Salim Hilali et la musique judéo-maghrébine : L’artiste à l’identité plurielle

Le chant d’une guitare et puis mon âme change Je n’ai plus de parents Ici je n’ai que des frères et des sœurs de cœur… Mon pays c’est l’amour et j’aime avec outrance les enfants des faubourgs…»

Salim Hilali (né Shlomo ou Simon Halali le 30 juillet 1920 à Bône – décédé en juillet 2005 à Nice) est un interprète de musique arabo-andalouse. Il influencera des générations d’artistes judéo-arabes comme Sami El Maghribi. Il est l’auteur et interprète des célèbres chansons comme «Mahani Zine Ya Laamar», «Mine Al Barah Wa Lyoum», «Al Aïn Zarga», «Mounira Ya Mounira». Des chanteurs et des musiciens qui ont été formés à son école ont tous rejoint la RTM au début de l’indépendance et ont constitué la base de son orchestre. De grands artistes marocains, comme Hajja Hamdaouya, Omar Tantaoui, Latifa Amal et Saddika ont été formés par lui. Ses chansons font désormais partie du répertoire de la chanson populaire marocaine. Il chantait indifféremment en français, en espagnol, en dialectes marocains, tunisiens et algérien de l’est.

Un parcours impressionnant

Il naît le 30 juillet 1920 à Bône (Annaba), à la frontière algéro-tunisienne au sein d’une famille de boulangers Juifs, originaire de Souk Ahras qui est le berceau d’une des plus grandes tribus Chaouia, les Hilali. Son père est d’origine turque et sa mère (Chalbia) une judéo-berbère d’Algérie.
En 1934, à 14 ans, il quitte sa famille pour traverser la Méditerranée et se rend à Marseille. A l’occasion de l’exposition universelle de 1937, il monte à Paris pour y débuter une carrière de chanteur de charme espagnol.
Sa rencontre avec Mohamed El Kamal et Mahieddine Bachtarzi fut décisive. Ses deux maîtres l’initient au chant arabo-oriental, l’intègre à la troupe «Al Moutribia», fondée par Edmond Yafil, pour une grande tournée dans les capitales européennes.
C’est à Paris qu’il rencontre Mohammed Iguerbouchen, fondateur du Cabaret Al Jazair, rue de la Huchette, et génie de la musique, qui lui composa des morceaux à sa mesure. Son étoile ne cessa de briller depuis. Ses disques connaissent des ventes record et deviennent, dans l’effervescence des années quarante, «la coqueluche des radios d’Alger, Tunis, Rabat et Tanger qui passaient, en boucle, ses chansons…», se souvient Nina Banon, l’une des premières journalistes marocaines de radio Tanger.
Au sommet de sa carrière, il s’installe au Maroc en 1949, dans l’ancienne Médina de Casablanca, il se présente au Coq d’Or, un prestigieux music-hall oriental de l’ancienne médina et qui attirait de nombreux touristes à l’époque. «Le Coq d’Or» avec six salons décorés de draperies tissées d’or et de meubles Louis XV authentiques était l’un des plus somptueux cabarets du monde de l’époque où se sont produits des artistes prestigieux comme Mohamed Fouiteh, Hajja Hamdaouia, Maâti Belkacem, Line Monty, Blond Blond, Lili Boniche, Chafia Rochdi, Latifa Amal, Warda Al Jazairia, Raoul Journo…
Ce fut l’époque de la convivialité et de la symbiose judéo-arabe, évoquées, avec nostalgie, par Mohamed Maradji dans son livre «Salam Shalom», publié dans les années 70.
En ami, il sauvegarde la mémoire iconographique de l’artiste et possède, comme relique, l’une de ses fameuses darbouka. Salim Halali ne quitte le Maroc qu’au début des années 60 pour s’installer sur la Côte d’Azur. En 1970, il se lance dans une carrière en France, investit dans de ruineux studios faisant venir les meilleurs musiciens du monde arabe, se produit à la salle Pleyel avant de se retirer, une deuxième fois, à Cannes pour se consacrer à sa passion d’antiquaire, de collectionneur de tapis persans, bibelots et autres objets d’art…
Ainsi fut Salim Hilali : Un artiste total, esthète, décalé et hédoniste. Ce cosmopolite aux identités multiples, a fini ses jours, début juillet 2005, dans l’anonymat et l’indigence, dans un hospice de Vallouris près de Nice.

http://musique.arabe.over-blog.com/article-18899530.html

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