Attendons pour voir…
Mer Rouge
Soucieux de « restaurer la stabilité en mer Rouge » après qu’en « solidarité » avec les Palestiniens de Gaza, les rebelles yéménites Houthis avaient attaqué plusieurs navires commerciaux, « liés à Israël », au moment de leur passage dans le détroit de Bab El-Mandeb, les forces armées des Etats-Unis et du Royaume-Uni ont lancé, dans la nuit du 11 au 12 Janvier, 73 frappes contre des sites au Yémen qui, après avoir fait cinq morts et six blessés, aux dires du porte-parole des insurgés yéménites, ont, immédiatement, été condamnées par Téhéran qui les a qualifiées de « violation flagrante de la souveraineté » du Yémen.
Ces attaques ont visé des radars et des infrastructures de drones et de missiles, mais, également, des camps d’entraînement, des bases et des dépôts d’armes, la capitale et le port de Hodeida et ce, afin de « réduire la capacité des Houthis à s’attaquer aux navires marchands en mer Rouge » comme l’ont précisé le quotidien libanais « L’Orient – Le Jour » et le journal italien « La Repubblica ».
Aussi, pour dénoncer ces frappes, des centaines de milliers de yéménites se sont regroupés, dès le lendemain, vendredi, sur la principale place de Sanaa, la capitale, la place Sabyine, en brandissant les portraits du chef du Hezbollah libanais, Hassan Nassrallah et de son acolyte yéménite Abdelmalek al-Houthi, 44 ans, qui, après avoir pris la direction du mouvement rebelle à la suite du décès de son frère en 2004, est parvenu à transformer le groupe en une puissante milice capable, désormais, de défier le gendarme américain et de lui tenir tête en mer Rouge, voire même, comme l’a rappelé David Rigoulet-Roze, chercheur associé à l’IRIS, spécialiste du Moyen-Orient et de la péninsule arabique et rédacteur en chef de la revue « Orients Stratégiques », de « participer, de manière élargie à la résistance contre Israël, en soutien au Hamas dans sa confrontation avec l’armée israélienne ».
Mais en considérant que « la confessionnalisation de la région et les rivalités géopolitiques entre l’Arabie saoudite et l’Iran » ont largement favorisé, ces dernières années, « un rapprochement de plus en plus marqué des Houthis avec Téhéran », il est clair que « l’agenda yéménite est, de plus en plus, indexé sur l’agenda régional iranien » principalement en matière d’armement.
Or bien que, comme l’ait rappelé John Kirby, vendredi, sur CNN, quand « les Houthis appuient sur la gâchette, ce sont les iraniens qui fournissent le pistolet », leur proximité avec le régime des Mollahs n’est pas un facteur d’escalade, d’après Danilo delle Fave, de l’International Team for the Study of Security (ITSS) de Verona, du moment que « Téhéran n’a pas forcément intérêt à ce que le commerce maritime dans le canal de Suez soit trop perturbé car une partie du pétrole et du gaz qui y passe est à destination de la Chine, qui est l’alliée de l’Iran ».
Aussi, à l’issue de la réunion de leur Conseil politique suprême, les Houthis ont expressément déclaré que « les Américains et les Britanniques ne doivent pas croire qu’ils échapperont au châtiment de nos forces armées héroïques (…) Tous les intérêts américano-britanniques sont devenus des cibles légitimes ».
Quand on connait la puissance militaire des Houthis, que le président américain a qualifié, ce vendredi, de « terroristes » – avec leurs missiles de longues distances qui ont une portée dépassant, parfois, 1.000 kilomètres et leurs drones hyper-développés grâce à la technologie iranienne – ainsi que leur grande aptitude à combattre en terrain aride et montagneux, il est donc clair que l’opération anti-Houtis menée par les américano-britanniques ne peut qu’accentuer les craintes d’une propagation régionale du conflit qui oppose le Hamas à l’Etat hébreu dans la bande de Gaza même si, comme l’avait précisé, fin novembre, Danilo delle Fave, spécialiste des questions de sécurité internationales, les défenses anti-aériennes israéliennes parviennent, généralement, à intercepter les missiles yéménites.
Sachant, enfin, que pour éviter d’être accusés de faire cavaliers seuls, les Etats-Unis et le Royaume-Uni ont publié une déclaration dûment signée par les gouvernements de l’Australie, de l’Allemagne, du Bahrein, du Canada, de la Corée du Sud, du Danemark, des Pays-Bas et de la Nouvelle Zélande affirmant qu’ils visent « la désescalade » et le rétablissement de « la stabilité en mer Rouge », attendons pour voir…