C’est un des dossiers épineux de l’heure qu’est la querelle qui oppose les ingénieurs géomètres-topographes du secteur privé à leur Ordre, et dont les répercussions impactent le bon déroulement de plusieurs chantiers, dont ceux initiés par des institutions étatiques. A la source du conflit réside l’obligation de s’acquitter de la cotisation nécessaire pour adhérer à l’Ordre, dont le quitus est devenu une pièce maitresse des dossiers de projets et sans lequel le feu vert n’est plus délivré par les services de cadastre.
Les ingénieurs géomètres-topographes sont entrain de frapper sur toutes les portes. Leur syndicat multiplie les missives à destination du ministre de l’Agriculture et de la Pêche Maritime, en sa qualité de ministre de tutelle de l’Agence Nationale de Conservation Foncière (ANCFCC), mais également à destination du ministre de l’équipement, celui de la justice, celui de l’Aménagement du territoire et celui des Finances. L’objet en est de les notifier d’une plainte à destination du directeur de l’ANCFCC sur un obstacle qui les tourmente depuis des mois.
A l’Agence Nationale de Conservation Foncière, de Cadastre et de Cartographie, les services de cadastre vivent un état de «blocage». Des dossiers et des projets supervisés par des ingénieurs géomètres-topographes du secteur privé sont au point mort, et ce depuis l’émission d’une note de service par la direction des services de cadastre le 7 août dernier, stipulant le refus de réception et d’inscription des dossiers de projets conduits par la catégorie professionnelle précitée, au cas où ces derniers n’auraient pas présenté leur quitus envers l’Ordre National des Ingénieurs Géomètres-Topographes (ONIGT). Cette mesure a provoqué un arrêt dans plusieurs projets, dont certains initiés par des institutions étatiques, au même titre que des projets d’opérateurs privés.
A la source du problème, on retrouve un conflit qui oppose les ingénieurs géomètres-topographes du secteur privé à l’ONIGT. Il a commencé lorsque le Conseil national de l’ONIGT a décidé d’augmenter les frais de cotisation propre aux ingénieurs opérants dans le secteur privé, tout en exemptant ceux actifs dans le secteur public. Ces cotisations sont désormais de l’ordre de 2500 dhs, doublées de 0,5% du chiffre d’affaires pour la première catégorie. Ce sont là des frais assez élevés par rapport à ceux exigés des ingénieurs du secteur public, lesquels payent 400 dhs en guise de frais d’adhésion à l’Ordre. Au cas où l’ingénieur ne souhaite pas s’acquitter de ces sommes, il est sommé de payer un montant forfaitaire limité à 50.000 dhs en contrepartie de son quitus. Un quitus devenu, comme expliqué précédemment, une pièce obligatoire pour le dépôt des dossiers des ingénieurs géomètres-topographes auprès des services de cadastre.
Le Syndicat national des ingénieurs géomètres-topographes du secteur privé au Maroc a qualifié ces nouvelles mesures de «violation de la loi», considérant l’imposition de nouvelles cotisations, ainsi que le recours au pouvoir de l’administration pour les imposer aux ingénieurs, est un empiétement de leurs droits. Par contre, le directeur des services de cadastre Najib Benzouina, contacté par notre confrère Bayane Al Yaoum, a expliqué qu’il n’y a aucun refus qui touche les dossiers conformes aux dispositions légales, et a insisté sur le fait que le quitus est délivré par l’Ordre et non par ses services, et par conséquent il n’y a pas lieu de parler de refus d’un dossier en particulier.
Des sources internes du Syndicat expliquent que l’émission d’une note de service par le directeur des services de cadastre à l’ANCFCC, imposant la réception du quitus envers l’ONIGT, constitue une transgression de la loi dans la mesure où cette direction ne possède pas cette compétence. Cette note est considérée, selon eux, comme une action de contrainte envers les ingénieurs géomètres-topographes du secteur privé. Même que certains professionnels estiment qu’exiger ces frais «sous la protection de l’autorité administrative» constitue une forme de «complicité» entre l’Ordre et les services de cadastre pour imposer la loi du fait accompli et forcer les ingénieurs du secteur privé à payer des cotisation «illégales». Une action qui relève du crime de «concussion», selon l’expression utilisée dans une plainte formulée par le Syndicat et adressée au directeur général de l’ANCFCC, se justifiant que l’action de s’acquitter de cette cotisation additionnelle de manière forcée n’est encadrée par aucune loi et ne repose sur aucun fondement.
Iliasse El Mesnaoui
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