10 octobre, Journée mondiale de la santé mentale
Par Dr Anwar CHERKAOUI et Dr Hachem TYAL, psychiatre, psychanalyste
À l’occasion de la Journée mondiale de la santé mentale, célébrée le 10 octobre 2024, un message fort résonne dans les sphères médicales et sociales : le terme « folie » doit être définitivement banni du langage courant.
Ce cri de cœur est lancé par Dr Hachem Tyal, président de la Société marocaine de psychiatrie dynamique (MADP) et directeur de la clinique Villa Les Lilas, qui milite pour une prise en charge plus humaine et respectueuse des personnes atteintes de troubles mentaux.
» Folie » : un mot lourd de stigmates
« Ce mot, trop souvent employé, porte en lui des siècles de stigmatisation, de peur et d’incompréhension », explique Dr Tyal. « En utilisant ce terme, on réduit des milliers de patients à une image caricaturale et réductrice, ignorant les avancées majeures de la psychiatrie et les nuances complexes des maladies mentales. ».
Il est temps de sortir de cette vision archaïque et de reconnaître que les troubles mentaux, tout comme les maladies physiques, sont bien réels, bien diagnostiqués, et surtout bien traités.
Les maladies mentales : une réalité médicale bien explorée
Les troubles psychiques, qu’il s’agisse de dépression, d’anxiété, de schizophrénie ou de bipolarité, sont aujourd’hui mieux compris grâce aux progrès de la recherche scientifique. « Contrairement aux idées reçues, la psychiatrie a fait des bonds de géant au cours des dernières décennies.
» Les diagnostics sont plus précis, et les traitements ont radicalement changé la donne », affirme Dr Tyal.
La compréhension des mécanismes cérébraux, des neurotransmetteurs et des facteurs de risque génétiques ou environnementaux permet désormais de mettre en place des prises en charge personnalisées et efficaces.
Des traitements qui changent des vies
Aujourd’hui, une personne atteinte d’une maladie mentale peut bénéficier de traitements variés, allant des thérapies médicamenteuses aux approches psychothérapeutiques, en passant par les techniques de relaxation ou encore les thérapies comportementales.
« Ces traitements, lorsqu’ils sont bien adaptés, permettent aux patients de retrouver une vie personnelle, familiale et professionnelle normale », assure Dr Tyal.
« Nous avons des exemples de personnes qui, après avoir suivi des traitements, sont retournées à leur emploi, ont fondé des familles et vivent pleinement leur quotidien . »
Changer le regard de la société
Pour que ce progrès se traduise dans la réalité de tous les jours, il est crucial de changer le regard que la société porte sur les maladies mentales.
Dr Tyal insiste : « Il est essentiel que nous adoptions un langage plus inclusif et respectueux, afin de ne pas enfermer les patients dans des étiquettes dévalorisantes. Les mots ont un pouvoir immense. En bannissant des termes comme « folie », nous aidons à casser les barrières de la peur et du rejet. »
Une prise en charge globale et humaine
Dr Hachem Tyal appelle également à renforcer les infrastructures de santé mentale au Maroc, afin de permettre à chaque patient d’accéder à une prise en charge globale, centrée sur l’humain. « La santé mentale ne doit plus être reléguée au second plan. Il faut plus de centres spécialisés, plus de campagnes de sensibilisation, et surtout, il faut que chacun, à son niveau, contribue à briser les tabous. »
En cette Journée mondiale de la santé mentale, le message est clair : il est temps de remplacer la peur par la compréhension, le rejet par l’empathie, et les mots blessants par des termes empreints de respect et de bienveillance. Les troubles mentaux ne sont ni un signe de faiblesse, ni une fatalité : ce sont des réalités médicales que nous devons aborder avec intelligence et solidarité.