Vaccins anti-Covid et espoir d’un retour à la «vie normale»

Point de vue

Par Pr. Hamid LAKHIARI, Ph.D. en Génie Biologique & Médical FST Mohammedia, Université Hassan II de Casablanca Membre du Bureau National du Secteur de l’Enseignement Supérieur du PPS.

Le démarrage de la compagne de vaccination fin 2020, a fait naitre l’espoir de pouvoir reprendre une vie normale dans un délai raisonnable. Ces perspectives favorables étaient fondées sur la perspective de construire assez rapidement une immunité de groupe grâce aux vaccins, soit par la vaccination, ou une immunité induite par une exposition passée au virus.

Des études ont montrés que l’immunité induite diminue avec le temps et perdure entre 6 à 8 mois. Il reste donc la vaccination comme seul moyen pour acquérir une immunité de groupe durable. Mais c’était sans compter sur l’apparition de nouveaux variants. Le déploiement de la vaccination contre la Covid-19 bute dans le monde entier sur plusieurs obstacles. – Certains variants se comportent presque comme de nouveaux virus, contre lesquels les vaccins ne peuvent offrir qu’une protection partielle. Par ailleurs, l’ampleur ou la rapidité de la propagation favorise l’apparition possible de nouvelles mutations (dont le dernier a été identifié en Inde) contre lesquelles les vaccins actuels protègent très peu ou pas. – La biologie des coronavirus et leur évolution face au système immunitaire laissent penser que la protection fournie par les vaccins ne serait pas permanente. Les scientifiques sont encore dans le flou à ce sujet. L’efficacité de protection préconisée du vaccin devrait être de plusieurs mois, mais sa durée totale n’est pas encore connue. C’est pourquoi, il n’est pas exclu de faire des rappels plusieurs mois après pour assurer une protection durable. – La réduction de la transmission virale par les personnes vaccinées n’est pas évidente. En effet, rares sont les vaccins dits « stérilisants », qui empêchent totalement à un virus de pénétrer un organisme vacciné. C’est le cas, par exemple, de ceux contre la variole et la rougeole. Mais

pour la plupart des autres maladies, si les vaccins protègent très efficacement contre l’apparition de symptômes et des formes graves en particulier, ils ne garantissent pas d’une manière catégorique l’absence de la transmission de l’infection. L’immunité collective ne sera donc atteinte que si nous disposons d’un vaccin qui bloque la transmission. Autrement, le seul moyen d’obtenir cette immunité est de vacciner à tout le monde.

– Pour aboutir en toute sécurité à une immunité collective, en tenant compte des variants actuels, au moins 80% de la population doit être vaccinée. Or, en dépit d’une bonne volonté, des différents scénarios de vaccination et de la disponibilité progressive des doses en vaccins, on vaccine trop peu de personnes et seuls quelques pays atteindront la barre des 80%. Une part non négligeable de personnes ne seront pas vaccinées avant au moins 2022. – Enfin, la lenteur du déploiement des vaccins prolonge certainement la pandémie. Compte tenu de la crise sanitaire et les enjeux de santé publique, l’Organisation Mondiale de la Santé possède un moyen pour déjouer le monopole de quelques géants pharmaceutiques produisant les vaccins. L’OMS a la possibilité de faire preuve de flexibilité et permettre aux Etats de recourir à des « licences obligatoires ». Un moyen pour eux « de limiter le droit des brevets, en particulier dans le domaine de la santé publique », permettant une production accrue des vaccins par différents laboratoires pharmaceutiques. Réussira-t-on à éliminer le virus ou devra-t-on apprendre à vivre avec lui encore longtemps ? Même si nous réussissons à arrêter l’épidémie actuelle, la COVI-19 resurgira vraisemblablement de façon saisonnière, à l’instar des divers virus respiratoires, de la famille des Coronaviridae, qui réapparaissent chaque hiver. L’éradication d’un virus infectieux n’est pas tâche facile et tout semble indiquer que la COVID-19 ne sera probablement jamais complètement éradiqué. En somme, les différents vaccins devaient nous laisser entrevoir le bout du tunnel et la possibilité d’un retour à une vie « normale ». Mais quel type de normalité ce sera ? Pour l’instant du moins et sans immunité collective, il faut apprendre à vivre avec la Covid-19, en prenant les précautions et les mesures de protection nécessaires, pendant un certain temps. Nous devons donc nous préparer, de même que notre société, à y faire face le mieux possible. Le moment est venu de nous réapproprier les rênes, réparer, ré-imaginer, repenser, reconstruire, refaire, reprogrammer, réinventer… notre monde, notre économie et nous-même. Nous devons saisir le moment et définir une nouvelle “normalité”.

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