Par Soukaina Oumerzoug (MAP)
Dépression, insomnie, anxiété, stress aigu, perte de repères…. autant de symptômes psychologiques résultant du confinement qui semble avoir des répercussions nuisibles sur la santé mentale des confinés à cause de la propagation de l’épidémie de Covid-19.
Le confinement, un mode de vie qui a dramatiquement changé les habitudes de millions de personnes à travers le monde, se voit aujourd’hui comme étant une véritable source de frustration pour ceux qui le subissent. Pour certains, le simple fait de s’abstenir de toute activité physique à l’extérieur génère une sensation d’isolement terrible et un sentiment d’irritabilité et d’impuissance physique au fil du temps.
Plusieurs
recherches ont été menées dans ce sens afin d’explorer les effets négatifs et
indésirables du confinement sur la santé mentale. C’est le cas notamment d’une
étude qui vient de paraître dans le «Lancet» révélant que le confinement, qui
peut bien être un synonyme de réduction des contacts sociaux, a des effets
psychologiques néfastes: des confusions, des troubles de l’humeur voire un
stress post-traumatique.
Cette méta-analyse a également montré que le risque d’apparition de ces
symptômes s’aggrave avec la durée d’isolement, mais aussi avec d’autres
facteurs comme notamment l’absence d’informations ou bien la perte de revenus.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a dans ce sens émis récemment un certain nombre de recommandations afin de favoriser le bien-être de la santé mentale en cette période difficile et de mieux s’adapter à cette nouvelle donne.
Elle incite à cet égard à limiter le visionnage, la lecture ou l’écoute des flux d’informations continues à propos du Covid-19 qui provoquent de l’angoisse et de l’anxiété, à valoriser les récits et les images positifs et porteurs d’espoir à propos de personnes qui se sont rétablies suite à cette pandémie et à se réserver une ou deux fois maximum par jour pour chercher des informations actualisées.
Concernant les personnels de santé qui n’échappent pas non plus aux émotions associées au stress, l’OMS leur conseille de s’accorder des moments de repos pendant le temps de travail ou entre les roulements, de pratiquer des activités physiques, d’adopter un régime alimentaire sain en quantité suffisante et de s’éloigner de toute pratique inutile pouvant dégrader leur santé mentale et physique.
Comme la résistance au Covid19 diffère d’un individu à un autre, les symptômes psychologiques varient aussi en fonction de la personnalité et de l’environnement des confinés. C’est ce qu’a confirmé dans une déclaration à la MAP, le directeur de l’hôpital régional psychiatrique Arrazi Tit Mellil-Casablanca, Khalid Ouqezza, faisant savoir que ces effets résultent de différentes pressions auxquelles s’expose la personne durant cette période, comme la solitude, le doute, l’ennui et la peur de l’imprévu.
Ainsi, pour diminuer les effets délétères du confinement, M. Ouqeza invite les citoyens durant cette période à pratiquer du sport y compris les exercices de respiration, de contemplation et de relaxation et à privilégier notamment les communications électroniques entre les proches et les collègues, tout en évitant l’utilisation abusive des réseaux sociaux et la consommation intensive des produits à effets stimulants.
De l’avis de la psychologue Sara El Kabir, «il est tout à fait normal, dans le contexte actuel du confinement qui crée un environnement particulier, d’avoir peur de l’imprévu et de développer une sorte de stress positif». Mais une fois exagérée, la peur peut développer un excès de stress ou un stress permanent s’il n’est pas traité et pris en charge, a-t-elle averti.
À court terme, le confinement est une protection physique mais aussi une agression psychique dont le degré est variable suivant les cas. Certaines personnes possèdent des facteurs de protection, comme un réseau d’amitié et un niveau intellectuel, et vont probablement profiter du confinement pour améliorer les rapports familiaux et pour prendre contact avec des amis, des collègues et des proches… et sortiront de ce confinement avec une santé plus consolidée, a indiqué à la MAP cette psychologue installée en Belgique.
Au contraire, ceux et celles qui ont gardé pendant leur parcours de vie des facteurs de vulnérabilité, par exemple des blessures, des maladies et des traumatismes et qui ont laissé dans leurs mémoires une trace de vulnérabilité, certes ce confinement va réveiller et engendrer des moments de mémoires douloureuses, a-t-elle expliqué.
A un stade de sa croissance, le stress devient anxiété qui regroupe diverses catégories de troubles pathologiques, a fait remarquer la sexologue clinicienne, notant qu’il peut s’agir notamment d’un trouble anxieux généralisé «TAG», d’un trouble panique, d’un trouble anxiété sociale et d’un état de stress post-traumatique, qui est une forme d’anxiété généralisée qui persiste dans le temps, puis il y a le stade supérieur ou le plus grave qui n’est pas autre chose que la dépression!
Selon Dr El Kabir, «il est fondamental de soulever la légitimité de la peur que nous vivons actuellement au vu du danger réel généré par le risque de contamination, d’être conscient et convaincu du danger de contamination qui ne peut parvenir que de l’extérieur et du contact des autres, et par conséquent être satisfait du confinement et de la prise en charge par soi-même, et de créer un environnement sain au sein du domicile, qui évite les conflits, les critiques et les autocritiques, à travers la communication et l’écoute active et bienveillante».
Et d’enrichir que le confinement a certes des effets négatifs sur l’état psychique des confinés, mais la prise de conscience de l’importance du principe selon lequel «il vaut mieux prévenir que de guérir» peut éviter les effets défavorables sur la santé mentale au même titre que la santé physique.
A cet effet, Dr El Kabir n’a pas manqué d’inviter ses collègues à se mobiliser et à se porter volontaire pour prendre en charge tous ceux et celles qui présentent des souffrances psychiques dues au confinement.
Le confinement, bien qu’il présente de nombreuses conséquences sur la vie quotidienne de tout un chacun, il peut aussi être une occasion idoine de retrouver le sens réel de la vie en se délestant des charges habituelles, en prenant temps pour soi durant cette pause inattendue et surtout en s’engageant dans des actions solidaires.