L’île de Chypre serait-elle sur la voie de la réunification?

Cette nouvelle année 2017 s’est ouverte sur l’arrivée d’un nouveau Secrétaire Général à la tête de l’Organisation des Nations-Unies et sur la tenue, à Genève, sous son égide, de négociations «historiques» visant la réunification de Chypre. A l’issue de ces pourparlers ayant trait aux garanties de sécurité de la future fédération de Chypre, le responsable onusien qui dit ne pas chercher «un bricolage rapide» mais «une solution solide et durable» a annoncé être «très proche d’un règlement» sans, toutefois, espérer «un miracle».

Cette rencontre est historique car elle revêt, pour la première fois, un caractère multilatéral en réunissant, autour d’une même table, la Grèce, la Turquie et la Grande Bretagne en tant qu’ancienne puissance occupante encore présente militairement dans le sud de l’île dans des bases où sont stationnés près de 4.200 soldats britanniques mais qui propose de les retirer en cas d’accord entre les deux belligérants.

Pour comprendre la situation actuelle de ce petit pays de 9.250 kilomètres carrés et d’à peine un peu plus d’un million d’habitants, il faut retourner aux premiers temps de son affranchissement de l’occupation britannique en 1960 quand les conflits interethniques ayant éclaté entre sa population hellénophone grecque majoritaire et la minorité turcophone avaient amenés l’Organisation des Nations-Unies à intervenir.

Plus tard, le 15 Juillet 1974, ce sont les militaires au pouvoir en Grèce – ces fameux Colonels de sinistre mémoire – qui décidèrent de renverser le gouvernement chypriote en place pour rattacher l’île à la Grèce ; ce qui ne fut pas du goût de la Turquie qui, le 20 Juillet, y envoya ses troupes pour assurer la protection de la minorité turque constituant moins de 20% de la population. Trois jours plus tard, la junte militaire est chassée du pouvoir à Athènes. Profitant alors de cette situation – une aubaine pour l’armée turque – cette dernière continue son avancée pendant que les chypriotes grecs fuient vers la partie sud de l’île ou vers l’exil.

Depuis cette date, une ligne de démarcation appelée «Ligne verte» et contrôlée par les Casques Bleus de l’O.N.U., sépare l’île en deux parties, la République de Chypre au sud, membre de l’Union Européenne de 2004, de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE), de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) ayant intégré la Zone Euro le 1er Janvier 2008 et la République Turque du Nord de Chypre reconnue par la seule Turquie.

Après la fin du premier round de ces pourparlers entre les deux communautés présentes sur l’île tenus sous l’égide du nouveau Secrétaire Général de l’O.N.U., le Président chypriote Nicos Anastasiades a continué d’exiger le retrait de l’armée turque en rappelant qu’une «solution juste au problème de Chypre suppose avant tout l’élimination des problèmes qui sont à la racine du conflit ; à savoir la présence des troupes occupantes» ; ce à quoi le Président Turc Recep Tayyib Erdogan a déclaré, après la prière de ce vendredi 13 Janvier 2017 à Istanbul, qu’un «retrait total des soldats turcs est hors de question». Et celui-ci d’ajouter : «Nous avons dit à Chypre et à la Grèce de ne pas compter sur une solution sans la Turquie comme garant. Nous allons rester là pour toujours».

Ainsi, malgré les propos que d’aucuns jugeront un peu trop rassurants du nouveau Secrétaire Général de l’Organisation des Nations Unies, il semble, à priori, que le conflit qui a donné lieu, il y a plus de quarante-deux années, à la partition de l’île de Chypre ne soit pas encore prêt de trouver un rapide dénouement même si le Président Chypriote Anastasiades a déclaré, lors d’une conférence de presse tenue en marge de cette rencontre, que les entretiens entamés ont «tracé une voie qui crée des espoirs».

Enfin, le norvégien Espen Barth Eide, médiateur onusien qui suit depuis mai 2015 les négociations entreprises au titre de la réunification de l’île de Chypre estime, pour sa part, qu’il existe aujourd’hui «la meilleure chance» de régler le problème chypriote. Puisse-t-il dire vrai pour que l’île de Chypre retrouve son unité et que ses habitants jouissent d’une quiétude et d’une paix amplement méritées après un conflit qui perdure depuis plus de quatre décennies!

Nabil El Bousaadi

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