Les étudiants en médecine ne lâchent rien

En grève contre la réduction des années de formation et du surpeuplement des amphis

Karim Ben Amar

La grogne des étudiants en médecine est toujours d’actualité. D’ailleurs, de nombreux observateurs laissent planer le spectre de l’année blanche. La grève qui a débuté en septembre, coïncidant ainsi avec le début de l’année universitaire, s’est  transformée en grève ouverte depuis le 12 décembre 2023, puis en grève nationale. Les revendications des étudiants grévistes ont été catégoriquement rejetées par le gouvernement qui fait la sourde oreille.

Les sit-in des étudiants en médecine se suivent et se ressemblent. Le dernier en date s’est tenu le jeudi 1er mars à la Faculté de médecine et de pharmacie de Casablanca dans le cadre de leur grève nationale qui dure depuis près de 2 mois. Les futurs médecins ont une nouvelle fois dénoncé la réduction de la durée de leur formation qui est passée de  7 à 6 ans. Ils maintiennent également le boycott des examens semestriels et des stages et alertent leurs ministères de tutelle (Santé et Enseignement Supérieur) quant à une éventuelle année blanche si la situation n’évolue pas.

Plus d’un millier d’étudiants en médecine se sont mobilisés en prenant part au sit-in organisé le jeudi 1er mars dans le grand hall de la Faculté de médecine et de pharmacie de Casablanca.

Sans grande surprise, La principale revendication est le retour de la durée de la formation à 7 ans, contre 6 actuellement, une décision actée en 2022 par le ministère de l’Enseignement supérieur pour combler le manque de praticiens au Maroc. Cette revendication découle de l’absence de mesures d’accompagnement nécessaires au déploiement de cette réforme et du manque de visibilité sur la sixième année de formation.

Auteur de cette réforme, le ministre de l’Enseignement supérieur, Abdelatif Miraoui, n’avait pas réagi à ce mouvement de protestation depuis son déclenchement. Ce n’est que le 29 janvier dernier, qu’il a, lors d’une séance de questions orales à la Chambre des représentants, déclaré que la réduction des années de formation n’aura aucun impact sur la qualité de la formation et la compétence des futurs médecins. Dans son intervention, il a ajouté que le cursus de six ans ne s’applique pas uniquement au Maroc puisqu’il est aussi adopté en Espagne, en Allemagne et en Italie. Le ministre a également cité l’exemple des États-Unis, où la formation en médecine se fait en quatre ans.

Réagissant à ces propos, les étudiants grévistes ont rétorqué  qu’en Espagne, la formation de base dure six ans et ne permet pas de pratiquer. « L’étudiant doit effectuer quatre années d’études supplémentaires pour se spécialiser en médecine générale. On retrouve aussi un autre modèle aux États-Unis avec quatre ans d’études pré-médicales, quatre ans d’études médicales et un an d’internat pour se spécialiser en médecine de famille ou en médecine générale », a souligné Narjiss El Hilali, étudiante en 5ème année de médecine et représentante du Conseil des étudiants en médecine de Casablanca à la Commission nationale des étudiants en médecine, médecine dentaire et pharmacie, dans une déclaration à la presse.

En plus de la réduction de la durée de la formation, les étudiants en médecine dénoncent l’augmentation significative de leur nombre au cours des deux dernières années. Ce qui a entraîné un surpeuplement des amphithéâtres et la dégradation du niveau d’encadrement des futurs médecins lors des stages dans les CHU. Ils condamnent également le retard dans la publication du cahier des charges pédagogique pour le troisième cycle, après la signature d’un accord en 2019 avec le ministère de l’Enseignement supérieur qui prévoyait leur intégration dans la conception et la mise en œuvre de ce projet.

Jacques Lacan disait que « le dialogue paraît en lui-même constituer une renonciation à l’agressivité. Le gouvernement doit donc  descendre de son piédestal et engager un dialogue sincère avec les étudiants mécontents. Calmer la grogne, c’est aussi cela, le rôle d’un gouvernement. 

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