Forum de débat thématique du PPS

Pour une politique d’industrialisation volontariste, réfléchie et collective

La mise en place d’un nouveau modèle de développement est tributaire d’une stratégie réfléchie et volontariste visant la promotion du processus d’industrialisation du pays. Telle est la conclusion de la rencontre-débat organisée au siège du PPS à Casablanca sous le thème «La politique d’industrialisation au Maroc : bilan et perspectives».

Cette manifestation s’inscrivant dans le cadre des forums de débat thématique sur le modèle de développement lancés par le Parti du progrès et du socialisme (PPS) après la tenue de l’Université annuelle, a été marquée par la participation d’Abdelouahed Souhaïl,  membre du Bureau politique (BP) du Parti et Adnane Lamdaouar, directeur d’entreprise et ancien membre de la FIMME. C’est Ahmed Zaki, également membre du BP du Parti qui a assuré la modération de cette rencontre. Dans son intervention, le modérateur a mis l’accent sur l’importance d’enrichir le débat afin d’élaborer la vision du Parti quant au modèle de développement susceptible de placer le pays sur la voie du progrès.

Il faut dire, selon l’intervenant, que tout modèle de développement ne peut se concevoir que dans un environnement politique plus ouvert et favorable à la démocratie, la liberté et la justice sociale.  Ce modèle devrait également transformer le pays en un réel chantier de travail et d’innovation tout en répondant à la question sociale.

Abdelouahed Souhaïl : pour une  stratégie réfléchie

D’emblée, Abdelouahed Souhaïl a considéré que l’industrialisation est un levier fondamental du développement du pays. D’ailleurs, tous les pays qui ont réussi à booster leurs économies ont placé l’industrie au cœur de leurs stratégies de développement, a-t-il confirmé. Or, force est de constater que le Maroc, de 1967 jusqu’à 2017, a été confronté à une croissance discontinue et irrégulière  et ce, en enregistrant un taux moyen s’élevant à 4,68%. Abondant dans le même ordre d’idées, l’économiste du PPS a souligné que le taux de la valeur ajoutée de l’industrie secondaire a connu une nette régression, passant de 35% en 1975 à 24,24% en 2009. Même constat pour le secteur de l’agriculture dont la contribution au PIB national s’est élevée à 15,42% en moyenne annuelle.

Ce constat s’étend également au secteur des industries de transformation dont la contribution à la production nationale. Cette dernière a été revue à la baisse, passant de 20,16% en 1984 à 15,16% en 2009. Soit une moyenne annuelle de 17,3% depuis 1965. L’ancien ministre du Travail a évoqué par ailleurs les facteurs de blocage du processus d’industrialisation, à savoir l’écart technologique, l’accès au marché et les ressources humaines compétentes.  «Il faut procurer à l’industrialisation une place de choix en l’intégrant dans le processus de développement pour atteindre un effet d’entrainement», a-t-il déclaré avec insistance. Le conférencier a passé en revue l’historique des politiques d’industrialisation adoptées par le Maroc depuis l’indépendance, notamment dans le secteur de l’agriculture et ce, à travers l’adoption de la planification, passant par le plan d’émergence jusqu’au plan actuel d’accélération industrielle. Cependant, cela n’est point suffisant. En fait, selon lui, la création de nouveaux secteurs n’a pas permis de créer d’emplois nécessaires permettant d’absorber le chômage.

Cela a plutôt débouché sur ce qu’il a désigné par une «destruction destructive».  Et pour cause, les programmes adoptés ont accusé beaucoup de retard en matière d’exécution et n’ont pas pu se hisser en tant qu’alternative par rapport à d’autres secteurs. Arguments à l’appui, le militant du PPS a évoqué l’engagement du gouvernement à créer 500.000 emplois industriels à l’horizon de 2020 alors qu’étant à la veille de 2019, on est loin de ces objectifs.

En fait, a-t-il laissé entendre, «il s’agit de plans tirés sur la comète». Autrement dit, l’industrialisation n’est pas un pari, il s’agit d’une stratégie réfléchie de manière collective. Des politiques industrielles dotées d’un avantage concurrentiel, compétitives, basées sur la promotion de la recherche scientifique, la qualification des ressources humaines et des espaces urbains aménagés à cette fin.

Adnane Lamdaouar: La métallurgie socle du développement

De son côté, Adnane Lamdaouar, industriel et membre du FIMME, a axé son intervention sur l’industrie métallurgique en tant que socle du développement industriel en général.  Pour le lauréat de l’Université de Stanford, le Maroc fait recours annuellement à l’importation d’environ 30 milliards de dirhams de produits sidérurgiques et métallurgiques. Ce qui impacte négativement la balance commerciale, a-t-il  martelé.  En termes plus clairs, sur les 30 milliards de DH, la matière première se situe à hauteur seulement de 12 milliards alors que la valeur ajoutée représente 18 milliards, soit l’équivalent de 120 000 emplois directs.

Encore plus, si l’Etat s’attelle au développement d’une industrie métallurgique intégrée, en procédant à la promotion d’une industrie métallurgique, on va diminuer davantage les importations dans plusieurs secteurs, notamment dans le bâtiment, le secteur agricole ou ferroviaire, a-t-il indiqué. Le conférencier a ainsi donné l’exemple de l’expansion de l’industrie du câble et qui pourrait constituer également une aubaine pour le marché local et celui africain. Autre point non moins important souligné par l’intervenant, celui de l’exportation des déchets industriels, sachant que beaucoup de pays développés ont interdit catégoriquement cette mesure, car il s’agit de produits déjà finis et non-polluants. Sachant que le recyclage de ces produits représente une valeur ajoutée potentielle pour l’économie nationale, soit une diminution du déficit de la balance commerciale de plus de 1,2 milliard de dirhams. Pour l’entrepreneur, l’industrialisation exige une vision à long terme à travers la mise en place d’un modèle circulaire, local et « low cost » afin d’assurer une certaine compétitivité.

Nabil Benabdallah: L’industrie est la priorité des priorités

Notons par ailleurs que cette rencontre a été marquée par la présence de Mohamed Babil Benabdallah,  SG du PPS, qui dans son intervention a appelé les acteurs politiques à porter le débat  sur les politiques publiques dans l’espace public. Le leader progressiste a souligné que la réussite du modèle de développement économique passe inévitablement par un processus d’industrialisation devant être considéré comme la priorité des priorités avec évidemment la contribution de tous les acteurs: gouvernement et partis politiques autonomes capables d’assumer leurs responsabilités.

Même son de cloche pour Abdelali Doumou, membre du Comité Central du PPS, qui s’est interrogé sur l’absence d’une politique publique dédiée à l’industrialisation. Selon le professeur universitaire, la réponse est simple : un système économique basé sur la rente ne peut favoriser une option d’industrialisation. D’ailleurs, a-t-il ajouté, les politiques publiques adoptées ont favorisé à travers des mesures incitatives, d’autres secteurs notamment l’agriculture et le bâtiment au détriment de l’industrie.

Cette rencontre a été aussi marquée par la participation de plusieurs membres du BP, en l’occurrence Rachid Roukbane, Aicha Lablaq et Rachida Tahiri.

Khalid Darfaf

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