Propos recueillis par Mohamed Nait Youssef
Agnès Varda, «La grande dame» de la nouvelle génération comme beaucoup de gens aimaient l’appeler, a reçu dimanche 2décembre, la prestigieuse Etoile d’Or du Festival en signe de reconnaissance à son parcours exceptionnel. Après Robert De Niro, c’était le tour cette figure de proue du cinéma français et mondial pour monter sur scène et récompenser son œuvre. Elle est venue, Maroc, plus exactement à Marrakech, après une longue absence. Elle en garde, en revanche, des souvenirs de sa première visite à la cité ocre et les films qu’elle avait présentés. Rencontre.
On aurait aimé lui poser cette première question : son rapport au Maroc, à son cinéma et ses artistes. Agnès Varda rentre directement dans le vif de sujet en parlant spontanément et volontairement du Maroc et de Marrakech…
Agnès Varda : Je suis venue au Maroc il y a longtemps, il y a 50 ans au club Med qui est un magnifique endroit à Marrakech, tout près de la grande place. À l’époque, il a été fait par des artisans. C’était très beau parce qu’il mettait en valeur ce que le Maroc avait entre autres en artisanat… J’étais venue avec Jacques Demy parce qu’il nous avait demandé de présenter son premier film «Lola».
Par la suite je suis venue présenter mes films quelques fois invitée par les marocains ou par les services culturels français. Je suis venue au festival de Marrakech dans ses débuts en 2001, 2002. J’ai toujours rencontré un public marocain plutôt sympathique à mes films, plutôt ouvert à mon cinéma qui est portant qui ne rapporte pas d’argent. Je ne fais pas un cinéma qui marche, mais il est retenu parce que je crois que le public participe à ce que je proposais. En effet dans le film Cléo de 5 à 7 montré ici, raconte l’histoire d’une femme qui attend les résultats de l’examen médical, j’aborde la question du temps, le temps objectif, le temps qui ne bouge pas, une autre façon de voir le temps. Ce sont un peu ces sujets où il y a un peu de pensée au-delà du récit. Quand j’ai fait le Bonheur (1965), j’exaltais la couleur, la beauté de la nature. Ici on est gâté au Maroc avec sa nature fascinante.
Les gens se posaient des questions en regardant les films. Et c’est une bonne chose ! J’ai fait un film sur Jacques Demy qui m’avait raconté ses souvenirs d’enfance. En fait c’est un film qui raconte comment ce désir du cinéma peut arriver très tôt chez un enfant. Ce sont des sujets qui ont un rapport avec la vie, avec le cinéma. Le dernier documentaire que j’ai fait et qui est présenté ici «visages villages» repose sur l’idée d’accepter sa propre image. Effectivement, n’importe quelle personne mérite une grande image, et c’est ce que nous pensons parce qu’on les voit grands d ans notre cœur.
Dans le documentaire plus précisément, vous préférez le dialogue au lieu du questionnaire. Pourquoi ce choix?
C’est une rencontre. Les gens s’expriment. C’est si il s’agissait de questions /réponses ça va ne mènent à rien. Et à l’occasion d’une rencontre, ils ont l’occasion de dire qu’est ce qu’ils ont à exprimer comme une dame qui nous a demandés à l’usine qu’est que être artiste ? On lui expliquait que nous, on essaye d’exprimer nos rêveries. Et on n’est pas si sérieux que les gens qui y travaillent. On n’est pas des ouvriers du cinéma. la photographie en passant par le cinéma, puis l’installation. Pour quoi ce changement du support ? Est-il un choix esthétique ou une nécessité pour braquer les lumières sur ce que vous pensez, sur la société d’aujourd’hui ?