avez tourné dans votre ville, Assilah. Derrière la caméra, qu’il en était votre ressenti en filmant vos souvenirs dans les différents lieux ?
Ce n’était pas facile d’écrire ce film. Mais, il faillait le faire parce que j’avais envie de partager cette histoire d’amour, ce côté d’humanité, cette famille extraordinaire et pauvre qui ne dégage pas la pauvreté. Ce n’est pas la misère.
Alors, j’ai dit pourquoi ne pas raconter cette histoire, pourquoi ne pas montrer cette famille marocaine extraordinaire. Vous avez même dit que c’est un hommage à la femme. Bien sûr ! J’ai donné une chance à la femme aussi. J’ai voulu partagé cette belle histoire avec le monde.