Jeunes et participation politique

Rachid Roukbane: «La jeunesse a développé sa propre manière de faire de la politique»

«Le désintéressement des jeunes à l’action politique est le résultat de plusieurs variables qui sont d’ordre structurel», ont souligné les participants à la table ronde ayant eu lieu  samedi 21 décembre à Casablanca et initiée par la délégation Hay El Hassani de l’Organisation Scout Jawal et la section locale de la Jeunesse socialiste.

Il va sans dire, selon les participants, que la désaffection des jeunes doit être comprise dans  un sens global loin des approches réductionnistes.

Prenant la parole, Rachid Roukbane, membre du bureau politique du Parti du progrès et du socialisme (PPS), a mis l’accent les facteurs exogènes qui pourraient constituer une véritable menace pour la stabilité du pays, faisant allusion dans ce sens au discours royal prononcé en 2016 lors du sommet Maroc-Pays du Golf à Ryad, où le Souverain a relevé les défis qui guettent la région, vivant «au rythme de tentatives de changement de régimes et de partition des Etats, comme c’est le cas en Syrie, en Irak et en Libye…».

Le conférencier a tenu de souligner que l’action politique est un concept polysémique et que les sirènes d’alerte  faisant état d’une rupture entre les jeunes et l’action politique, doivent être mises en sourdine. Pour le militant du PPS, Il est vrai que cette catégorie sociale boude le champ politique actuel, mais en parallèle elle  a développé sa propre manière de faire de la politique autrement.

Selon l’intervenant, la  conscientisation des jeunes à l’égard de l’action politique n’a cessé de prendre l’ampleur ces dernières années et a pris d’autres formes d’expression qui s’inscrivent aux antipodes des pratiques traditionnelles. Cela étant, a-t-il insisté, les jeunes sont omniprésents dans l’espace public et expriment leurs revendications par d’autres moyens, tels  les slogans scandés dans les stades de football, des chansons véhiculées sur les réseaux sociaux, ou encore d’autres formes protestataires, tel les mouvements de boycott, entre autres tout en rappelant les multiples mouvements de protestation sociale qu’a connus le Royaume dans plusieurs régions, notamment au Rif, Jerada, Zagora.  Des expressions sociales qui sont parfois spontanées voire non-encadrées et peuvent avoir des conséquences perverses, a-t-il noté. Et la solution pour le docteur en science politique, consiste d’abord  à faire preuve d’empathie afin de comprendre les revendications des citoyens et trouver, par conséquent, une issue de sortie.

Pour ce faire, les décideurs sont dans l’obligation de réunir les conditions permettant une mutation économique, a-t-il indiqué.  Autre point non moins important, consiste à entamer une véritable dynamique de démocratisation du champ politique, une condition sin qua pour  faire aboutir l’ensemble des réformes, a-t-il martelé. Abondant dans le même ordre d’idées, Rachid Roukbane a mis en garde contre les campagnes systématiques menées par certains médias visant le dénigrement  de l’action des partis politiques et la diabolisation des élus de nation. «La stabilité du pays requiert le renforcement du front intérieur pour faire face aux menaces extérieures dans le dessein d’assurer la stabilité du pays. L’intérêt suprême de la nation oblige!», a-t-il asséné.

Un discours direct et innovant

Malheureusement, certains partis obsédés par la logique électoraliste n’ont fait qu’aggraver la situation en inspirant de la répugnance aux citoyens, a-t-il noté en substance. Il faut dire, selon le conférencier, que  la réhabilitation de l’action politique nécessite un souffle démocratique nouveau et un champ politique doté de partis politiques  forts, automnes et maitres de leurs décisions, a-t-il conclu.

De son côté,  Abdelkebir Khchichen, membre du bureau national de l’Union socialiste des forces populaires (USFP), s’est attelé dans son intervention sur les handicaps entravant l’adhésion des jeunes aux partis politiques. En fait, selon une étude réalisée récemment, 70% des jeunes interviewés ont exprimé un désintérêt total à l’action politique, alors que seulement 5% ont manifesté un avis favorable. Pire encore, 80% des jeunes ont rejeté catégoriquement l’idée d’intégrer un parti politique, a-t-il fait savoir. Pour le militant de l’USFP,  «l’absentéisme politique» des jeunes demeure une responsabilité partagée entre l’Etat et les partis politiques. Ces derniers, à cause des guerres intestines ont crée un hiatus abyssal entre les jeunes et le champ politique, a-t-il noté. Qui plus, certaines associations de la société civile, au nom de la démocratie, ont créé une image négative chez les jeunes, en s’acharnant sans cesse à dénigrer les structures politiques et tirer à bouler rouges sur les acteurs politiques, a-t-il fait constaté. Pour  lui,  les partis politiques doivent se livrer à un exercice d’autocritique afin de dresser le bilan et établir les mesures qui s’imposent, à commencer par l’adoption d’un discours politique direct et innovant, sans ambages ni tergiversations.

Khalid Darfaf

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