Où en est le Tchad un an après la mort d’Idriss Déby ?

Attendons pour voir…

Après la mort, le 20 Avril 2021, lors de combats avec les rebelles, d’Idriss Déby, qui dirigeait le Tchad d’une main de fer depuis 30 ans, son fils, Mahamat Idriss Déby, âgé d’à peine 37 ans, avait pris la tête d’un Conseil militaire de transition qui, pour rassurer la population, avait déclaré n’avoir « aucune ambition de gouverner solitairement le pays » et s’était engagé, en conséquence, à organiser des élections présidentielles, au plus tard dans un délai de 18 mois.

Ainsi, bien que la Constitution tchadienne prévoit qu’en cas de décès du chef de l’Etat, c’est le président de l’Assemblée nationale qui assure la transition jusqu’à la tenue d’élections, le fils du défunt président s’était immédiatement emparé du pouvoir après la mort de son géniteur, avait dissout les institutions et promis d’entamer un « dialogue de réconciliation nationale ».

Mais où en est donc le Tchad aujourd’hui et qu’en est-il de ce fameux dialogue supposé ouvrir la voie au « retour à l’ordre démocratique » alors qu’une année s’est déjà écoulée depuis la mort de l’autocrate qui avait tenu le pays sous son emprise pendant 30 ans ?

Si depuis sa « nomination » à la tête du Conseil militaire de transition, Mahamat Idriss Déby a initié diverses réformes destinées à faciliter le dialogue avec les forces de l’opposition dont notamment la levée de l’interdiction de manifester ainsi que deux lois d’amnistie générale pour les rebelles et les opposants, force est de reconnaître que le processus de transition accuse un sérieux retard car si un gouvernement civil avait pu être formé dès la  fin du mois d’Avril 2021, il a fallu attendre cinq autres mois pour que soient mis en place le Conseil National de Transition (CNT) ainsi que le Parlement provisoire ayant pour mission de superviser le retour à l’ordre constitutionnel.

Et même si, par ailleurs, l’Union Africaine avait exigé que le scrutin présidentiel se tienne dans un délai maximum de 18 mois et que lui soit donnée la garantie qu’aucun des membres du Conseil militaire de transition ne sera candidat, Mahamat Idriss Déby ne s’était pas empêché d’affirmer, dès le mois de Juin, qu’il n’excluait, en aucun cas, une prolongation de la période de transition et maintient encore, à ce jour, le flou quant à sa participation au scrutin présidentiel.

Le « dialogue national inclusif » ayant tardé à voir le jour après avoir été repoussé à plusieurs reprises étant, désormais, prévu pour le 10 Mai prochain, il y a lieu de préciser, néanmoins, que, depuis le 13 Mars dernier, une médiation dite de « pré-dialogue » rassemblant des représentants du gouvernement tchadien et plus de 250 opposants appartenant à une cinquantaine de groupes rebelles rétifs à tout dialogue direct avec le pouvoir de N’djamena est, actuellement, à Qatar pour « négocier » avec ce dernier, de l’avenir du pays, par l’entremise d’intermédiaires qataris.

Mais, au début du mois, un de ces groupes rebelles – à savoir, le « Conseil de Commandement Militaire pour le Salut de la République » (CCMSR) – avait claqué la porte en reprochant au gouvernement de N’djamena d’avoir invité, à la table des négociations, de « faux opposants » afin de « noyer » leurs revendications et de leur imposer un accord à son avantage.

Le CCMSR sera suivi par « Wakit Tama », la principale plateforme de l’opposition tchadienne qui, après avoir été constituée pour dénoncer le sixième mandat d’Idriss Déby, a rompu les discussions avec le Conseil Militaire de Transition même si l’aboutissement à un dialogue véritablement inclusif requiert la participation de tous.

Disons pour terminer que si le nouvel homme fort du régime a rapidement « consolidé son pouvoir en s’entourant de caciques de l’ancien régime », c’est donc que la perpétuation du régime mis en place par son père et qui s’appuyait sur la toute puissante armée est l’hypothèse la plus probable et que ce statu quo convient fort bien aussi bien aux tchadiens qu’à la communauté internationale dès lors qu’il constituerait un gage de stabilité dans une région tourmentée par l’activisme des jihadistes de Boko Haram et du groupe Etat Islamique… Alors, attendons pour voir…

Nabil EL BOUSAADI

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