Après avoir longtemps entretenu le suspense, le président ivoirien, Alassane Ouattara, s’appuyant sur la nouvelle constitution du pays, n’exclut plus l’idée de rempiler pour un troisième mandat en 2020. C’est ce qui ressort de l’entretien qu’il a accordé cette semaine à l’hebdomadaire Jeune Afrique et au cours duquel il a déclaré : «La nouvelle Constitution m’autorise à faire deux mandats à partir de 2020. Je ne prendrai ma décision définitive qu’à ce moment-là en fonction de la situation de la Côte d’Ivoire. La stabilité et la paix passent avant tout, y compris avant mes principes».
Il n’en fallait pas plus pour faire sortir de ses gonds le Pr. Georges Armand Ouégnin, président de la coalition de l’opposition «Ensemble pour la démocratie et la souveraineté» regroupant, outre le Front Populaire Ivoirien de l’ancien président Laurent Gbagbo, divers autres partis politiques et des associations de la société civile, qui considère cette annonce comme étant une «pure provocation contre le peuple ivoirien».
Ce rassemblement qui avait vigoureusement dénoncé l’élection du nouveau Sénat en mars dernier, réclame la mise en place d’une nouvelle commission électorale (CEI) qui soit «le gage d’une alternance démocratique et pacifique» préalablement à toute nouvelle consultation électorale et surtout avant les élections présidentielles de 2020.
Et si, avant sa réélection en 2015, Alassane Ouattara avait déclaré, à plusieurs reprises, qu’il ne postulerait pas pour un troisième mandat, force est de reconnaître, toutefois, que, depuis novembre dernier, le président ivoirien entretient le flou quant à une nouvelle candidature; probablement pour déstabiliser ceux qui, dans son entourage, auraient les yeux rivés vers le fauteuil présidentiel. Ainsi, même s’il se dit favorable à l’organisation d’une primaire pour départager les candidats qui, en 2020, représenteront la coalition au pouvoir, Alassane Ouattara semble aussi vouloir apparaître comme étant le meilleur recours.
En n’écartant donc pas l’idée de se représenter en 2020, Alassane Ouattara, se laisse ainsi la possibilité de faire barrage au candidat de son parti qui ne lui conviendrait pas et notamment à Guillaume Soro, l’actuel président de l’Assemblée Nationale, qui a souvent affiché des ambitions présidentielles. Mais, en se comportant ainsi, le président ivoirien qui entend transformer en parti politique la coalition au pouvoir afin d’organiser une primaire pour la présidentielle de 2020 prend aussi le risque de faire éclater ladite coalition car après avoir soutenu sa candidature, en 2010 et en 2015, le leader du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) de l’ancien président Henri Conan Bédié peut s’estimer en droit de réclamer cette fois-ci l’investiture présidentielle en 2020.
Au vu de tout cela, il semble donc que le chemin vers les présidentielles ivoiriennes de 2020 n’est pas un long fleuve tranquille et que le président Alassane Ouattara pourrait bien y laisser des plumes s’il s’obstine à s’accrocher au pouvoir. Espérons, tout de même, que cet « entêtement » ne fera pas revivre au pays un remake des derniers mois de la présidence Gbagbo et attendons pour voir…
Nabil El Bousaadi