Pour Netanyahu, une élection sans l’appui de la Maison Blanche

Elections Israëliennes

Trump reconnaît Jérusalem comme capitale d’Israël, Trump défend les colonies juives en Cisjordanie, Trump soutient les vues israéliennes sur le Golan… Pour ces nouvelles élections, Benjamin Netanyahu a perdu un appui de taille: celui d’un président américain.

Lors des trois dernières élections, des affiches géantes le long des routes israéliennes montraient Benjamin Netanyahu au côté de Donald Trump, le Premier ministre israélien jouant à fond la carte de sa proximité avec l’ex-président américain, qu’il a qualifié de « meilleur ami » que l’Etat hébreu n’ait jamais eu à la Maison Blanche, pour se faire réélire.

Mais M. Trump n’a pas été réélu en novembre dernier. Et M. Netanyahu mène sa campagne en vue des législatives du 23 mars — les quatrièmes en moins de deux ans — dans un pays politiquement déchiré, sans l’appui direct d’un président de la première puissance mondiale.

Car si les Etats-Unis défendent Israël, l’administration Biden, elle, cherche à garder la plus grande distance face à ces nouvelles élections, estiment des analystes interrogés par l’AFP.

« La présence de l’administration américaine est minimale », en comparaison aux dernières campagnes, note Tamar Hermann, professeure de sciences politiques à l’Université libre d’Israël. « Netanyahu disait encore récemment à ses partisans, ‘regardez, quand je le veux, je n’ai qu’à toquer à la porte de la Maison Blanche et la porte s’ouvre' », dit-elle.

Après son arrivée au pouvoir le 20 janvier, Joe Biden a attendu un mois avant de s’entretenir avec Benjamin Netanyahu, un détail qui n’était pas passé inaperçu dans la presse israélienne.

« Bonne conversation », avait résumé, laconique, Joe Biden. Discussion « chaleureuse » et « amicale », avait commenté de son côté M. Netanyahu.

Joe Biden a déjà dit qu’il allait garder l’ambassade américaine à Jérusalem, et non la rapatrier à Tel-Aviv, qu’il allait maintenir les accords de normalisation des relations entre Israël et des pays arabes (Emirats, Bahreïn, Soudan, Maroc) favorisés par Donald Trump.

Et son administration s’est opposée à la décision de la Cour pénale internationale (CPI) d’ouvrir une enquête pour des « crimes de guerre » présumés commis par Israël dans les Territoires palestiniens.

Mais Joe Biden a aussi promis de tenter de remettre sur les rails un accord sur le nucléaire avec l’Iran, au grand dam de Benjamin Netanyahu, et de restaurer les relations diplomatiques avec les Palestiniens.

Si les deux septuagénaires se connaissent depuis des décennies, leur relation a pris un dur coup lorsque Joe Biden était vice-président sous Barack Obama, qui avait tenté de convaincre Israël d’un gel de la colonisation en Cisjordanie occupée, qui a par la suite connu un essor pendant le mandat de Donald Trump.

Lors d’une visite officielle à Jérusalem du vice-président Biden, Israël avait annoncé la construction de 1.000 nouvelles unités de logement dans des colonies, considérées comme une violation du droit international.

« Il n’y a pas d’amour pour Netanyahu dans l’administration (Biden) et chez les élites démocrates », estime Shibley Telhami, spécialiste de la politique étrangère américaine à l’Université du Maryland. « Mais leur problème à l’heure actuelle est que les alternatives (à Netanyahu) sont presque aussi mauvaises », du point de vue démocrate.

Les derniers sondages en Israël créditent le Likoud (droite) de M. Netanyahu de la première place, suivi de Yesh Atid (« Il y a un futur », centre) de Yaïr Lapid et des formations conservatrice et de droite radicale dirigées par Gideon Saar et Naftali Bennett.

Or Mark Mellman, qui a déjà joué les stratèges pour de nombreux démocrates américains conseille le centriste Yaïr Lapid qui, dit-il, partage les positions en règle générale de Joe Biden.

Pour David Makovsky, du Washington Institute for Near East policy, la scène politique israélienne est à ce point fragmentée que même les alternatives à Benjamin Netanyahu pourraient ne pas pouvoir se maintenir longtemps au pouvoir.

Ses opposants (MM. Lapid, Saar, Bennett) « veulent tous en finir avec Netanyahu », « cela pourrait les rassembler pour le premier mois, mais sur quoi vont-ils s’entendre par la suite? », dit-il.

Pour Dan Shapiro, ambassadeur américain en Israël sous Barack Obama, l’administration Biden n’aura au final d’autres choix « que de travailler avec quiconque émerge » à l’issue des élections.

« Mais si on regarde les choses d’un point de vue plus global, la priorité du président Biden n’est de toute façon vraiment pas le Moyen-Orient », explique-t-il, en référence entre autres aux effets de la pandémie aux Etats-Unis.

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