Quelles sont les facteurs déterminants favorisant le déclenchement du phénomène de la violence dans l’espace estudiantine? Comment les décideurs des politiques publiques doivent réagir aux actes de violences dans les universités et les écoles publiques?
Voilà entre autres quelques questions auxquelles se sont attelés les intervenants lors de la journée d’étude, placée sous le thème «Violences et précarités : processus et enjeux des réalités plurielles», organisée, jeudi dernier, à la Faculté des lettres et des sciences humaines Ain Chock à Casablanca.
Il faut dire, selon les intervenants, les actes récurrents de violence dans les campus requièrent une démarche compréhensive loin de tout jugement de valeur ou autre approche répressive voire sécuritaire. Comme quoi, les représentations que se font les jeunes de l’institution universitaire sont importantes pour l’élaboration d’une véritable réforme du système de l’enseignement supérieur. D’ailleurs, l’université, considérée auparavant comme un agent de socialisation ayant pour mission la production des élites, de la transmission de la connaissance et un moyen d’intégration sociale, est taxée aujourd’hui de tous les maux. En termes plus clairs, «l’université est devenue un moyen d’exclusion, voire de reproduction sociale», a indiqué Saloua Zerhouni, politologue et présidente de l’Institut des Sciences sociales de Rabat.
Sentiment de malaise
Faisant référence aux résultats d’une enquête réalisée dans les universités marocaines auprès des étudiants, Saloua Zerhouni a indiqué que la plupart des interviewés ont mis en avant les conditions socio-économiques dans lesquelles ils vivent. Outre leur non-implication dans le processus de développement, les jeunes affichent une forte demande pour un système éducatif de qualité, leur permettant une ascension sociale. Tout en contestant la «Hogra», les jeunes déplorent, en outre, l’état de l’infrastructure des campus qui laisse à désirer et le manque de moyens permettant leur épanouissement, a-t-elle fait savoir. En termes plus clairs, les jeunes rejettent catégoriquement ce que la conférencière a qualifié par «la violence verticale», exercée par les administrateurs et les enseignants qui adoptent une posture de domination, selon la perception des étudiants.
Sur un autre registre, Saloua Zerhouni s’est penchée sur autres facteurs explicatifs ou ce qu’elle a désigné par «la violence horizontale», qui est due aux convictions idéologiques l’origine sociale et la quasi-absence de de communication entre les jeunes.
De son côté, Zineb Zine El Abidine, chercheur au laboratoire de recherche sur les différenciations Sociales et les Identités sexuelles (LADSS) a dressé un état des lieux des espaces scolaires au Maroc. Tout en s’inscrivant dans une démarche bourdieusienne, elle a considéré que l’école publique s’est transformée en pourvoyeur de violence et un moyen de légitimation de l’ordre social. Abondant dans le même ordre d’idées, l’intervenante a jugé que les écoliers des établissements publics sont plus exposés à la violence de la part des enseignants que ceux du secteur privé. Encore pis! Le langage utilisé des élèves dans l’enseignent public est plus violent que celui qui utilisé en privé, a-t-elle affirmé.
Pour mettre fin à ces défaillances, les intervenants ont invités les décideurs à revoir la politique publique dédiée au système éducatif. Cela étant, une réforme en bonne et due forme doit prendre en considération les besoins spécifiques des étudiants tout en mettant en place des politiques publiques holistiques et transversales donnant la priorité à la gouvernance démocratique, ont souligné les intervenants.
Khalid Darfaf