VIIII : Les magouilles du cheikh Al Amoudi et la responsabilité des banques

Samir : comment le Maroc en est arrivé là ?

Dans cette série d’articles, nous allons essayer, dans la mesure du possible, de tracer l’histoire d’un joyau industriel national qui a tant contribué au développement économique du pays, en l’occurrence la SAMIR.  Il faut dire que notre véritable souci n’est pas de distribuer des accusations gratuites, loin s’en faut, mais consiste à dévoiler les véritables causes qui ont été à l’origine d’une déconfiture historique. Notre analyse s’étendra également à lever le voile sur la fermeture de l’entreprise et son impact sur le marché des hydrocarbures, entre autres…

Il faut dire que la gestion chaotique était l’une des causes qui ont mené l’entreprise droit au mur.  Outre la politique du laisser-faire, le fait que la Samir ne disposait pas d’une salle des marchés pour faire des prévisions, relève de l’illogique, ont fait constaté plusieurs analystes. En fait, l’absence réelle d’un comité stratégique, opérationnel et financier relève d’une vision réduite et d’un manque de perspicacité managériale. Pour l’économiste Najib Akesbi, « la convention signée en 2004 va ouvrir toutes grandes les voies à tous les abus, alors que de toute évidence, l’État comme les banques ont fait  preuve de complaisance, si ce n’est de complicité coupable. »

Dans ce sens, le Front national pour la sauvegarde de la raffinerie marocaine de pétrole (FNSRMP) met l’accent sur les manquements des commissaires aux comptes de KPMG & Price Waterhouse Coopers dont les rapports ont restés timides sur certains points sombres en matière de la gestion de la société, notamment « les manipulations comptables ». D’ailleurs, ce n’est qu’en 2013 que quelques réserves ont été  ont été émises sur la gestion financière de l’entreprise.

Le  FNSRMP cite, en outre, les magouillages du Cheikh Al Amoudi.  Pour rappel, au début, l’opération de l’achat des actifs de l’entreprise a été faite par  Corral Morocco Gaz & Oil. Mais ce qui est grave c’est que cette structure a été transférée en février 2006 à une autre structure dénommée Moroncha Holdings dont le siège se situe à Chypre et qui dépend directement de Cheikh Al Amoudi, et a été qualifiée de « coquille vide », par FNSRMP.

Ce reclassement de participation suscite d’ailleurs plusieurs interrogations sur les véritables visées du propriétaire. Les analystes se posent la question sur l’inaction des  représentants des départements de tutelle et les responsables des banques qui ont financé le programme d’investissement et  sans pour exiger un  nantissement des titres.

Dans un entretien accordé au quotidien Al Bayane, Abdelouhed Souhail, conseiller économique et membre du Bureau politique du PPS a fait le constat suivant : « quand on analyse la situation, sur la base de ce que la SAMIR a publié au niveau de ses bilans et de ce qui a été publié par la presse et déclaré par des responsables de certaines banques, on se rend compte que, quelque part, il y’a eu constamment un refus des actionnaires de la Samir de capitaliser leur entreprise et de mettre l’argent nécessaire au développement de la raffinerie. »

Il va sans dire, précise l’ancien ministre de l’emploi,  « que tous les acteurs concernés ont failli à leurs responsabilités quant à la crise de la Samir, notamment le secteur banquier et l’administration des douanes qui ont octroyé un crédit d’enlèvement aux anciens décideurs de la raffinerie sans aucune garantie. « Il s’agit d’une situation incompréhensible», a-t-il ajouté. 

Khalid Darfaf

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