Attendons pour voir…
Nabil El Bousaadi
Si dès son élection pour un nouveau mandat à la tête des Etats-Unis, Donald Trump s’était empressé de déclarer que le contrôle du Groenland est « une nécessité absolue (pour) la sécurité et la liberté à travers le monde », c’est d’abord, parce qu’en disposant d’une base active à Pituffik, au nord-ouest de l’île, le Groenland reste, pour les Etats-Unis, la trajectoire la plus courte pour un tir de missiles vers la Russie puis parce que, du fait de sa position stratégique à l’accès difficile, ce territoire autonome danois possède d’importantes réserves minières et pétrolières encore inexploitées.
Mais bien que, dès le lendemain de l’accession de Donald Trump au pouvoir, le premier ministre du Groenland, Mute Egede, avait rejeté toute idée de rattachement de son territoire aux Etats-Unis, tout en se déclarant, néanmoins, ouvert à un renforcement de la coopération avec Washington il y a lieu de rappeler que, lors d’une communication téléphonique tenue, à la mi-janvier, avec Donald Trump et décrite, par les danois, comme ayant été « longue et franche », la Première ministre du Danemark, Mette Frederiksen, avait signalé, au nouveau président américain, qu’il appartient au Groenland, de décider lui-même de son avenir.
Mais, vu que l’inquiétude des danois est montée d’un cran, ce samedi, lorsque Donald Trump a assuré à des journalistes que les Etats-Unis « obtiendront » le Groenland, en se montrant très ferme, le ministre danois des Affaires étrangères, Lars Lokke Rasmussen, a, immédiatement, exclu tout rattachement de ce territoire aux Etats-Unis en déclarant « Trump n’aura pas le Groenland. Le Groenland, c’est le Groenland, et le peuple groenlandais est un peuple au sens du droit international, protégé par le droit international ».
Aussi, en cherchant le soutien de ses partenaires de l’UE, avant de prendre son bâton de pèlerin pour sillonner le vieux continent, dès mardi, la Première ministre danoise, Mette Frederiksen, a, dès le lendemain, publié, sur les réseaux sociaux, la photo d’un dîner, à Copenhague, auquel avaient assistés les premiers ministres suédois et norvégien et le président finlandais et ce, en prenant soin d’ajouter, en guise de commentaire, que « les pays nordiques ont toujours été solidaires. Et face à la réalité nouvelle et plus imprévisible à laquelle nous sommes confrontés, les alliances et les amitiés solides et étroites sont devenues encore plus importantes ».
Lors de sa première escale, à Berlin, avant de regagner Paris et Bruxelles, la dirigeante danoise a vanté les liens d’amitié qui unissent son pays à l’Allemagne, et rappelé que l’Europe « repose sur l’idée que la coopération, plutôt que la confrontation, mènera à la paix, au progrès et à la prospérité ».
A cela, le chancelier allemand Olaf Scholz, a répondu que leurs deux pays ont « une vision du monde très similaire » avant d’ajouter sans, toutefois, nommer les Etats-Unis, mais en précisant, néanmoins, « to whom it may concern » – une formule administrative pour dire : à qui de droit – que « les frontières ne doivent pas être déplacées par la force ».
Après avoir rencontré, par la suite, à Paris, le Président français, Emmanuel Macron, la dirigeante danoise a déclaré aux médias que le « message » de ce dernier a été « très, très clair » puisqu’il a dit qu’ « il faut absolument respecter le territoire et la souveraineté des Etats (et que) c’est un élément essentiel de la communauté internationale, de cette communauté internationale que nous avons construite ensemble depuis la Seconde Guerre mondiale ».
Après la rencontre à Bruxelles, de la première ministre danoise avec le secrétaire général de l’Otan Mark Rutte, les dirigeants danois, soucieux de convaincre les Groenlendais de rester liés au Danemark, ont annoncé, par la voix de leur ministre de la Défense, leur intention de consacrer 14,6 milliards de couronnes, (près de 2 milliards d’euros), au renforcement de la sécurité dans l’Arctique, zone stratégique en raison de la proximité russe et américaine, et l’Atlantique Nord.
Tout indique, enfin, que, face à la convoitise de Donald Trump, le Danemark est disposé à sortir le grand jeu pour « garder la main » sur le Groenland mais attendons pour voir…
Nabil EL BOUSAADI