Insuffisances du cadre juridique relatif à la parité et à la protection de la famille

Les participants à une journée d’études, organisée mardi à l’initiative des groupes de la majorité autour de la thématique des deux projets de loi relatifs à l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination (APALD) et au Conseil consultatif de la famille et de l’enfance (CCFE) ont mis à nu les insuffisances des moutures présentées à ce jour et les imprécisions dont elles souffrent .

Selon Abderrazak El Hanouchi, chef de cabinet du président du Conseil national des droits de l’homme (CNDH), le projet de loi 97-14 relatif à l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination est rédigé avec une mentalité masculine par excellence, qui fait qu’il ne s’adresse qu’aux mâles.

Selon lui, le projet est en deçà des efforts du comité scientifique, avant de soulever une série d’interrogations au sujet de l’Autorité à créer, une institution nationale dans la création est prévue par la Constitution dédiée à la protection des droits et libertés.

Il a estimé dans ce cadre que les notions et concepts développés dans le texte ne sont pas concis, à l’image par exemple d’une définition de la discrimination directe et indirecte, le concept de la parité et de l’égalité. Le texte a omis aussi de prévoir pour l’Autorité des mesures protectionnistes comme la saisine automatique, ou l’auto-saisine au lieu de se contenter du traitement des plaintes qui lui parviennent.

S’agissant de la composition de l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination, El Hannouchi a estimé qu’il ne fallait prendre en considération que la compétence et l’expertise au lieu du critère de la représentation. Il a également estimé que l’Etat ne devait pas y être représenté pour assurer l’indépendance de l’Autorité, comme prévu par les dispositions constitutionnelles et la déclaration des principes de Paris.

Il a fait savoir à cette occasion que le Conseil national des droits de l’homme devra remettre au début de la semaine prochaine à la Chambre des représentants un avis consultatif, élaboré à la demande du président de cette chambre au sujet des deux projets.

Pour sa part, Nasser Ettioui, directeur du laboratoire de la famille, de l’enfant et du notariat et membre du comité scientifique ayant travaillé sur le projet de loi relatif au Conseil consultatif de la famille et de l’enfance, a exposé à ce sujet nombre d’expériences internationales dans ce domaine.

Dans le cas du Maroc, a-t-il dit, le Conseil consultatif de la famille et de l’enfance aura suffisamment d’attributions pour contribuer à l’élaboration des politiques publiques concernant la famille et l’enfance, ajoutant qu’il devra être constitué de plus de 20 membres pour y assurer la représentation de la société civile.

De son côté, Aziza Bekkali, présidente du Forum Zahra a fait remarquer que le projet de texte relatif à l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination manque de précision et de concision des notions de la parité et de la discrimination, ajoutant que les prérogatives de l’Autorité sont insuffisantes pour lui permettre de jouer pleinement son rôle.

Elle a souligné aussi la nécessité d’étendre les attributions et les prérogatives du Conseil consultatif de la famille et de l’enfance pour lui permettre d’élaborer des rapports et de revoir sa composition dans la perspective d’y renforcer la représentation de la société civile.

Quant à Samira Bikardane, présidente de l’association démocratique des femmes du Maroc, elle a proposé d’emblée de distinguer entre les deux projets de loi et d’examiner chacun des projets à part, compte tenu de leur importance respective.

Selon elle, le projet relatif à l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination se focalise plutôt sur la promotion des droits tout en occultant tout ce qui a trait à la protection, alors que l’instance en question se doit d’être dotée d’attributions et de prérogatives quasi judicaires pour lui permettre de recevoir des plaintes, d’effectuer des visites en cas de violations du principe de la parité et d’égalité entre les deux sexes, de disposer du droit d’auto-saisine et du droit d’émettre des avis, des propositions, des recommandations, et d’autres attributions devant lui permettre de se charger de la surveillance, du suivi, de la communication et de la sensibilisation.

Elle a fait remarquer dans le même sens que le succès de l’instance dans sa mission est tributaire de sa composition, proposant à l’Autorité de se doter d’un groupe de travail permanent et restreint, spécialisé dans les affaires de l’égalité et de la parité, répondant aux critères de l’expertise, de la compétence, de la performance, et de l’indépendance et ce loin du critère de la représentation.

Selon les organisateurs, une telle journée s’inscrit dans le cadre de la poursuite du débat national en cours avec la participation de l’institution législative et d’autres institutions constitutionnelles pour parvenir à des propositions et recommandations visant à enrichir les projets de loi en question.

M’Barek Tafsi

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