Intolérable

Notre société, à l’instar de beaucoup d’autres, cherche les voies de sa transformation entre l’individualisme et la démocratie. Dans cette recherche, l’exigence de liberté est indiscutable. Il reste qu’il existe toujours un gap, un déphasage, une incertitude entre l’idéal et la réalité. C’est à travers ces zones de faiblesses que les extrêmes s’infiltrent pour vouloir donner au mouvement une ampleur plus grande, au péril de le réduire à néant.

La compatibilité de certains faits avec la recherche de la démocratie doit être approchée par ce biais. Une manifestation de masse n’est pas une séance de pratique où se vérifient des hypothèses ou des théories prônant le changement. C’est l’expression d’une lutte, dans le cadre des équilibres dynamiques régissant les rapports sociaux, où l’individu se perd dans l’ensemble du mouvement sans pour autant devenir un mouton de Panurge dans un troupeau égaré. L’enthousiasme de la masse impersonnelle ne doit pas être corrompu par des comportements provocateurs et irresponsables. Une revendication juste n’a pas besoin d’être dissipée dans des forfaitures.

Ce n’est pas de la bravoure ni du courage de profiter de la manifestation de la vox populi pour porter atteinte au sentiment national. L’article 4 de la constitution présente le drapeau national et le qualifie d’emblème du Royaume. Il représente «l’unité nationale aux affluents multiples». Il exprime «l’identité nationale une et indivisible». C’est une constante nationale fondamentale.

C’est pour cela que nul ne peut se permettre la latitude de porter atteinte, d’une manière ou d’une autre, à ce symbole. Autant il est important de revendiquer la mise en œuvre de toutes les dispositions constitutionnelles concernant les libertés et les droits fondamentaux, autant il est important de respecter les dispositions générales, aussi constitutionnelles que les autres, pour «poursuivre résolument le processus de consolidation et de renforcement des institutions d’un État moderne, ayant pour fondements les principes de participation, de pluralisme et de bonne gouvernance».

De même, la fougue de la jeunesse et sa spontanéité ne doivent pas être utilisées pour en faire des casseurs ou commettre l’intolérable. Par cela; les ennemis de la démocratie ont la possibilité de vider une manifestation de son caractère. La convergence des extrêmes se réalise et induit la répression au lieu de l’aboutissement des aspirations légitimes des masses populaires.

Il faudrait rappeler que la sottise des opportunistes de gauche n’est pas nouvelle au Maroc. La consolidation du processus démocratique nécessite la dénonciation, la condamnation des comportements irresponsables et leur réfutation pour éliminer les erreurs et assainir le mouvement revendicatif de toute dérive.

Ceci dit avec force et clarté; il n’en reste pas moins au gouvernement d’être à l’écoute de la population. Il est plus que temps de «suivre l’esprit de la nation» qui réclame de rester conforme au naturel. Les coups de gueule de la jeunesse irrespectueux et discourtois ne sont que le retour du boomerang du système dans lequel ils sont immergés. Il faut se mettre à l’heure des marocains. Répondre à leurs sollicitations légitimes sans s’arcbouter ou chercher midi à quatorze heures.

Les méandres de la démocratie n’empêchent pas d’aller vers sa réalisation. L’histoire récente a démontré autant l’incapacité des « doctrinaires de gauche », toutes catégories confondues, que celle des tenants du rêve de la «kawma» qui n’ont jamais cru au changement démocratique, à se débarrasser de leurs illusions. Sauf que l’immobilisme et la paralysie décisionnelle encouragent les dérapages ; la démagogie et le populisme fleurissent et les reculs sur les acquis démocratiques et les droits humains se manifestent.

Notre peuple aspire à une vie digne dont la dynamique conduit à la prospérité et au bienêtre de tous dans la stabilité, la sérénité et la durabilité. L’efficacité est beaucoup plus dans la consolidation du jeu démocratique que dans les mesures expéditives impopulaires. En donnant le temps au temps sans toutefois en perdre!

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