Par Najib Amrani
Il a été et reste, partie prenante dans tous les combats pour la défense, la conception, l’adoption et la mise en application des statuts des métiers des arts. Tantôt militant de base, tantôt syndicaliste, souvent théoricien, parfois médiateur, Lahoucine Echaabi a toujours été présent pour faire avancer le chantier brulant relatif à l’adoption des différents statuts des artistes, notamment dans les domaines de l’industrie du spectacle.
«De nombreuses consœurs et beaucoup de confrères ne voient en moi que le militant syndicaliste à qui on fait appel pour régler des problèmes d’ordre administratif ou financier. Peu d’entre eux prêtent attention à mes créations et à mon œuvre. C’est pourquoi j’ai décidé de concrétiser mes projets et de les médiatiser», dit-il, non sans amertume. Un constat que la metteure en scène, Asmaa Houri, confirme en des termes limpides et savamment bien choisis : «Lahoucine Echaabi est un homme de culture hors pair qui vit avec un besoin insatiable de défendre ses droits et les droits des autres sans peur ni réticence… Aujourd’hui plus que jamais, nous avons besoin de personnes comme lui, intègre et vrai pour pouvoir développer le domaine de l’art et de la culture et se révolter contre la médiocrité et l’opportunisme».
Aujourd’hui, ses pairs, ses amis et ses confrères lui consacrent un ouvrage pour l’honorer et lui rendre le plus beau des hommages, à travers un ouvrage collectif, pour lequel ils ont choisi affectueusement et tendrement, le titre «Les brèches de la gratitude». Présenté en novembre dernier à l’occasion du 14e festival des arts du spectacle à Tanger, cet ouvrage est un hommage au parcours artistique, militant et littéraire et son engagement militant pour le progrès et le triomphe des valeurs de la liberté et de la préservation des droits humains. A ce propos, écrit le dramaturge et homme de théâtre, Mohamed Qaouti, coordinateur de cette initiative, « nous avons observé le parcours de Lahoucine pendant quatre décennies, et nous avons détecté chez lui un enracinement des valeurs de l‘appartenance, de l’engagement humain spontané, pur et désintéressé et l’aptitude inné à servir ses pairs et à être à la disposition des autres à tel enseigne que ses bienfaits ont jailli de toute part, ne nous laissant d’autre choix que de l’honorer».
Plus directe encore, l’actrice et ancienne ministre de la Culture, Touria Jebrane rend hommage à « un cumul d’actions et de missions –menées par monsieur Echaabi- comme acteur de premier plan au service des artistes sur les plans institutionnel, organisationnel et social».
Dans ce recueil, un témoignage sort vraiment du lot et offre une lecture d’une autre dimension quant au parcours insolite de cet artiste militant hors du commun. Il s’agit du récit de sa propre sœur et néanmoins camarade, Fatima Echaabi. Dans un récit émouvant, elle nous plonge dans l’univers familial et la genèse de la personnalité de son frère, né quelques temps après le terrible tremblement de terre qui avait endeuillé la paisible cité balnéaire d’Agadir en 1960. L’universitaire et dirigeante progressiste a tenté de dresser le parcours de son frère avec une fidélité et honnêteté exceptionnelles. Fatima nous raconte les premiers débuts de l’enfant Lahoucine, jovial et chaleureux, au quartier «Msirnate» à Agadir et comment ce passage a marqué son enfance et forgé sa personnalité. Une personnalité forte, solide mais imprégnée d’un humanisme quasiment inné.
Son autre vieil ami d’enfance, le poète et homme de théâtre, Mostafa Houmir, nous raconte ses premiers actes de militance à travers la naissance de leur amitié au sein de l’Association Anouar Souss pour la culture et l’art à la maison des jeunes d’Agadir. «Nous étions en train de répéter une pièce de théâtre, se remémore Houmir, quand un jeune ado est venu regarder par la fenêtre. Nous l’avons invité à entrer. A la fin de la séance, hésitant et un peu intimidé, il s’est adressé au metteur en scène avec ces propos : «j’aime le théâtre et je veux faire partie de votre troupe».
Cet amour pour le théâtre que Saoudi Laamalki, le journaliste et militant progressiste résume parfaitement par ces mots sans ambages : « depuis son jeune âge, il – Lahoucine Echaabi – ne respirait que par le théâtre et ne vivait que par ce qu’il pourrait généreusement donner sans compter».
Mahtat Rakas, le directeur de publication de Bayane Al Yaoume dont Lahoucine est le rédacteur en chef, s’arrête lui aussi sur cet aspect de sa personnalité : «Lahoucine est un grand amoureux de la vie, un éternel optimiste, rien ne peut lui ôter le sourire ou l’aptitude à servir. C’est là le premier sentiment qu’inspire Echaabi auprès de tous ceux qui le côtoient et que beaucoup reconnaissent et attestent».