La Broncho Pneumopathie Chronique Obstructive (BPCO), est une maladie liée dans 8 cas sur 10 au tabac .C’est une maladie silencieuse à ses débuts, ou avec des symptômes parfois banalisés par les patients (comme la toux, les expectorations….), la maladie évolue vers un essoufflement, d’abord à l’effort, puis à des gestes ou mouvements anodins. Une gêne respiratoire peut s’installer même au repos, et a ce stade les dommages sont sérieux.
L’OMS prévoit qu’elle devienne la troisième cause de décès dans le monde en 2030. Plus de 90% des décès par BPCO se produisent dans des pays à revenu faible ou intermédiaire. Quelles sont les causes de cette maladie ? Quels sont lessignes? Quels sont les moyens de prévention?
Pour cerner toutes les facettes de cette maladie Al Bayane est allé à la rencontre du professeur Abdelaziz Aichane spécialiste en pneumologie – allergologie, avec lequel nous avons eu un long entretien, au cours duquel le Professeur expose pour nos lecteurs ce qu’est la broncho-pneumopathie chronique obstructive.
La BPCO atteint plus de 210 millions de personnes (4 % à 10% de la population adulte). Elle est responsable de plus de cinq millions de décès par an et de millions de séjours hospitaliers annuels.
Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, la BPCO est la quatrième cause de décès dans le monde en 2015derrière les maladies cardiaques (neuf millions), les accidents vasculaires cérébraux (six millions) et les infections pulmonaires (un peu plus de 3,2 millions). Sur la période de 1990 à 2015, le nombre total de décès dus à la BPCO a augmenté de près de 12 %, en raison de la croissance et du vieillissement de la population.
depuis vingt ans, la BPCO est en augmentation constanteen raison de l’augmentation du tabagisme, notamment chez les femmes. L’OMS prévoit que la BPCO deviendra la troisième cause de décès et la 5ème cause de Handicap dans le monde en 2030 (alors qu’elle était en 1990, au cinquième rang des causes de mortalité et au douzième rang des causes de handicap).
D’après l’étude sur la charge mondiale de la maladie, la prévalence s’établissait à 251 millions de cas de BPCO au niveau mondial en 2016.
Plus de 3,17 millions de personnes sont décédées d’une BPCO en 2015, ce qui correspond à 5% de l’ensemble des décès survenus dans le monde cette année-là. Plus de 90% des décès par BPCO se produisent dans des pays à revenu faible et intermédiaire.
Qu’en est – il en France?
Pour bien comprendre ce que signifie la PCO et les dégâts que cette maladie entraine, nous faisons une comparaison entre la situation en France et au Maroc , tout en sachant que les moyens pour assurer les prises en charge des malades en milieu spécialisé sont très différents.
En France la BPCO est la 2ème maladie respiratoire après l’asthme et la sixième cause de mortalité, il y a 15 Millions de fumeurs, autant d’hommes que de femmes, on relève que le début de tabagisme s’effectue dès 13-14 ans, 3,5 millions d’individus sont atteints de bronchite chronique simple , et 600.000 cas de BPCO, qui sont la cause de 800.000 journées d’hospitalisations par an, 100.000 handicapés respiratoires d’origine tabagique sous Oxygénothérapie et ventilation à domicile, en outre 16000 à 19000 décès chaque année.
La situation au Maroc
Il convient de rappeler que la BPCO touche 1,5 million de Marocains, soit plus de 3,9% de la population. Cette maladie reste sous-diagnostiquée et sous-traitée: 2 malades sur 3 atteints de la BPCO ne le savent pas. La maladie évolue généralement de manière lente et progressive, ce qui en fait toute la gravité, puisqu’elle échappe au diagnostic précoce.
Selon les spécialistes des maladies respiratoires, la BPCO progresse d’année en année, la courbe de la maladie est exponentielle car le nombre des fumeurs est en constante augmentation.
À l’horizon 2030, la broncho-pneumopathie chronique obstructive deviendra la troisième cause de mortalité dans le monde, toutes pathologies confondues. Il s’agit d’un véritable fléau qu’il convient de combattre activement pour stopper sa progression au Maroc, pour se faire il est essentiel que cette maladie soit diagnostiquée à un stade précoce.
Les enjeux du diagnostic précoce
Le diagnostic précoce de la maladie est utile à plus d’un titre, il permet de réduire le handicap et d’améliorer la qualité de vie du patient. En effet,plus le dépistage est précoce, plus il permettra de ralentir la détérioration pulmonaire et de préserver la qualité de vie du patient, en orientant le patient vers une prise en charge adaptée, dans un milieu spécialisé ou existent des professionnels de santé qualifiés, ce qui permettra de démarrer un traitement plus tôt.
En agissant rapidement, on contribue au sevrage tabagique du malade, ce qui permet d’envisager une bonne évolution de la maladie, et un pronostic meilleur, une guérison, une réadaptation et un retour rapide à la vie normale.
Tout cela nécessite des professionnels maitrisant bien les symptômes de cette pathologie qui souvent est assimilée a une simple bronchite , une grippe , un rhume , en plus il faut instaurer une culture orientée vers l’entraide entre médecins généralistes et spécialistes , ce qui contribuera a ne pas en douter au respect des recommandations de bonnes pratiques…
Pour mieux comprendre cette terrible maladie, ce fléau qui tue à petit feu, pour cerner ses causes, ses facteurs de risques, ses signes et la prévention de la BPCO, nous avons rencontré pour nos lecteurs le professeur Abdelaziz Aichane, spécialiste en pneumologie – allergologie, avec lequel nous avons eu un long entretien, au cours duquel le Professeur expose pour nos lecteurs ce qu’est la broncho-pneumopathie chronique obstructive.
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Professeur Abdelaziz Aichane, spécialiste en pneumologie – allergologie
AlBayane : Pouvez – vous nous définir ce qu’est la BPCO ?
Professeur Abdelaziz Aichane: La bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) est une maladie chronique inflammatoire qui touche les bronches. Elle progresse lentement et devient invalidante. Elle se caractérise par une diminution progressive du souffle, liée à plusieurs facteurs.
Les parois des bronches et des bronchioles deviennent plus épaisses et les cellules produisent plus de mucus que d’habitude. Les voies respiratoires ont un calibre diminué et sont encombrées.
Les petites bronches (bronchioles) et les alvéoles des poumons se déforment et perdent leur élasticité, puis les alvéoles pulmonaires, qui permettent les échanges gazeux lors de la respiration, sont détruites, c’est ce que l’on désigne sous le nom d’emphysème.
Ensuite, la maladie s’aggrave ; la respiration devient inefficace, obligeant le malade à recevoir de l’oxygène. A ce niveau, la BPCO peut avoir des répercussions sur le fonctionnement du cœur.
J’ajouterai que cette maladie est loin d’être anodine, elle n’est pas complètement réversible c’est pourquoi il est important de veiller à moins s’exposer, ou plus du tout, aux facteurs favorisant sa survenue et en premier lieu le tabac.
Quels sont les facteurs de risque de cette pathologie?
Le principal facteur de risque de BPCO est le tabagisme (actif ou passif), c’est le principal coupable, plus de 80% des cas lui sont attribuables.
Cependant d’autres facteurs accroissent également le risque de développer la maladie, c’est le cas en ce qui concerne la pollution de l’air intérieur et extérieur
Il y a aussi lieu de citer les expositions professionnelles ou domestiques à des poussières et des substances chimiques (silice, poussières de charbon, poussières végétales, moisissures).
On incrimine aussi les infections des voies respiratoires inférieures fréquentes au cours de l’enfance et qui peuvent aussi créer un terrain propice au développement ultérieur de la BPCO.Et comme dans toute maladie multifactorielle, une composante génétique existe également.
Quels sont les signes de cette maladie?
Les symptômes les plus révélateurs et qui permettent de déceler la maladie sont une toux persistante avec expectoration chronique pendant 3 mois consécutif, à laquelle malheureusement le malade ne prête pas attention .Il y a une dyspnée parfois méconnue, car le malade s’adapte à sa dyspnée persistante ou apparaissant à l’effort ou lors d’une exacerbation. L’essoufflement après certains efforts, le fait de ne pas pouvoir suivre le rythme d’autres personnes de même condition physique sont autant d’éléments qui devraient alerter et qui peuvent annoncer une BPCO évoluée.On peut retrouver des signes généraux à type de fièvre, la toux est productive avec expectoration muqueuse ou mucopurulente, plus ou moins abondante et aggravation de la dyspnée. Mais ces premiers signes ne sont pas toujours présents, et certains patients vont évoluer vers une BPCO sans passer par l’étape de la bronchite chronique, considérée généralement comme le premier stade de la maladie.
Qu’en est-il du diagnostic de la BPCO?
Face à ces symptômes persistants de ce type que je viens de vous décrire, en particulier chez un sujet fumeur ou exposé à un facteur favorisant, le médecin spécialiste réalise des examens pour diagnostiquer une obstruction bronchique grâce notamment à la spirométrie.
Il s’agit d’un test permettant de mesurer les volumes pulmonaires et les débits bronchiques du patient. Il consiste à réaliser des manœuvres respiratoires dont certaines sont forcées, en particulier lors de l’expiration, à travers un embout buccal relié à un spiromètre (dispositif de mesure des volumes et débits). Plus les voies aériennes sont obstruées, plus le volume d’air expiré est faible, la mesure du volume maximal expiratoire en 1 seconde (VEMS) est un indicateur de la sévérité de l’obstruction bronchique. La maladie est confirmée si le VEMS rapporté à la capacité vitale du patient (son plus grand volume pulmonaire mobilisable) est diminué malgré l’inhalation d’un bronchodilatateur de courte durée d’action.
Le résultat du VEMS post-bronchodilatateur permet de classer la maladie selon le degré de sévérité de l’obstruction bronchique.
La détermination du stade de la maladie est indispensable, car elle conditionne le traitement et le pronostic.
D’une manière générale, j’insiste encore une fois de plus pour dire que les patients doivent se faire diagnostiquer dès l’apparition des premiers symptômes de toux et de crachats matinaux. Il faut aussi souligner en rouge tous les risques des maladies pulmonaires qui pèsent également sur les fumeurs passifs. A ce sujet, il est utile de rappeler ici que de nombreuses études scientifiques démontrent de manière empirique les effets néfastes du tabagisme passif.
Vous savez concernant le diagnostic de la BPCO comme pour toutes les autres maladies, il faut insister sur l’implication du médecin généraliste , qui est importante dans toute démarche de diagnostic, car c’est lui dans bien des cas qui voit le malade en premier , qui peut le conseiller, le sensibiliser, le suivre…
Quels sont ces stades?
Il existe quatre stades de BPCO, classés de 0 à 3. Ces différents niveaux permettent aux médecins de définir un traitement adapté
Stade I : léger, VEMS supérieur ou égale à 80%
Stade II : modéré, VEMS comprise entre 50 et 80%
Stade III : sévère, VEMS comprise entre 30 et 50%
Stade IV : très sévère, VEMS inférieur à 30%
D’autres classifications se sont développées ces dernières années, tenant compte de la dyspnée d’effort, du nombre d’exacerbations, ou d’un index composite prenant en compte, en plus de l’obstruction et la dyspnée, des paramètres nutritionnels et la tolérance à l’exercice.
Comment lutter contre la BPCO?
Je vous ai dit au début de notre entretien que le coupable de la BPCO est le tabac, il n’est pas de trop de rappeler et surtout d’insister que le tabac est responsable de 80% des cas de broncho-pneumopathie chronique obstructive. Environ 10 à 15% des fumeurs développent une BPCO, les premiers symptômes se développant en général après 20 ans de tabagisme. Pour espérer stopper la progression de la BPCO, il est nécessaire de lutter activement contre le tabagisme.
Le tabagisme est la cause de nombreuses maladies dont les bronchites chroniques , les cancers du poumons , de la bouche , de la vessie , il est responsable de la BPCO, et face a autant de menaces pour la santé de nos concitoyens , il nous faut agir , sensibiliser les jeunes, éduquer les garçons et le filles au niveau des écoles , organiser des conférence , des émissions radio et TV autour des thèmes du tabagisme et santé, la presse a un très grand rôle a jouer dans la prévention des maladies respiratoires, de la BPCO , il faut informer le plus grand nombre sur les méfaits du tabac.
Cette lutte et ces actions nous concernent tous.
Malgré l’élaboration d’une loi interdisant de fumer dans les lieux publics, les décrets d’application n’ont pas encore été publiés. Sans une application stricte de la loi anti-tabac, nous ne pourrons jamais baisser la prévalence de la BPCO.
propos recueillis par Ouardirhi Abdelaziz