Le sens de l’écriture et la rencontre de l’Autre

Entretien avec Fayrouz Fawzi

Par Noureddine Mhakkak

Dre Fayrouz fawzi, Phd en sociologie d’immigration et chargée de cours en sociologie de l’immigration. Professeure et consultante en droit d’immigration à Montréal. Poètesse et  Conférencière, praticienne de la performance Neuro-Linguistique. Co-fondatrice et porte parole Collectif des auteurs de la diaspora arabe et berbère de Montréal. Elle a fondé l’Institut de Recherche Canado-Marocain des Études et des Recherches sur l’Immigration et l’Interculturalité (ICER2I), qui a pour mission de promouvoir la dimension académique et de recherche en matière de l’immigration, l’interculturalité et les politiques migratoires. C’est un centre de recherche, de réflexion, d’étude et de formation sur l’immigration internationale des individus, des groupes et des minorités issus des pays arabes, des pays d’Afrique du Nord et de l’Afrique sub-saharienne.

Que représentent les arts et les lettres pour vous?

L’Art fait partie intégrante de ma vie quotidienne. L’art me procure la force sereine pour transformer mes rêves invisibles en image et action visible. J’aime beaucoup la citation de Corbusier qui a dit : «L’art est la manière de mettre les choses en ordre, à leur place, à leur mesure».

En tant que poétesse par l’art des mots, le poète révèle, transmet, confie, enseigne et inocule. La tâche n’est pas mince et l’éloquence est de mise.  De ce fait, ce qui importe n’est pas pour autant ce qu’est l’art, mais sa fonction contemplative.

La littérature est aussi soumise à un autre concept, soit celui du poète, car en effet, la littérature est le travail, l’art du poète. Paul Valéry dit tout simplement que «la littérature n’est qu’un développement de certaines des propriétés du langage» élaborées par un écrivain. La littérature ne se situe pas dans le livre ou dans la lecture mais dans la relation entre l’écriture et la lecture, dans la transformation, le transfert, dans l’action et l’engagement.

Que représente l’écriture pour vous?

L’écriture  pour moi est une façon d’aller à la rencontre de soi. Ecrire est une forme de résistance, une force. L’acte d’écrire pour moi  est indissociable de la vie, restaurant en cela l’idée de l’écrivain totalement engagé dans son existence. La vision de l’écrivain est rapportée dans l’écrit, transfigurée.

Parlez nous des villes que vous avez visitées et qui ont laissé une remarquable trace dans votre parcours artistique.

Parmi les villes qui m’ont marqués, ma ville natale Casablanca. Mon amour pour Casablanca n’est pas aisé à décrire. J’ai une relation émotionnelle avec la ville de Casablanca. En grandissant, j’ai réalisé à quel point Casablanca est d’abord un musée, un musée à ciel ouvert. Je suis toujours fascinée  par la puissance de la ville.

La deuxième ville qui m’a marqué c’est la perle rouge ou bien la ville soleil: Marrakech qui est un savant mélange, parfaitement équilibré, entre authenticité et modernité, un patrimoine culturel. Je souligne ainsi la beauté de la médina qui est un véritable labyrinthe dans lequel on se fera un plaisir de se perdre.

Que représente la beauté pour vous?

Le beau est d’abord et avant tout un sentiment, un affect. Tout ce qui est beau me stimule et m’éclaire, parvenant ainsi, à réconcilier la sensibilité et l’intelligence. Le beau produit une émotion esthétique. Kant affirme que le beau symbolise la moralité, ce qu’il nomme « symbole » désigne une ressemblance parfaite entre deux relations : celle qui existe dans la beauté, et celle qui existe dans la moralité. Je trouve que le sentiment du beau, n’est intelligible que comme un certain rapport : le rapport du sujet intentionnel à un objet de la perception.

Parlez nous des livres que vous avez déjà lus et qui ont marqué vos pensées.

Parmi les livres qui ont marqué ma pensée, l’œuvre de Jacques Derrida :  «Sur parole : Instantanés philosophiques». Ce livre nouséclaire sur l’émergence d’un nouveau monde. Comment penser le mensonge en politique ? Pourquoi le pardon n’est envisageable que s’il y a de l’impardonnable ? La justice est-elle inséparable du droit ? Tels sont les thèmes qu’il développe le livre.

Le deuxième livre qui avait une influence considérable sur mon choix pour  faire un  Master  en genre, société et culture, l’essai existentialiste et féministe de Simone de Beauvoir qui s’intitule: «le Deuxième Sexe». Ce livre défend la thèse suivante : l’inégalité homme/femme est historiquement et idéologiquement construite.

Le troisième livre s’intitule : «Le pouvoir symbolique de la langue» de Pierre Bourdieu qui nous dit plus loin qu’en politique « dire c’est faire», c’est plus exactement se donner les moyens de faire en faisant croire que l’on peut faire ce que l’on dit.

Bourdieu explique que le pouvoir symbolique est un pouvoir invisible qui ne peut s’exercer qu’avec la complicité de ceux qui ne veulent pas savoir qu’ils le subissent ou même qu’ils l’exercent.

En effet, le pouvoir des mots réside dans le fait qu’ils ne sont pas prononcés à titre personnel par celui qui n’en est que le porteur et que sa parole concentre le capital symbolique accumulé par le groupe qui l’a mandaté et dont il est le fondé de pouvoir.

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