Trouvant «scandaleux que l’argent européen finance l’autocratie et les oligarques», les jeunes maires libéraux, progressistes et pro-européens de Budapest, Bratislava, Prague et Varsovie avait annoncé, le 16 décembre dernier à Budapest, la naissance d’une «alliance des villes libres».
Cette alliance entre les maires des capitales du Groupe de Visegard regroupant la Hongrie, la Slovaquie, la Tchéquie et la Pologne – les pays du vieux continent les plus réputés, actuellement, pour leurs entorses à l’Etat de droit – vise à «combattre le populisme de l’intérieur par une démonstration de bonne gouvernance» mais aussi à resserrer les liens avec l’Union européenne, à promouvoir «la liberté, la dignité humaine, la démocratie, l’égalité, l’Etat de droit, la justice sociale, la tolérance et la diversité culturelle» et, enfin, à instaurer un dialogue direct avec l’U.E. au titre de l’octroi des subventions européennes.
Aussi, à l’occasion de la tenue, à Bruxelles, des négociations concernant le budget de l’U.E. pour la période 2021/2027, les maires des quatre «villes libres» précitées s’y sont rendus ce mercredi afin d’y rencontrer le vice-président de la Commission européenne, Frans Timmermans, et de solliciter, de ce dernier, la mise en place de fonds communautaires qui soient directement destinés aux grandes villes car en étant moins soumises au lobbying de l’industrie des énergies fossiles que leurs gouvernements, elles sont à même d’entamer la transition écologique beaucoup plus rapidement que ces derniers.
S’agissant de l’octroi des fonds nécessaires à la lutte contre le changement climatique, il y a lieu de signaler qu’en ce dossier, Budapest, Bratislava, Prague et Varsovie ne mèneront pas leur combat toutes seules puisque les maires de quinze grandes villes européennes, dont Berlin, Athènes, Milan et Strasbourg, ont également adressé, ce mercredi à la présidente de la Commission européenne, une lettre de demande de fonds communautaires rappelant que «la lutte contre le changement climatique sera gagnée ou perdue dans les villes».
Le plan présenté par les maires de «l’alliance des villes libres» prévoit que 10% des fonds de cohésion alloués par l’U.E. – lesquels avaient atteint 63,4 milliards d’euros pour la période 2014/2020 – aillent directement aux villes afin d’éviter aussi bien les lenteurs bureaucratiques que les risques que cet argent ne «s’évapore dans les méandres de la corruption». Certaines municipalités craignent même d’être rayées par leurs gouvernements de la liste des bénéficiaires. C’est le cas notamment de Budapest après qu’une enquête publiée par le quotidien hongrois «Nepszava» ait révélé que gouvernement de Viktor Orban aurait présenté, à la Commission de l’U.E. et pour la période 2021/2027, un projet de distribution de fonds excluant totalement la capitale hongroise.
Mais, même si les maires de «l’alliance des villes libres» ont fait le déplacement jusqu’à Bruxelles, leur initiative n’a que très peu de chances d’aboutir; d’abord, parce que la Commission européenne qui distribue les fonds communautaires aux Etats ne dispose d’aucun moyen qui lui permettrait de contraindre ces derniers à les reverser aux villes puis, parce que Budapest, Bratislava, Prague et Varsovie sont de vrais îlots de prospérité par rapport à un grand nombre de villes d’Europe centrale dont le PIB se situe bien en-deçà de la moyenne européenne. Alors, attendons pour voir…
Nabil El Bousaadi