Entre acquis constitutionnels et défis de la réalité

La parité homme-femme

Par Khalid El Harrak -MAP

Plus de dix ans après l’entrée en vigueur de la Constitution de 2011, ses dispositions continuent d’imposer des défis majeurs à l’ensemble des acteurs à qui incombe la responsabilité de traduire ses normes avancées en mesures législatives et en politiques publiques permettant de traduire le principe d’égalité homme/femme en résultats concrets.

Tout en érigeant les droits et les libertés en constantes immuables du Royaume, la Constitution de 2011 a constitué une grande avancée pour la question des droits des femmes et un pas en avant pour accélérer la cadence de la réalisation de la parité entre les hommes et les femmes à travers des mesures pratiques.
Pour le politologue M’hammed Belarbi, les indicateurs montrent des avancées encourageantes en matière de statut des femmes au Maroc depuis les années 2000, y compris leurs droits au sein de la famille, avec, en premier lieu, la réforme du Code de la famille en 2004, qui avait répondu à une attente nationale forte, en écho au mouvement international, considérant la lutte contre les inégalités hommes-femmes comme facteur de développement et de cohésion sociale, à l’aune notamment du 5ᵉ objectif des Objectifs de développement durable 2015-2030 de l’ONU, relatif à l’égalité entre les sexes.

A bien des égards, l’inscription de l’égalité et de la parité dans la nouvelle Constitution ne pourrait que constituer une grande avancée pour la question des droits des femmes. Ainsi, l’égalité femmes-hommes est consacrée dans son article 19 qui dispose que « l’Homme et la Femme jouissent, à égalité, des droits et des libertés à caractère civil, politique, économique, social, culturel et environnemental… « .  La loi 79-14 relative à la création de l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination a été promulguée en septembre 2017. Cette entité spécialisée, créée en vertu des articles 19 et 164 de la Constitution a pour attributions, notamment, de veiller au respect des droits et des libertés prévues à l’article 19 précité.
Au niveau institutionnel, à travers les dispositions juridiques, les discours et la volonté politique affichée on assiste à un accord presque consensuel sur l’égalité hommes/femmes, explique l’enseignant-chercheur à l’université Cadi Ayyad de Marrakech dans une déclaration à la MAP.

Constamment à l’affût, le législateur a opté, en adoptant la loi organique N°04.21 modifiant et complétant la loi organique N°27.11 relative à la Chambre des représentants, pour des circonscriptions régionales réservées aux femmes afin d’assurer une plus grande représentativité des femmes au sein de l’institution législative.
Concernant la féminisation de la députation, la représentation des femmes au sein de la Chambre des représentants actuelle est de 20,5% contre 12 % en 2002, et 11,7% pour la deuxième Chambre.

Malgré ces données encourageantes, de nombreux défis persistent toutefois. Pour le politologue, si la mise en place des réformes et les progrès réalisés pour combattre les discriminations basées sur le genre sont en marche, des déséquilibres perdurent, et des chantiers restent ouverts pour consolider et généraliser la matérialisation de l’égalité hommes-femmes au Maroc.  Outre les éléments historiques et les facteurs socioculturels qui créent encore des résistances et prennent la forme de stéréotypes et de préjugés relatifs à la capacité des femmes à assumer certains rôles et fonctions dans la société, les difficultés que rencontrent les femmes pour concilier entre vie personnelle et professionnelle est l’un des grands blocages à l’avancement des femmes et leur accès à la vie active.

En ce qui concerne le marché de l’emploi, la représentation des femmes dans les instances politiques et dans les instances décisionnelles des entreprises reste encore faible et l’intégration des femmes dans le marché du travail formel est lente, a relevé M. Belarbi, notant que l’éducation des filles dans le monde rural, la déscolarisation et les mariages des filles mineures rendent plus difficile l’émancipation des femmes au Maroc.
Car pour l’universitaire, l’inscription de l’égalité et de la parité dans la nouvelle Constitution de 2011 ne pourrait constituer une grande avancée que par la mise en œuvre des politiques publiques équitables pour les femmes et les hommes. 

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