Al Bayane : Le festival international du film vous a rendu hommage pour l’ensemble de votre carrière. Quel est votre sentiment?

Abderraouf : Toute personne se réjouit d’une reconnaissance pareille, surtout quand c’est une récompense morale. Je suis très ému par cet hommage et cette pensée, car cela fait toujours plaisir de récolter de l’amour.

Comment voyez-vous la scène humoristique actuelle ?

Dans la vie, nous n’apprenons pas à devenir humoriste, car faire rire les gens est un don. Soit on l’a, soit on ne l’a pas. En effet, il est facile de faire pleurer les gens durant un film, mais il est difficile de les faire rire. Être humoriste demande beaucoup de talent et du travail surtout ! Il faut être unique pour réussir, autrement nous serons tous pareils.

Il y’a beaucoup de jeunes talents aujourd’hui sur la scène. A mon époque, ce n’était pas aussi simple de faire carrière dans ce milieu. Maintenant, le ministère de la Culture apporte un grand soutien aux artistes. D’ailleurs, je les incite à saisir les occasions qu’on leur offre. A mon époque, la télé était en noir et blanc. Aujourd’hui, elle est en couleur !

Vos débuts ont-ils été difficiles ?

Je dirais très difficiles même. Avant, nous faisions tout avec nos propres moyens! Personnellement, je louais les salles pour présenter mes pièces théâtrales avec mon propre budget. Je payais notamment les gens qui travaillaient avec moi et souvent je perdais plus que je ne gagnais. C’est difficile de réussir quand nous n’avons pas les moyens. Morale de l’histoire : il faut aimer ce qu’on fait pour pouvoir faire des sacrifices pareils.

Quels sont vos futurs projets ?

Je travaille sur une pièce de théâtre intitulée «Assolh khayr» qui parle des problèmes de famille dans la vie quotidienne et qui peuvent être surmontés par la réconciliation sans arriver aux tribunaux. Bientôt nous commencerons la tournée de cette pièce dans laquelle sont impliqués mes enfants et moi-même.

Propos recueillis par Omayma Khtib

Bio express :

Né en 1936 au Maroc, Abderrahim Tounsi dit Abderraouf, est le précurseur de l’art humoristique au Maroc. Passionné par le théâtre, il débute sa carrière de comédien en créant, avec des amis, une troupe qui se produit dans des cafés en adaptant des textes de Molière. Abderraouf, personnage burlesque et simplet, inspiré d’un camarade de classe, séduit et fait rire des générations entières. Ses spectacles se jouent à guichets fermés et les enregistrements se vendent par milliers. Le succès d’Abderraouf va alors dépasser les frontières du Royaume, s’étendant auprès de l’ensemble de la communauté maghrébine installée à l’étranger. Il est nommé à Anvers en 2011 «Meilleur Humoriste marocain du XXe siècle» par la fondation des Nuits de l’humour arabe.