Enième cri d’alarme contre les fausses agences de voyage

Le constat est amer. Le métier d’agent de voyage va de mal en pis, de l’avis même des professionnels du secteur, réunis sous l’Association des agences de voyages de Rabat-Salé-Kénitra. «Nous assistons à une dégradation totale de la profession à cause des fausses agences, souvent auteures d’arnaques», dénonce Imane Lamrani, présidente de l’AVRSK. Selon elle, la profession est devenue un véritable terrain de prédilection pour les escrocs de tout genre, avides de gains faciles et sans risques de se voir sanctionner.

Si des données chiffrées sur les arnaques et les escroqueries des agences, y compris celles autorisées par le ministère du Tourisme ne sont pas disponibles, la présidente de l’Association affirme recevoir quotidiennement des plaintes de clients escroqués. Parmi ceux-ci, des pèlerins, des clients de la Omra et d’autres de voyages organisés. Cela concerne aussi bien les fausses agences que les structures disposant de la licence. Le Maroc compte, en fait, quelques 1.500 agences. «Mais aucun contrôle n’est exercé par la tutelle», déplore Lamrani. Les voyagistes affirment avoir adressé des courrières au ministère, mais en vain. Ce «laxisme» de la tutelle fait perdre au fisc d’importantes ressources, à cause notamment de la fraude fiscale, du transfert douteux des devises. Pourtant, la loi en vigueur (31-96) prévoit des sanctions à l’encontre des contrevenants pouvant aller jusqu’au retrait définitif de la licence.

Selon les professionnels, les dispositions de cette loi n’ont jamais été appliquées.Les agences informelles et celles ne respectant pas conditions d’octroi de la licence comme le recrutement d’au moins 5 personnes et l’utilisation de comptes bancaires de la société échappent donc à toute sanction.

RedaAlioua, secrétaire général de l’AVRSK, craint que la profession ne s’enfonce encore plus dans l’anarchie avec l’élargissement du réseau de distribution, objet du projet de loi 11-16. Celui-ci instaure deux catégories de licence : A et B. Et c’est la seconde catégorie qui suscite l’ire des opérateurs. Cette licence sera octroyée aux personnes physiques ou morales qui exercent, accessoirement à leur activité principale, une ou plusieurs activités d’agent de voyage. Sa délivrance n’est pas soumise à la condition de disposer d’un local. Pour les professionnels du secteur, cette disposition favoriserait l’installation de centaines de sites web et de points de vente sans aucun contrôle. «Comment contrôler 6.000 agences quand on est incapables de le faire auprès de 1.500», s’interroge Reda Alioua.

Actuellement, la loi en vigueur impose aux agents de voyage de disposer d’un local et de justifier d’un diplôme de 2e cycle, en plus d’une expérience de deux ans dans une agence de voyages, ou un diplôme de 1er cycle et une expérience de 4 ans, ou encore une expérience professionnelle d’au moins sept ans pour ceux ne disposant pas de diplômes. Avec la future loi, la licence B sera délivrée aux personnes âgées de 21 ans au moins (contre 23 actuellement), qui jouissent d’une formation ou d’une expérience telle que fixée par voie réglementaire. En fait, la création de cette catégorie répond à l’objectif d’étendre le réseau de distribution. Cependant, les opérateurs estiment que la catégorie A, à elle seule,suffit pour couvrir tout le pays. Certains proposent aussi l’instauration d’un label qualité pour professionnaliser l’activité. Une proposition accueillie avec enthousiasme dans les rangs de l’AVRSK dont un membre appelle les clients à «faire preuve de prudence en attendant le réveil de la tutelle». Il s’agit d’abord de s’assurer que l’agence dispose de la licence et d’exiger la conclusion d’un contrat de voyage.

Hajar Benezha

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