«Le point de bascule», un vingtième essai de Abdelhak Najib

Parution

Par Imane Kendili, Psychiatre

Abdelhak Najib, vient de boucler son vingtième essai, avec un ouvrage ancré dans l’actualité du monde, publié aux Éditions Orion. «Le point de bascule» est une réflexion sur l’évolution d’un monde en manque de repères, un monde en perdition, qui chemine doucement mais sûrement vers sa chute.

Le titre à lui tout seul nous informe sur ce qui suit dans cet essai au hachoir sur l’actualité du monde aujourd’hui, entre guerres, crises à répétitions, clivages, polarisations, récessions de tous genres et beaucoup d’incertitude pour le futur de cette humanité livrée à elle-même, dans un univers de plus en plus hostile et barbare. «Le point de bascule », cet instant précis où l’on touche à la fin d’un cycle et l’on chute dans une descente à tombeaux ouverts dans l’inconnu. D’ailleurs, d’emblée, Abdelhak Najib, nous annonce son propos, sans détours : «Nous savons tous que la chute de cette dite civilisation est proche, mais on y va tête baissée. On y va parce qu’on n’a plus le choix. Croire le contraire est la pire des erreurs à faire, aujourd’hui. La marche vers le désastre est inévitable. Voici le constat à froid sur un monde finissant. Car prendre des mesures draconiennes pour sauver les meubles peut engendrer le chaos, aujourd’hui. Logiquement, pour toutes les grandes puissances économiques et financières, il est préférable d’ajourner la catastrophe. 10 ans. 20 ans. 30 ans. Avec l’espoir illusoire qu’un miracle peut se produire. Nous en sommes arrivés à ce stade. Attendre un miracle. C’est l’unique porte de sortie pour cette civilisation. Évidemment, aucun miracle ne pointe à l’horizon».

Chacun pour soi

Pour l’auteur de «La vérité est une zone grise», ce n’est pas là un scénario inédit. Loin de là. Nous l’avons vécu avec la catastrophe naturelle Katrina. 20 % des forces de l’ordre ont quitté leur poste préférant sauver leur peau que de servir un État dépassé par les eaux. C’est chacun pour soi dans des organisations rudimentaires autour d’un point d’eau pour l’approvisionnement, pour une agriculture élémentaire, avec un retour à l’élevage : des poules, des brebis, des moutons et des porcs. Pour Abdelhak Najib, «C’est désormais l’économie du strict nécessaire pour de petits groupes, qui finissent par se lasser de se livrer des guerres avec la fin des munitions. Des régions entières vont compter les morts et les réfugiés par millions (à l’horizon 2050, les rapports parlent de 300 millions à 1 milliard de réfugiés climatiques poussés par la famine et le manque d’eau). 

En attendant la fin

Abdelhak Najib va plus loin et nous montre par des données qui ne souffrent aucune ombre que tout le reste n’est plus d’aucune utilité. Le schéma est le même au Japon, en Chine, dans les pays du Golfe, dans les plus grandes villes en Europe où le citoyen albanais s’en tire mieux que le Londonien. Selon l’auteur de «La voix de la Terre», le fermier de la Moldavie a plus de chance de survivre sans souffrir que l’éleveur allemand qui a troqué son savoir-faire ancestral pour des machines High-Tech dont il dépend à 100%.  Pour tous ces pays où la consommation d’énergie a été l’unique garant de la croissance, la fin de l’électricité, le manque de ressources comme le pétrole et le gaz, le manque des moyens de transport et de logistique, à flux tendus, pour maintenir, à titre d’exemple, les centrales nucléaires en marche, les risques sont majeurs et irréversibles.  Abdelhak Najib ajoute qu’«Au-delà du chaos social, au-delà des conflits et des scènes de boucherie entre populations, il faut bien refroidir ces bases nucléaires pour éviter un autre Tchernobyl ou Fukushima.  Comment y arriver en l’absence d’eau, d’électricité et de moyens de transport ? Au chaos s’ajoute la menace d’un holocauste nucléaire inévitable.  Ce sont des centaines de Tchernobyl qui vont avoir lieu partout dans le monde où des centaines de centrales sont en marche, ce sont des désastres apocalyptiques décimant tout avec leurs nuages radioactifs. Qui vont couvrir toute la planète, déjà asphyxiée par les gaz à effet de serre». Pour l’auteur, il n’y a aucun doute, ce qui semble inévitable pour cette humanité, c’est la chute dans le chaos. Tout nous y mène : une planète exsangue, des économies essoufflées et en fin de course, une capacité de résilience presque nulle, des environnements hostiles, des sociétés au bord de l’implosion avec des inégalités sociales effarantes. Avec le retour de la guerre en Europe qui sonne le glas d’une pseudo paix fragile et installe la planète dans une des crises les plus dévastatrices de son histoire, comme le conclut l’auteur de « Psychanalyse de l’improbable ».

Le point de bascule. Abdelhak Najib. Philosophie. 240 pages. Décembre 2022. Disponible en librairie.

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