Mohamed Nait Youssef
Que c’est si beau de rêver, de jouir d’un moment artistique pur et sincère. Si beau de renouer, enfin, avec les planches après une longue rupture. C’est en effet un bonheur pur et inouï, celui que la grande et talentueuse comédienne, Sophia Hadi, a offert au public, mercredi soir au théâtre Mohammed V de Rabat, en présentant en avant première la pièce de théâtre « La femme au Colt 45 » écrite par Marie Redonnet et mise en scène par Nabyl Lahlou.
Charismatique, dynamique et majestueuse sur scène, la comédienne a incarné avec brio le rôle de Lora Sander, un personnage qui a fui son pays, l’Azirie, tombé sous la dictature, pour s’installer à la Santarie voisine, sa nouvelle terre promise. Lora a tout quitté pour recommencer une vie et effectuer un nouveau départ. Et il le faillait !
Cet exil choisi est retracé par un long monologue où le personnage revient sur sa carrière de comédienne. Elle confie à cœur ouvert ses espoirs, ses déboires, ses angoisses, son vécu, ses rapports à l’autre et à son existence.
Avec son jeu juste, sa sincérité sur scène, Sophia Hadi n’a pas seulement fait entendre la voix d’un personnage complexe, instable, profond, dynamique et insaisissable mais. Elle a également donné une âme à un texte puissant, original marqué par son imaginaire et sa profondeur existentielle. Un décor minimaliste. Mais, tout réside dans les images poétiques qui font rêver. Le personnage, quant à lui, a amené le public à son univers, ses univers imaginaires.
Ses invitations à partager son rêve de revenir au théâtre Magic sont nombreuses et multiples.
Le public y a vécu avec lui ses moments les plus intenses devant la mer, ainsi que dans ses différents espaces à la fois intérieurs et extérieurs. Le monologue était un peu long, mais la comédienne a su le guider majestueusement de bout en bout, jusqu’au bout. Sur un grand écran, la touche de Nabyl Lahlou le cinéaste y apparaît.
Des images et des répliques qui sont loin d’être des scènes de soulagement, mais il s’agit bien des relances gardant le déroulement des événements avec un rythme tantôt accéléré et accrochant. La langue était poétique. Et l’accent italien de la comédienne a rendu ce langage théâtral plus beau et séduisant.
Ainsi, les amoureux des planches ne resteront pas certainement indifférents devant cette scène où le couple Sophia Hadi et Nabyl Lahlou y jouent sur la même scène. Une courte apparition du comédien avec son fauteuil roulant. Mais toujours porteuse de signification d’un couple qui se soutient, qui œuvre pour un théâtre universel et beau, et surtout qui partage la même passion; celle des planches. Un spectacle à ne pas rater !