L’équilibre du régime de la Caisse Marocaine des Retraites (CMR) est menacé et suscite des inquiétudes à plusieurs niveaux. Dans moins de cinq ans, si les dysfonctionnements actuels ne sont pas corrigés, l’équilibre de la caisse sera inéluctablement rompu. C’est le nouveau rapport de la Cour des Comptes qui le dit. Les cotisations versées par les actifs ne couvrent plus les pensions servies aux séniors. Aujourd’hui, la réforme paramétrique s’avère insuffisante. Une nouvelle approche profonde et précise urge pour remettre le régime des pensions civiles sur les rails de l’équilibre et consolider ainsi ses fondamentaux.
Le rapport de la Cour des Comptes porte sur trois grands axes à savoir le diagnostic, la portée des réformes, l’investissement requis et gestion des réserves et enfin, la gouvernance et frais de gestion.
Il n’en demeure pas moins évident que l’un des points saillants de la situation actuelle de la CMR renvoie à la fragilité financière du régime. Le déficit technique est passé de 936 M DH en 2014 à 2,68 MM DH une année plus tard et à 4,76 MM DH en 2016.
Aussi, la générosité du régime est pointée du doigt par les juges de Driss Jettou. Pour toute année de cotisation, il offrait une annuité de 2,5% du dernier salaire servi. Ce taux a été amené à 2% en 2016, grâce à la réforme initiée par le gouvernement précédent.
La liquidation des pensions sur la base du dernier salaire est jugée inappropriée. Partout dans le monde, le calcul des pensions se fait sur la base du salaire moyen ayant servi de base de calcul des cotisations au cours d’une période suffisamment longue.
Dans le cas de la CMR avant la réforme de 2016, la pension était calculée sur la base du dernier salaire d’activité avec en bonus une quasi-généralisation des promotions et avancements de grade à l’approche de l’âge de la retraite, ce qui n’a pas manqué d’aggraver davantage les déséquilibre de la CMR, constate le rapport de la Cour. La réforme initiée sous le gouvernement Abdelilah Benkirane en 2016 prévoit que la liquidation devrait se faire désormais sur la base du salaire moyen des huit dernières années.
Cependant, la situation demeure d’autant plus critique puisque le nombre de retraités augmente plus vite que celui des affiliés. Le rapport démographique est passé de 12 actifs pour un retraité en 1986, à 6 en 2000 et à 2,23 en 2016. Il devrait atteindre 1,74 en 2024.
Ce n’est pas tout, les allocations familiales payées par le régime et les cotisations spécifiques représentent 1,5% du total des pensions servies. Aussi, les départs anticipés à la retraite à un âge précoce ne permettent pas d’assurer la neutralité du régime. Pour conclure, la Cour des Comptes estime que la réforme paramétrique est importante et permettrait d’assurer la viabilité du régime des pensions civiles mais elle reste insuffisante compte tenu des importants dysfonctionnements structurels qui caractérisent le régime des pensions civiles. Seule une réforme en profondeur pourrait garantir la pérennité du système à long terme.
Fairouz El Mouden