La sécurité du Cameroun à l’épreuve du terrorisme

Si le Cameroun a été considéré pendant des décennies comme un havre de paix, un pays stable, ce pays est confronté depuis 2013, à des défis sécuritaires. La menace terroriste pend comme une épée de Damoclès, notamment au nord du pays, frontalier avec le Nigéria où sévit la secte terroriste Boko Haram. Plus de 1200 personnes, c’est le nombre de victimes des attaques perpétrées par ce groupe au Cameroun depuis plus de trois ans, sans compter les destructions de villages entiers, des dégâts matériels, des enlèvements, des demandes de rançon… Le 29 juin dernier, ce sont encore 11 personnes qui ont laissé leurs vies dans un attentat à la bombe perpétré près d’une mosquée àDjakana à la frontière avec le Nigéria. Les détails.

Les attentats kamikazes se multiplient au Cameroun. Si certains y voient un signe d’affaiblissement du groupe terroriste Boko Haram face à la riposte de l’armée camerounaise… il faut dire que la menace terroriste au Cameroun s’enracine, notamment à l’extrême nord du Cameroun qui n’est plus que l’ombre de lui-même.

Kolofata, Amchidé, Kerawa, Limani, ou encore Gossi…ces villes de l’extrême nord du pays sont depuis 2013 les lieux d’incursions, de raids de Boko Haram. 200 attentats, c’est le nombre de frappes terroristes que cette région aurait enregistrées depuis mi-mai 2015, selon un décompte d’Amnesty International. De 2015 à 2016, ce sont près de 500 personnes qui sont mortes dans des attentats perpétrés par le groupe terroriste. Chaque jour ou presque, des villages sont incendiés, pillés, des éleveurs et pêcheurs tués… Un climat de peur règne dans cette région. Et pourtant, jadis, celle-ci était un vivier de l’économie nationale, notamment en matière touristique, avec le parc national de Waza laissé désormais à l’abandon.

Tout commence le 19 février 2013 quand une famille française, Moulin-Fournier, est enlevée dans la localité de Dabanga, près de Kousséri. Après leur libération, s’en suivront d’autres enlèvements, dont celui du prêtre français Georges Vandenseusch, le 14 novembre 2013, ou celui des pères Gianantonio Allegri, Giampaolo Marta et la sœur Gilberte Bussière et le chef traditionnel du village Goumouldi en avril 2014. Ce dernier sera retrouvé égorgé au Nigéria. Le scénario funeste ne s’arrête pas. Du 16 au 17 mai, dix ressortissants chinois disparaissent au parc national de Waza. Deux mois plus tard, à Kolofata, sont enlevés l’épouse du vice premier-ministre camerounais, sa belle-sœur, le maire et lamido de la ville, son épouse, ses enfants et d’autres membres de la famille. Toutes ces attaques confirment la position stratégique du Cameroun pour Boko Haram. D’ailleurs, des centaines d’armes et munitions sont découvertes dans la ville de Kousséri.

Face à cette menace nourrie entre autres par les frontières très poreuses avec le Nigéria, le Tchad, ou encore la présence de plus de 45 000 réfugiés au nord du pays, en provenance de Centrafrique et du nord-est du Nigéria, le pays a pris des mesures pour assurer la sécurité des habitants de la région mais aussi du pays en général. Le dispositif sécuritaire a été renforcé dans la région de l’extrême nord, mais également dans les grandes villes camerounaises, dont Douala, Yaoundé, notamment dans les environs des établissements militaires, notamment, les casernes, l’hôpital militaire et le ministère de la Défense.  Depuis 2014, le pays a réorganisé son dispositif militaire, en dotant le nord du pays d’une quatrième région militaire interarmées.  L’Etat a également renforcé les capacités militaires par des recrutements massifs des forces spéciales. Il a renfloué notamment les effectifs du bataillon d’intervention rapide. Les autorités religieuses musulmanes mettent également la main à la pâte en déployant des comités de vigilance et des réseaux d’informateurs dans les mosquées. Toutefois, ces mesures restent limitées. La secte continue de semer la terreur et son impact sur le pays est considérable.

Si l’insécurité liée au terrorisme a entrainé de nombreuses pertes en vies humaines, des dégâts matériels, elle a également porté un coup dur à l’économie du pays, notamment au niveau du commerce et des échanges transfrontaliers. Jadis, de nombreux commerçants camerounais allaient écouler leurs produits au Nigeria. Le tourisme dans la région du nord et extrême-nord est également frappé de plein fouet. Les hôtels et sites touristiques de la région sont désertés. A l’échelle nationale, les failles opérationnelles du pays pour lutter contre Boko Haram pourraient éventuellement réduire les investissements directs étrangers dans le pays.

Danielle Engolo

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