Le retard constaté au niveau de la promulgation de la loi organique relative à la mise en œuvre de l’officialisation de la langue amazighe ainsi que de la loi relative à la création du Conseil national des langues et de la culture marocaine est à imputer au pouvoir législatif et exécutif, embourbé dans des débats idéologiques stériles et stérilisants.
Ceci, en dépit de la volonté politique largement exprimée par le Souverain marocain et en dépit de la loi suprême qui stipule que la promulgation de ces lois ne doit pas dépasser cinq années : et nous sommes à la huitième année. La mouvance amazighe estime que ces atermoiements sont injustifiés et injustifiables et que des acteurs politiques continuent à regarder dans le rétroviseur, s’accrochent à une vision dogmatique sclérosée en matière de gestion de la diversité linguistique et culturelle, vision qui risque d’impacter la paix sociale.
L’Institut Royal de la Culture Amazighe est devenu une référence incontournable au niveau national, régional et international, par la qualité de ses travaux et de ses réalisations et pas sa contribution à l’édification d’une société plurielle, qui fait de la diversité une richesse et de la tolérance et l’ouverture sur le monde, ses valeurs fondatrices. Les nouveaux «messi» qui agissent sournoisement pour l’amputer de ses prérogatives ou réduire ses missions en nanisant ses attributions et ses acquis optent pour des choix irréfléchis qui risquent de remettre en question la stabilité du pays, d’autant plus que ces voix sont portées par des détracteurs notoires de l’amazighité, formatés par une idéologie liberticide et linguicide et dont les ravages ne se comptent plus dans le monde. La question amazighe constitue le devenir du royaume. Les problèmes identitaire, culturel et linguistique sont à la base de conflits – parfois meurtriers et sanglants- qui agitent plusieurs régions dans le monde. Ceux qui veulent empêcher les roues de l’Histoire de tourner dans la bonne direction hypothèquent le devenir du pays et de ses institutions.
L’officialisation de l’amazigh devrait « booster » l’IRCAM en renforçant ses ressources humaines, ses structures – par le biais d’une délocalisation qui s’inscrit dans le cadre de la politique de proximité tant galvaudée par nos responsables politiques – et ses prérogatives. Pour lui permettre de relever le défi de la mise en œuvre de l’officialisation de l’amazigh. Les lois organiques doivent stipuler le caractère obligatoire de l’enseignement de l’amazigh, l’obligation pour les départements de l’Etat, tous secteurs confondus, d’intégrer l’amazigh. L’amazigh doit bénéficier de mesures exceptionnelles et d’une discrimination positive qui lui permettront de rattraper le retard historique inhérent aux politiques de marginalisation, d’exclusion, de négation et de répression dont il est victime. L’IRCAM est un acquis, le seul acquis officiel. Chercher à l’amputer ou à réduire son champ d’action est une aventure dangereuse dont les conséquences sont plus qu’inquiétantes.
Moha Moukhlis, (activiste amazigh)