Mohamed Nait Youssef
Un grand homme de la culture et de la diplomatie s’en est allé. Mohamed Benaïssa, ayant occupé les postes du ministre des Affaires Etrangères (1999-2007), d’ambassadeur du Maroc aux États-Unis (1993-1999), ainsi que de ministre de la Culture (1985-1992), a rendu l’âme, vendredi dernier, des suites d’un long combat contre la maladie. Il avait 88 ans. Amoureux de la culture et des arts, le défunt a joué un rôle incontournable dans la dynamisation de la scène culturelle nationale et arabe. D’abord en créant d’abord le Moussem culturel d’Assilah (1978) et en tant que ministre de la Culture. Ce Moussem culturel est devenu, grâce à la qualité de sa programmation et de ses invités de marque, un rendez-vous annuel important et une adresse indispensable des intellectuels, des penseurs, des artistes et des chercheurs pour débattre des différentes thématiques et problématiques d’actualité.
Assilah, dans les cœurs et les esprits…
Le regretté a été connu pour son dévouement à la ville où il a ouvert les yeux : Assilah. Son nom restera associé à cette cité lumineuse, aux couleurs époustouflantes et aux maisons blanches et au ciel clément. Son nom restera également associé à son célèbre Moussem culturel qui est plus qu’un événement culturel, mais une plateforme fédératrice qui réunit les intellectuels des quatre coins du monde sachant que l’intelligentsia d’ici et d’ailleurs.
«Je dois dire que le facteur essentiel de cette manifestation culturelle d’Assilah, qui existe depuis des années, réside dans la présidence de Sa Majesté lorsqu’il était prince héritier, à l’âge de 15 ans, il est venu à Assilah. Et depuis, il a accepté d’être notre président d’honneur. C’est un facteur très important parce que ce que nous avions commencé, Melehi et moi, étions nouveaux. Il fallait alors tout restaurer, surtout peindre les murailles dans un patelin où il n’y avait rien, où le patrimoine était totalement en ruine…Sa Majesté venait plusieurs fois inaugurer des projets, il suit, il soutient…, et c’est ça la force des choses. Quand il y a des chefs d’Etat qui s’occupent de la culture, soyez sûrs que le pays est sur la bonne voie. Le Roi a édifié de grands projets culturels qui n’existaient pas, comme les grands théâtres, la bibliothèque nationale, les musées… et ce n’est que le départ. À mon avis, il faut s’occuper de l’être humain, de sa culture. C’est essentiel. On fait ce qu’on peut!», nous a confiés le regretté lors d’un entretien accordé à Al Bayane.
Homme d’art et de culture
Feu Mohamed Benaïssa était une figure emblématique de la vie culturelle, un agitateur culturel et un homme fédérateur. Son Moussem culturel d’Assilah a toujours été un véritable espace de dialogue, d’échange en ouvrant de nouvelles pistes de réflexions. La pensée, profonde et lucide, était au cœur des débats. «C’est une bonne chose de voir ces sujets débattus par la multitude des gens de différents backgrounds culturels, de différents intérêts politiques et autres. C’est exactement le but d’Assilah: créer cette plateforme ouverte et dédiée au dialogue, à l’échange dans notre pays», avait-il révélé.
Le regretté a apporté sa pierre à l’édifice quand il était à la tête du ministre de la Culture (1985-1992). «Je me suis toujours dit que la culture est une ressource, une source créatrice de revenus. Aujourd’hui, la culture est devenue dans le monde une source industrielle parce qu’il y a des pays qui y vivent comme l’Egypte qui a investi davantage dans le cinéma, l’édition, la musique… Les industries culturelles ont toujours été importantes, encore plus aujourd’hui.», avait-il affirmé. Journaliste, diplomate et grand serviteur de la culture, feu Mohamed Benaïssa était un ami des intellectuels et des artistes, entre autres, Melehi.
«Les artistes tels que Belkahia, Miloud Labied, Kacimi, le groupe de Casablanca qui est devenu le groupe d’Assilah, en 1978, ont fait la première peinture murale dans la ville. C’est Melehi aussi qui a eu l’idée de faire la première exposition dans un souk à Jemaa El-Fna. Il était à mon sens, un pédagogue avec une pédagogie assez particulière.», avait-il souligné.
Né en 1937 à Asilah, la trace de feu Mohamed Benaïssa, son parcours exceptionnel, son legs et son amour inébranlable pour la culture restent indélébiles.