C’est par 54 voix pour et 46 contre que le Sénat américain, bien que contrôlé par les républicains, a infligé, ce mercredi 13 mars, un sérieux camouflet au président Donald Trump en approuvant une résolution l’exhortant à arrêter, sauf autorisation expresse du Congrès, tout soutien à la coalition menée par Ryad dans sa guerre contre le Yémen.
L’indignation face au rôle de Riyad dans la guerre civile qui déchire le Yémen et lui fait vivre la pire crise humanitaire de son histoire et l’implication des barbouzes saoudiens dans l’odieux assassinat du journaliste Jamal Khashoggi dans les locaux du Consulat d’Arabie Saoudite à Istanbul ont grandement influencé le vote les sénateurs à telle enseigne que onze républicains se sont joints aux démocrates pour faire approuver le texte.
A noter, également, que le jour-même et peu de temps avant le vote, Gina Haspel, la Directrice de la CIA avait communiqué, à huis clos, aux chefs républicains et démocrates de la Chambre, les conclusions de l’agence centrale américaine de renseignements sur le meurtre du journaliste saoudien.
«La participation américaine à la guerre menée par l’Arabie Saoudite au Yémen n’a pas été autorisée par le Congrès (…) et contribue à la pire crise humanitaire du monde» a déclaré Bernie Sanders, le sénateur indépendant du Vermont qui a présenté cette résolution avec l’appui de Mike Lee, le sénateur républicain de l’Utah, qui déplore, pour sa part, le fait que «les Saoudiens utilisent probablement» des armes américaines «pour commettre des crimes de guerre».
Aussi, la résolution adoptée ce mercredi par le Sénat stipule expressément que «le Congrès exige du président de retirer les forces armées américaines des hostilités affectant la république du Yémen» à l’exception des opérations visant Al Qaida et les autres formations terroristes qui lui sont rattachées et ce, dans un délai de 30 jours prenant effet à compter de la date de l’adoption du texte.
Appelé, par ailleurs, à recueillir l’approbation de la chambre des représentants, dominée par les démocrates, ce texte a de très fortes chances de passer notamment après que, le 13 Février dernier, une résolution similaire ait été adoptée par 248 voix pour et 177 contre.
Cette unité démocrate-républicains – rare, il est vrai, mais bel et bien réelle cette fois-ci – s’explique aisément par la colère suscitée par l’affaire Khashoggi dans les chancelleries du monde entier et par la réaction timide du président américain envers son principal commanditaire, le prince héritier Mohammed Ben Salmane.
Mais si la Maison Blanche, «fermement opposée» à cette résolution qu’elle juge «bancale» a fait savoir que le Président allait lui opposer son véto, force est de reconnaître, toutefois, que l’idée même d’un recours au «véto présidentiel» est, en soi, un malheureux affront. Et comme un malheur vient rarement seul, ce jeudi le Sénat devait se prononcer sur une résolution présentée par les démocrates au titre du rejet du financement «en urgence» du mur que le président entend construire à la frontière avec le Mexique. Il va de soi, que là aussi, le Président va devoir user de son droit de véto ; ce qui sera une première depuis son investiture en Janvier 2017.
Mais comment donc Donald Trump, qui dit être un des meilleurs présidents que l’Amérique ait jamais connu, va-t-il encaisser ces deux camouflets en si peu de temps quand bien même il dispose d’un droit de véto ? Attendons pour voir…
Nabil Bousaadi