Le gouvernement technocratique n’est pas la solution !

Point de vue

Beniaich Mohamed

L’histoire la plus appréciée des néolibéraux pour nous convaincre du règne de leurs technocrates est celle de la pièce de théâtre d’Henrik Ibsen, Un Ennemi Du Peuple. Dans cette histoire, l’économie d’une petite ville dépend des personnes qui visitent ses bains, et un médecin découvre que les eaux sont contaminées. Si l’information est rendue publique, la réputation du lieu pourrait être ruinée. Dans une réunion tumultueuse, la population manifeste sa colère contre le médecin ; essayant de protéger leur mode de vie en cachant la vérité. Le fait qu’Ibsen organise la pièce de théâtre autour d’un problème de santé dans lequel l’opinion du médecin doit prévaloir sur celle du peuple vient du fait que les néolibéraux considèrent les gens comme irrationnels, irresponsables et ne recherchent que des intérêts à court terme alors que les technocrates néolibéraux sont (1) des experts qui ont des horizons à plus long terme que les politiciens cherchant à se faire réélire, (2) ils ne sont pas soumis à la pression d’intérêts particuliers, (3) ils savent mieux que les politiciens et les citoyens, (4) leurs décisions sont fondées sur des preuves, et (5) leurs délibérations sont de meilleure qualité que celles observées en politique représentative. (Eri Bertsou). Ainsi, les problèmes publics, liés à la « santé » du régime politique, doivent être traités par des médecins ou des experts plutôt que par des politiciens qui devraient se plier aux aspirations et intérêts contradictoires de leurs électeurs . Cependant, l’agenda néolibéral derrière la technocratie est de consolider la dépolitisation de toutes les questions de société, surmonter les intérêts de classe et les divisions idéologiques et tout soumettre aux lois du marché. Pour le néolibéralisme, le marché est le seul processeur d’informations suffisamment efficace et décentralisé pour donner un sens aux besoins et aux exigences de la société. Le marché ainsi compris distribue non seulement la richesse et l’influence, mais aussi la connaissance, y compris une interprétation spécifique du type de connaissances utiles, précieuses, pertinentes et vraies. La conséquence directe de cette vision est la corporatisation de tous les secteurs socio-économiques clés afin qu’ils satisfassent le mieux possible aux demandes toujours croissantes exprimées sur le marché, ou encore ces secteurs tels que la santé publique ou l’éducation publique devraient se doter d’étapes ou de structures qui imitent le marché afin de rendre les institutions publiques plus efficaces, plus à l’écoute d’une information juste et réelle.

Contrairement au technocrate traditionnel qui a une mission large et indéterminée, à savoir une gestion plus efficace des enjeux sociaux, le technocrate néolibéral a un objectif plus précis, isoler l’économie et les enjeux sociaux de la contestation démocratique et politique et tout soumettre aux lois du marché alors que les enjeux socio-économiques sont mieux compris idéologiquement.

Prochain article : Le danger de la technocratie  sur le processus démocratique.

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