Après le Coup d’Etat, les guinéens réclament un « dialogue inclusif »

Attendons pour voir…

Nabil EL BOUSAADI

En renversant, le 5 Septembre dernier, le président Alpha Condé qui présidait aux destinées de la Guinée depuis 2010, le colonel Mamady Doumbouya s’était engagé à remettre le pouvoir aux civils à l’issue d’élections qui se tiendront au terme d’une période transitoire de trois années. Ce délai ayant été jugé excessif par plusieurs chancelleries, la Communauté Economique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) avait exigé des putschistes qu’ils se dessaisissent du pouvoir au profit des civils dans un délai maximum de 6 mois.

Mais, dans un communiqué en date du 13 décembre 2021 publié en marge d’une réunion qu’elle avait tenue au Nigéria, en se disant « très préoccupée par le fait que plus de trois mois après le coup d’Etat, aucun chronogramme pour le retour à l’ordre constitutionnel n’avait été publié » par le Comité militaire de transition, alors que les guinéens manifestent pour l’organisation d’élections, la CEDEAO avait sommé les autorités militaires de transition de lui présenter, dans les meilleurs délais possibles, le calendrier y afférent.

Or, en ignorant les « directives » de la CEDEAO, la junte dirigée par le Colonel Mamady Doumbouya a proclamé, le 13 mai dernier, l’interdiction « jusqu’aux périodes de campagne électorale » de toute manifestation sur la voie publique « de nature à compromettre la quiétude sociale et l’exécution correcte des activités » c’est-à-dire durant les trois années censées précéder le retour des civils à la tête du pays.

Faisant fi de cette interdiction, le Front National pour le Défense de la Constitution (FNDC), une coalition de partis, syndicats et organisations de la société civile avait appelé les guinéens à descendre dans la rue le 23 Juin pour dénoncer « les actes de répression », « les pertes en vies humaines et toutes les formes de violences enregistrées au cours des dernières manifestations », « l’interdiction des manifestations », « l’instrumentalisation de la justice » et  « les arrestations extrajudiciaires » ; avant de se rétracter, la veille, pour pouvoir « donner une chance » au dialogue proposé par le gouvernement de transition.

La réunion ayant eu lieu entre les deux parties n’ayant été qu’«une parodie de rencontre » au cours de laquelle la junte au pouvoir s’est « accrochée » à une « conduite solitaire et autoritaire de la transition » portant, ainsi, des « atteintes graves aux libertés et aux droits fondamentaux», de violentes manifestations qui ont eu lieu à Conakry jeudi 28 et vendredi 29 juillet. Elles auraient fait, au moins cinq morts selon les organisateurs, trois d’après l’Organisation guinéenne de défense des droits de l’homme et du citoyen (OGDH) et un seul à en croire la junte au pouvoir.

Autant de raisons pour lesquelles le FNDC et l’OGDH ont exigé, dans un communiqué commun, « une enquête indépendante pour déterminer les circonstances qui ont entraîné les différents décès » et « la libération immédiate et sans conditions de tous les détenus d’opinion ».

En dénonçant, en outre, le fait que la junte au pouvoir en Guinée ait eu recours à la force pour disperser les manifestants, plusieurs organisations de la société civile ont exigé « l’ouverture immédiate d’un cadre de dialogue inclusif » ; faute de quoi, elles appelleront à de nouvelles manifestations dans tout le pays à partir du 15 Août.

Mais si, par ailleurs, au cours d’une conférence de presse conjointe donnée jeudi à Bissau avec le président Emmanuel Macron, le président en exercice de la CEDEAO, Umaro Sissoco Embalo, avait assuré avoir réussi à convaincre la junte d’accélérer le retour à la démocratie et de remettre le pouvoir aux civils dans un délai n’excédant pas 24 mois – au lieu des 36 mois initialement arrêtés – Ousmane Gaoual Diallo, ministre guinéen et porte-parole du gouvernement de transition, a écarté ces propos d’un simple revers de manche en déclarant à l’AFP que « ni le gouvernement ni la présidence ne confirment cette information sur la durée de la transition en Guinée ».

Le « dialogue inclusif » qu’exigent, désormais, les partis politiques, les syndicats et les organisations de la société civile guinéenne va-t-il avoir lieu ?

Et si oui, va-t-il permettre à la Guinée, dont l’existence a été jalonnée de coups d’Etat depuis son indépendance en 1961, de vivre à l’heure de la démocratie après les vingt années du règne dictatorial d’Ahmed Sékou Touré (1961/1982) ou encore les douze années du règne sans partage d’Alpha Condé ?

Attendons pour voir….

Nabil EL BOUSAADI

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