France: après le coronavirus, difficile scrutin en vue pour Macron

Après les colères sociales et les critiques sur la gestion de la crise du coronavirus, le parti d’Emmanuel Macron se prépare dimanche à un revers aux élections municipales, une épine de plus dans le pied du président français, à deux ans de la fin de son mandat.

Les Français iront-ils voter ? Mi-mars, à quelques jours du confinement, dans une ambiance alourdie par la peur du nouveau coronavirus, seuls 45% d’entre eux s’étaient déplacés. La France a été durement frappée par le Covid-19 et a enregistré 29.663 décès depuis le début de l’épidémie, selon le bilan publié lundi par le ministère de la Santé.

Cette abstention massive mi-mars n’avait pas vraiment favorisé le parti présidentiel, la République en Marche (LREM): distancé à Paris et Marseille ou Lille, forcé à des alliances avec la droite à Lyon ou Bordeaux, il n’est en position de force dans aucune ville majeure pour le second tour.

«Le problème est que LREM est un parti neuf qui n’a pas d’enracinement local et qui a du mal à s’imposer comme une force. En plus, il a brouillé son image en contractant des alliances à gauche mais surtout à droite après le premier tour», pointe pour l’AFP Jean Garrigues, historien et enseignant à l’université d’Orléans (centre).

«Peut-être la défiance va s’exprimer encore plus par l’abstention que par le vote anti-Macron», ajoute t-il.
Leur objectif – 10.000 places de conseillers municipaux sur les 535.000 que compte la France – est un révélateur de ses faibles ambitions.

Même au Havre, ville portuaire de l’ouest du pays, le Premier ministre Edouard Philippe qui avait pourtant laissé de côté l’étiquette LREM n’est pas certain de l’emporter.

Sa défaite contraindrait probablement Emmanuel Macron à un vaste remaniement ministériel. Une situation paradoxale à l’heure où le président a cristallisé les critiques sur la gestion de la crise du coronavirus et où son Premier ministre le dépasse largement dans les études d’opinion.

Reste à savoir à quel point ce drôle de scrutin – trois mois ont séparé le premier du second tour – peut avoir un impact sur la deuxième partie du quinquennat Macron.
Ces dernières semaines, plusieurs défections de députés ont fait perdre à LREM la majorité absolue à l’Assemblée nationale.

Et une débâcle dimanche pourrait fragiliser un peu plus cette majorité affaiblie voire réveiller certaines ambitions en vue de l’élection présidentielle de 2022.

«Lorsqu’on a une conception du pouvoir qui est très verticale, et très personnelle finalement, on peut imaginer qu’il n’a pas envie d’avoir un parti qui soit un boulet au pied», explique Chloé Morin, politologue associée à la Fondation Jean-Jaurès.

Dans les cortèges du mouvement social des «gilets jaunes» en 2018-2019 ou des manifestations contre la réforme des retraites l’hiver dernier, c’est d’ailleurs cette conception verticale du pouvoir qui était largement critiquée.

«Cette vision qui consiste à dire que les partis ne servent à rien, que les syndicats peuvent être contournés, est une vision dangereuse qui peut mener à une colère comme celle des gilets jaunes», confirme Mme Morin.
Probablement soucieux d’évacuer au plus vite cet encombrant scrutin, Emmanuel Macron a d’ores et déjà prévu de s’exprimer le 29 juin, au lendemain du scrutin.

Il donnera ses premières réponses aux propositions formulées par la Convention citoyenne sur le climat, une assemblée de 150 citoyens tirés au sort pour redonner des couleurs à la démocratie directe dans le pays.

Emmanuel Macron pourrait reprendre à son compte certaines mesures, au moment où il cherche à imaginer la France de l’après-coronavirus et à surmonter la profonde crise économique qui en découle.
«Dans cette nouvelle phase, il y a beaucoup d’espoirs, sur l’Etat-providence, la revalorisation des métiers de santé, sur la relance économique et la souveraineté industrielle française – les attentes sont très fortes, et donc les déceptions risquent d’être très grandes», prévient Jean Garrigues.

Le président français est aussi à l’initiative avec la chancelière allemande Angela Merkel d’un mécanisme inédit de mutualisation de la dette européenne – pour l’instant fixé à 750 milliards d’euros – afin d’aider l’UE à surmonter la crise historique engendrée par la pandémie de coronavirus.

Les dirigeants européens ont prévu de se retrouver en face-à-face mi-juillet à Bruxelles pour trouver un accord rapide sur ce plan massif de relance, à l’issue d’un premier tour de table la semaine dernière, qui a mis en évidence des désaccords.

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