Les conditions de soutenabilité des équilibres financiers loin d’être réunies

Loin de tout renouveau de la politique économique ou de reconfiguration de la politique budgétaire, le budget 2020 opte pour la continuité et la rigueur financière et remet au second plan les objectifs prioritaires à savoir accélérer la croissance et améliorer les revenus et partant le pouvoir d’achat.

L’analyse du Centre marocain de conjoncture du PLF 2020 met l’accent sur  les insuffisances des actions et des ressources retenues dans le prochain budget par rapport aux exigences de relance de l’investissement et de préservation des conditions de soutenabilité  des équilibres financiers. D’ailleurs,  l’effort d’investissement public, rapporté au PIB révèle une baisse de près de 2 points et demi depuis 2016 en passant de 18,7 % à 16,3 % projeté pour l’année 2020.

Dans son bulletin d’analyse des tenants et des aboutissants du projet de budget 2020,, le CMC annonce que contrairement aux attentes, le Budget 2020 semble préconiser la gestion des équilibres macroéconomiques et la mise en concordance du système fiscal aux normes fixées par les partenaires commerciaux notamment européens. Un choix que les experts du centre qualifient d’improductif dans un contexte de fortes attentes de la reprise du cycle des affaires et de la croissance.   Ainsi,  aussi bien «la programmation budgétaire pour l’année à venir que ce soit au plan de l’affectation des ressources, du volume des dépenses, de l’effort d’investissement ou encore de la structure de la fiscalité relèvent en effet plus du finetuning que d’un véritable renouveau de la politique économique».

S’agissant de l’économie nationale, après une période marquée par un repli de l’activité, les pronostics pour l’année à venir s’attendent à un redressement significatif du cycle économique à la faveur de l’amélioration attendue des conditions de l’offre, conjuguée à un raffermissement de la demande globale. Sous l’hypothèse d’une pluviométrie suffisante et relativement bien répartie, le taux de croissance projeté pour l’année 2020 pourrait atteindre 4,6 %, soit 2 points de plus que l’année en cours.

Le CMC  estime que compte tenu des prévisions de redressement du cycle économique, cela devrait inciter  les opérateurs  inciter les opérateurs à plus de prise de risque et de soutien à la dynamique économique. Et de l’autre côté, devrait favoriser du côté des pouvoirs publics à mettre en place les conditions plus favorables à l’activité et à l’investissement à travers un «policymix» plus adapté qui «permette l’optimisation de l’impact non seulement au plan de la stabilisation du cadre macroéconomique mais aussi au plan de la croissance, des revenus et de l’emploi».

Néanmoins, les ressources mobilisées dans le cadre de la programmation budgétaire pour l’année engagent un effet fort limité eu égard aux objectifs de relance de la dynamique économique tant attendue. En témoigne les  ressources affectées aussi bien aux dépenses de fonctionnement qu’aux dépenses d’investissement dont l’apport s’annonce marginal et s’inscrit même en repli sensible par rapport à l’exercice précédent.

Aussi, l’évolution qui marque une inflexion de la tendance des dépenses en capital de l’Etat par rapport aux années précédentes ne concorde pas avec les objectifs de soutien de l’activité économique et la création de conditions plus favorables à la croissance. Le CMC rappelle que le volume global des investissements  se situerait selon les prévisions du budget à 198 Milliards de DH, en hausse d’à peine 1,5 % en valeur nominale. Rapporté au PIB, l’effort d’investissement public s’est réduit de près de 2 points et demi depuis 2016 en passant de 18,7% à 16,3% projeté pour l’année 2020.

Par ailleurs, les dispositions fiscales affectant l’entreprise portant principalement sur l’ajustement de l’IS ou du relèvement des droits d’importation sur certains produits provoquerait une perte nette de ressources disponibles à l’investissement de l’ordre de près d’un milliard de DH.

De même, au  «niveau des ménages, les différentes mesures fiscales affectant la consommation généreront une perte apparente de ressources pour cette catégorie d’agents de 5,3 Milliards de DH qui sera largement compensée par le surcroît de dépenses prévues au titre du personnel pour un montant estimé à 7,5 Milliards de DH».

Pour rester optimiste, les analystes du centre marocain de conjoncture estiment que le contexte macroéconomique caractérisé par un repli de la croissance et par une inflation faible offre l’opportunité d’actionner les instruments monétaires appropriés pour une véritable relance de l’activité.

Pour conclure, le CMC, précise que le «recadrage de la politique économique et la recherche d’une plus grande efficacité de ses instruments ne peuvent se concevoir que dans le cadre d’un renouveau du policy-mix, budgétaire et monétaire, en reconsidérant ses objectifs mais aussi en optimisant ses moyens».

Fairouz El Mouden

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