La troupe Fowé, un air de famille

Imenza n Tlelli, sort son premier album intitulé sobrement “Akez awal !” (Saisis la parole !). Il comprend sept titres : Akez awal (Saisis la parole), Yuda (ça suffit !), Tawada (La marche), Lumière des ténèbres, Taγufi yucckan (Saveur disparue), Imezdaγ (Les habitants) et Rwaḥ, rwaḥ (Viens, viens !).
De la poésie de Fowé et de son statut de poète Intime, social et politique, les paroles des chansons de Fowé deviennent l’écho du réel. En réaction aux commodités relatives à la forme, la poésie de Fowé n’a de forme qu’elle-même. Cette mutation n’ôtera certainement pas la vitalité à sa poésie. Au contraire, elle la rendra plus intense et surtout plus proche des gens.
La tradition biblique consistant à s’adresser directement à Dieu, voire à échanger avec lui, traverse l’œuvre de Fowé. Akez awal, cette chanson qui porte d’ailleurs le nom de l’album, en est l’illustration. Le poète part d’un constat simple : les relations humaines sombrent dans la folie du mensonge ; une situation face à laquelle on est souvent démunis et que le poète traite en appelant à l’amour et à l’entraide sociale, deux valeurs profondément ancrées dans la culture amazighe.
G ddunit-a γas tiḥellal  : Inondée de mensonges est cette vie
G ddunit-a γas tikerkas  : Que du mensonge dans cette vie
Kwnni tessendum awal  : Comme du lait vous baratez la parole
Kwnni tzuzzurem awal  : Comme du blé vous répandez la parole
Awesat-aγ a ayetma  : Aidez-nous, ô frères !
Awsemt-aγ a isetma  : Aidez-nous, ô sœurs !
Id is tsuld ad talid  : Est-ce que tu vas encore te lever
A tafuyt lliγ nettiẓir  : Ô ! Soleil d’antan

Penser l’œuvre de Fowé nous amène à réfléchir sur le statut du poète-musicien. Au fait, deux images s’avèrent attribuables à Fowé. Victor Hugo distingue le poète des artistes qu’il ne cesse de traiter de “chanteurs inutiles”  ou encore de “faux sages” dont il condamne l’individualisme. Or, la poésie de Fowé est utile à la communauté. Inquiet, il sillonne les ruines en cherchant des solutions aux problèmes qui rongent son territoire.  L’image de l’élu peut être également attribuée au poète, car celui-ci se prend pour un prophète et parle en son nom. Il s’adresse à tous ceux qui ne parlent pas, médite et prédit l’avenir. Dans cette perspective, le poète va jusqu’à se familiariser avec Dieu. Ce poète à rôles multiples sert de repère car il éclaire l’avenir et agit pour tous. Il est également similaire au Christ dans la mesure où il souffre pour les siens. Signalons, au passage, que la fonction du médiateur demeure la fonction la plus privilégiée qui soit pour Fowé.

Deux frères, une sœur, un groupe

Ce groupe, qui se compose de deux frères et une sœur, est issu d’une famille d’artistes. Hamou Kémous, ce belgo-amazigh qui, musicien et graphiste, est l’oncle du trio Fowé, Boutayeb et Jazya, les co-fondateurs du groupe musical. Ceux-ci ont aussi pour oncle le sculpteur Addi Kemous dont les sculptures exposées dans sa maison récemment transformée, par ses soins, en musée attestent de la qualité artistique de ses œuvres. L’idée qu’un musicien du Sud-est implique ses frères ou sœurs dans un groupe de musique nous rappelle essentiellement Moha Mellal qui a incité sa sœur et sa nièce à créer leur propre groupe, en l’occurrence Tifa. Par cet album dont la maquette est fusionnée au portrait de la maman des fowés band, le groupe musical rend hommage à la femme amazighe en faisant de Jazya l’incontournable choriste du groupe.

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