Joe Biden comme gendarme d’un monde en noir et blanc

Attendons pour voir…

Nabil El Bousaadi

L’attaque perpétrée, le 7 Octobre, par le Hamas, contre l’Etat hébreu semble avoir beaucoup plus ébranlé le président américain Joe Biden que le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou car après avoir effectué, mercredi, un voyage express en Israël, le chef de la Maison Blanche s’est adressé, le lendemain, « à la Nation », depuis le bureau ovale, pour lui annoncer que le Hamas et le président russe Vladimir Poutine sont des « ennemis de la démocratie » et a tenu, le surlendemain, une réunion avec les dirigeants de l’Union européenne.

Autant d’initiatives destinées à lui permettre de signaler, aussi bien à ses compatriotes qu’à la communauté internationale, qu’il va falloir prendre, à l’encontre des intéressés, les mesures qui s’imposent.

Ainsi, après avoir désigné, dans son discours, le Hamas et le président Poutine comme représentant des « menaces différentes » bien qu’elles partagent le même désir de « d’anéantir complètement une démocratie voisine », le président Biden n’a pas hésité à repeindre le monde en noir et blanc et à imputer les crises mondiales aux « dictateurs » et aux « terroristes » qui, en ne payant pas « le prix de leur agression, provoquent davantage de chaos, de mort et de destruction ».  

Tout cela l’a poussé, bien entendu, à déclarer qu’il se voyait contraint de demander au Congrès de financer « en urgence » une aide à Israël et à l’Ukraine en tant que « partenaires essentiels » des Etats-Unis.

Mais, en demandant au Congrès de débloquer 10 milliards de dollars pour l’assistance à la sécurité d’Israël et 60 milliards de dollars afin de permettre à Washington de continuer à soutenir l’effort de guerre ukrainien, le président Joe Biden va mettre sous pression le Parti Républicain dont l’aile gauche rechigne à faire des dépenses supplémentaires pour aider l’Ukraine alors que l’aile droite est unanime pour accorder le maximum à Israël ; étant entendu – et c’est là que les choses se corsent –  que si le Congrès ne parvient pas à voter un budget annuel, le pays pourrait être confronté, le 17 novembre prochain, à un « shutdown », donc à une cessation des activités gouvernementales.

Aussi, en reprenant, à son compte, les propos de l’ancienne cheffe de la diplomatie américaine, Madeleine Albright, qui estimait que les Etats-Unis sont « une nation essentielle », le président Joe Biden a déclaré que ces derniers seraient davantage en sécurité « pour des générations » s’il fait cet « investissement intelligent » qui consisterait à soutenir, à la fois l’Ukraine et Israël.

Etant persuadé, par ailleurs, que c’est grâce à leurs « alliances » que les Etats-Unis maintiennent « la cohésion du monde », Joe Biden estime qu’il est de leur devoir de ne pas « laisser les mesquineries politiciennes et la colère se mettre en travers de [leurs] responsabilités en tant que grande nation ».

Après ce discours à la Nation, le Président Joe Biden a tenu, le lendemain, à la Maison Blanche, une réunion tripartite avec le président du Conseil européen, Charles Michel, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, à l’issue de laquelle les dirigeants européens ont manifesté leur détermination à soutenir le droit d’Israël à se défendre contre le Hamas « après l’attaque terroriste épouvantable » perpétrée par ce dernier ainsi que celui du « peuple courageux de l’Ukraine » contre la Russie.

Charles Michel ayant déclaré qu’« Israël a le droit de se défendre (…) dans le respect du droit humanitaire international », après avoir remercié le président américain pour avoir bien voulu effectuer une « visite remarquable » en Israël, Mme von der Leyen a insisté sur l’impérieuse « nécessité », pour l’Union européenne et les Etats-Unis, de faire « face ensemble », c’est-à-dire main dans la main, aux deux conflits précités et sur le fait que les « évènements du Moyen-Orient » ne devraient, en aucun cas, « distraire » l’Union européenne de son « soutien indéfectible à l’Ukraine ».

Mais, outre le fait qu’elle visait à afficher un soutien aussi bien à Israël qu’à l’Ukraine, cette rencontre avait, également, pour objectif que l’Union Européenne et les Etats-Unis parviennent à s’accorder sur la nécessité d’éviter l’ouverture d’un deuxième front avec le Hezbollah libanais car celui-ci pourrait donner lieu à une escalade régionale dont les ramifications seraient imprévisibles.

Si donc après la guerre d’Ukraine, l’attaque perpétrée par le Hamas contre Israël a, une nouvelle fois, donné l’occasion aux Etats-Unis de s’ériger en tant que gendarme du monde, rien n’indique, néanmoins, que, cette fois-ci, Washington va pouvoir accomplir cette mission sans anicroches mais attendons pour voir…

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