Au cours du point de presse de ce mardi 29 Janvier 2019, le porte-parole du Haut-Commissariat des Nations-Unies pour les Réfugiés (HCR) à Genève a fait savoir, qu’en l’espace de quarante-huit heures, quelques 30.000 personnes ont fui la ville de Rann, au nord-ouest du Nigéria à la frontière avec le Cameroun.
Cette fuite a fait suite au retrait des soldats nigérians et au départ, ce dimanche, des troupes camerounaises qui y avaient été déployées après que le 14 janvier dernier, le groupe terroriste Boko Haram y avait tué 14 personnes, attaqué une base militaire et incendié la ville où avaient trouvé refuge quelques 35.000 déplacés.
Il y a lieu de rappeler que, de 2009 à ce jour, les incessantes attaques de Boko Haram, qui ont visé essentiellement l’Etat de Borno nord-est du Nigéria, ont fait plus de 27.000 morts et provoqué une grave crise humanitaire.
Engagé aux cotés de l’armée nigériane un milicien ayant requis l’anonymat a déclaré à l’AFP : «Nos troupes au sol sont également parties parce que leur nombre était très réduit» avant d’ajouter que «les terroristes ont incendié la plupart des maisons en ville et ont pris des positions stratégiques anticipant une éventuelle opération militaire pour les déloger».
Selon un civil nigérian ayant fui au Cameroun, «il n’y a plus un seul habitant à Rann. La ville est actuellement sous le contrôle des combattants de Boko Haram» qui y sont entrés lundi sans rencontrer de résistance.
Selon le représentant d’une ONG de défense des droits humains «les combattants tiendraient deux postes, l’un dans la ville et l’autre à la frontière (avec le Cameroun). Ils abattent tout homme qui essaie de traverser la frontière. Ils molestent les femmes et les libèrent ensuite ».
Force est de reconnaître que ces dernières années la sécurité s’est particulièrement dégradée au Nigéria. Les soldats nigérians qui étaient parvenus en 2015 à chasser les jihadistes des territoires qu’ils contrôlaient sont, désormais, aussi fatigués que démoralisés notamment après que le groupe terroriste ait changé son fusil d’épaule en adoptant des «tactiques de guérilla» auxquelles ils ne peuvent plus répondre si bien qu’ils sont très souvent acculés à se retirer sans même prendre la peine de combattre et parfois même en laissant leurs armes derrière eux.
En Août dernier plusieurs centaines de soldats nigérians avaient envahi le tarmac de l’aéroport de Maiduguri en tirant en l’air pour faire savoir qu’ils étaient épuisés après quatre années passées dans la ligne de front.
A moins de trois semaines du scrutin qui, le 16 Février prochain, doit permettre à quelques 84 millions de Nigérians de choisir leurs conseillers municipaux, leurs députés et, surtout, celui qui succèdera au Président Muhammadu Buhari, lui-même candidat à sa propre succession, se pose la question de savoir comment ces élections pourront être organisées dans les zones touchées par la violence alors même que plus de 1,8 millions de personnes ne peuvent toujours pas rentrer chez eux. Quoiqu’il en soit, attendons pour voir…
Nabil El Bousaadi